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Actualités - OPINION

Feltman indispose beaucoup les prosyriens, mais les impressionne tout autant

Les positions sévères qu’affiche, par voie de communiqués, l’ambassadeur des États-Unis, Jeffrey Feltman, indisposent le pouvoir, les loyalistes et sans nul doute aussi les décideurs. Mais les impressionnent encore plus, et ils ne semblent pas vouloir les prendre à la légère. C’est ce qui ressort des remarques du président Nabih Berry. Qui qualifie le diplomate de « haut-commissaire », tout en soulignant qu’il existe un large fossé entre ce dernier et Anjar. Dont le président de la Chambre s’avoue ainsi le héraut patenté. Dans le camp du pouvoir, on ne cache pas qu’on considère toujours les interventions US comme une ingérence flagrante dans les affaires intérieures de ce pays. Mais on ne semble pas vouloir s’aventurer derechef à rappeler à l’ordre l’ambassade, comme on avait cru pouvoir le faire à la fin de l’année dernière. Bien que cette fois l’intervention soit encore plus pesante, plus lourde de sens. En effet, ce n’est pas à n’importe quelle occasion que Feltman s’est exprimé. Mais à l’issue d’un entretien, sans doute pressant, avec le chef de l’État, le président Émile Lahoud. Dans son communiqué consécutif, l’ambassade se montre on ne peut plus tranchante. Il faut, exige-t-elle, une exécution complète de la 1559. Et des élections législatives transparentes, régulières, crédibles, sans immixtion extérieure. Feltman, on le sait, répercute les sommations adressées récemment aux dirigeants syriens, à Damas, par le numéro deux du département d’État, Richard Armitage. Qui n’a pas daigné visiter le Liban, estimant qu’il vaut mieux, comme on dit, s’adresser à Dieu plutôt qu’à ses saints. Le ton monte donc. Mais pour ainsi dire unilatéralement, de la part des Américains. Car sur place, il se trouve de plus en plus de loyalistes qui, constatant que Damas évite de son côté la confrontation ouverte et l’escalade avec Washington, commencent à se dire qu’il n’est pas raisonnable d’être plus royaliste que le roi. Et indiquent, en privé, qu’il faut prendre en compte les exigences internationales articulées autour de la 1559, les étudier calmement pour un éventuel arrangement. Permettant une application par étapes longuement délayées de cette résolution onusienne. Ces sources inquiètes notent en effet que, sur le plan des échanges diplomatiques, les Américains passent pratiquement de la pression à la menace à peine voilée. C’est ce que veut dire, en général, le fait qu’au lieu de faire des déclarations publiques devant tout venant, on s’adresse directement, personnellement, aux autorités d’un pays ciblé. Pour publier ensuite des communiqués officiels qui prennent valeur d’ultimatums. Les Américains revêtent d’un caractère de double urgence, à l’approche des élections irakiennes, palestiniennes puis libanaises, leur cahier de doléances initial. Qui développe les généralités connues : libération du Liban de la tutelle syrienne, de l’emprise iranienne répercutée par le Hezbollah, de l’insalubrité sécuritaire des camps palestiniens. Pour qu’il récupère sa souveraineté, son indépendance, son autonomie de décision. Des sources informées, commentant les entretiens que l’ambassadeur Feltman a eus également avec Karamé, indiquent que le diplomate a tenu avant tout à faire savoir à son interlocuteur que rien n’échappe à l’œil de Washington. Qui suit donc de très près, et en détail, tout ce qui se passe sur la scène locale, ouvertement ou en coulisses. En vérifiant la moindre des rumeurs. Pour signaler ensuite les erreurs, les dérapages, les fautes qui se produisent du côté des futurs ex-tuteurs comme des officiels du cru. En marge de cette orientation, Feltman plaide en quelque sorte pour un traitement homéopathique du cas libanais. C’est-à-dire que pour mettre un terme aux interventions étrangères, il n’hésite pas à intervenir lui-même. En multipliant les démarches, les contacts, aussi bien avec divers pôles politiques, opposants ou loyalistes, qu’avec les autorités. En réponse aux critiques qui lui sont adressées à ce sujet, il souligne qu’il applique, sans états d’âme, la politique de dégraissage ordonnée par Washington pour le bien même de ce pays. Pour qui les élections du printemps peuvent constituer, à son avis, un tournant salutaire. Si elles se déroulent dans un climat de vraie liberté démocratique. Bien entendu, les Occidentaux, et beaucoup d’Arabes, sont sur la même longueur d’onde. L’on s’attend d’ailleurs à un nouveau carrousel d’émissaires européens ou autres venant accentuer la pression pour l’application de la 1559. Succédant ainsi au ministre européen des Affaires étrangères et à son homologue jordanien. Les Américains eux-mêmes devraient enfoncer le clou davantage en dépêchant à Beyrouth, dans la seconde moitié de ce mois, un émissaire spécial. Selon un député, il est clair que les USA sont déjà engagés dans leur grand projet de modification de la carte géopolitique et institutionnelle de cette région du monde. Ils veulent rendre des régimes déterminés à leur volume naturel, exagérément gonflé. Pour favoriser l’expansion de la démocratie, le Liban constituant une entrée en matière idéale. Tant à cause de ses structures qui favorisent la démocratie que par la réduction du rôle syrien, afin de montrer qu’il ne doit plus y avoir d’État dominant dans la région. Ce qui sous-entend, selon ce parlementaire, que, par la suite, même Israël devra se mettre au pas. D’où l’insistance de Bush concernant la création d’un État palestinien. Il reste à savoir si, aussi puissants qu’ils soient, les Américains peuvent vraiment gommer au Moyen-Orient les totalitarismes et les despotismes de toutes sortes. En tout cas pour le Liban, la plupart des professionnels en conviennent, l’heure de vérité qui affiche 15-59 va bientôt sonner. Sans que nul ne puisse faire reculer les aiguilles. Philippe ABI-AKL

Les positions sévères qu’affiche, par voie de communiqués, l’ambassadeur des États-Unis, Jeffrey Feltman, indisposent le pouvoir, les loyalistes et sans nul doute aussi les décideurs. Mais les impressionnent encore plus, et ils ne semblent pas vouloir les prendre à la légère. C’est ce qui ressort des remarques du président Nabih Berry. Qui qualifie le diplomate de «...