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Actualités - interview

« La présidentielle a été escamotée, les législatives doivent être une occasion de changement », estime le chef du RD Nassib Lahoud : Notre objectif, des listes communes d’opposition partout au Liban (photo)

Unité, pluralité, solidarité, démocratie, intégrité, libertés. Ces vocables paraissent anodins lorsqu’ils sont pris chacun individuellement, d’autant qu’on retrouve chacun d’eux au quotidien dans un grand nombre de discours politiques. Mais combinés les uns aux autres, comme chez le chef du Renouveau démocratique (RD), le député Nassib Lahoud, ils acquièrent cette force tranquille qui guide actuellement l’opposition nationale plurielle – à pas lents mais sûrs – vers un front commun pour les prochaines législatives. Des législatives qui s’annoncent pour le moins disputées. Plusieurs voix se sont d’ailleurs élevées au sein de l’opposition pour dénoncer d’ores et déjà une falsification du processus électoral. Dans ce cadre, Nassib Lahoud évoque les expériences peu encourageantes du passé : les législatives de 1992, 1996 et 2000, sans oublier les élections partielles. « Il ne s’agit pas pour nous de contester à l’avance les résultats du scrutin, mais de mettre en garde contre certains agissements, de mettre sur la table les principes et les mécanismes qui permettront des élections libres et intègres, reflétant la volonté populaire. Nous ne réclamons pas le pouvoir pour superviser les élections, mais un gouvernement impartial qui pourrait en même temps proposer une loi électorale neutre et gérer des élections libres, intègres, basées sur des listes électorales non trafiquées. Un gouvernement qui saurait éliminer les ingérences des SR, qui imposerait le respect de l’isoloir, etc. Des choses qui vont de soi dans les pays démocratiques. Et c’est dans ce sens qu’il faut comprendre notre combat pour que les élections de 2005 se déroulent dans des conditions normales », affirme le député du Metn. Qui précise que « le climat dans lequel a été formé ce gouvernement ne laisse pas présager une gestion neutre des élections ». « Je me suis plusieurs fois exprimé sur la nécessité de mettre en œuvre la présidentielle et les législatives au service d’un projet de réforme et de changement dans le pays. La présidentielle a été escamotée, la Constitution a été violée. Nous souhaitons que les législatives de 2005 soient une occasion de changement, de renouvellement, dont le Liban a désespérément besoin », dit-il. Nassib Lahoud est convaincu que le camp loyaliste fait l’impossible pour que les élections soient « une prolongation du projet qui a commencé avec la prorogation du mandat présidentiel ». D’où ce climat préélectoral instauré par le pouvoir, qui semble privilégier menaces, chantage et marchandage, notamment avec les attaques contre Joumblatt, les offensives de charme en direction de Aoun et de Geagea, et les propositions faites à Harb et Moawad d’intégrer le cabinet ? « Absolument, réagit-il. Ces efforts relèvent beaucoup plus de manœuvres politiques que d’une volonté de réaliser la réconciliation nationale. Je pense qu’il faut cesser de considérer l’affaire Geagea et le retour de Aoun comme faisant partie du bazar politique. Ces deux dossiers devraient faire partie d’une volonté de fermer définitivement le dossier de la guerre. Cessons de les mettre à profit dans des manœuvres de bas étage. La manœuvre pour intégrer parfois Boutros Harb et parfois Nayla Moawad n’était pas destinée à former un gouvernement d’unité nationale. Je pense que, s’il en était ainsi, ils auraient accepté. Depuis le début, le camp de l’opposition a formulé les conditions qui permettraient l’élaboration d’un cabinet d’unité l’incluant. Ce n’était pas une question de maroquins, mais de participation au cabinet, doublée d’un accord préalable sur les lignes directrices d’un nouveau gouvernement. Un nouveau cabinet sans volonté de changement politique n’a pas de sens pour l’opposition », martèle Nassib Lahoud. Un combat commun Après la candidature de Gebran Tuéni sous le signe de l’opposition nationale plurielle, serait-il possible de voir émerger une seule liste d’opposition au Liban ? Nassib Lahoud appuiera-t-il Walid Joumblatt au Chouf, Habib Sadek au Sud, Samir Frangié au Nord, etc. ? « Cela est notre objectif, note-t-il. L’opposition a commencé là où il fallait commencer, par un programme commun, suffisamment étoffé pour expliquer nos positions sur les relations libano-syriennes, sur l’économie... L’opposition a eu le courage de désigner clairement les deux ou trois points sur lesquels il y avait des divergences au niveau de la formulation commune, précisant qu’un dialogue était en cours pour y aboutir. Ces points ont été mis de côté temporairement, le temps qu’on trouve un accord. La prochaine étape est d’élargir ce programme à d’autres forces de l’opposition. Il s’agit de se mettre d’accord sur 80 ou 90 % des sujets qui forment le programme de changement dans le pays et de poursuivre le dialogue sur les points de divergence. Enfin, il faut absolument nous battre avec des listes communes dans tout le Liban. L’important n’est pas de savoir quelle sera l’envergure de chaque bloc individuellement, mais que les forces de changement aient un poids important au prochain Parlement, qui permettra ou bien de participer au pouvoir exécutif dans de bonnes conditions permettant la mise en place d’une dynamique de changement, ou bien de pouvoir peser sur les décisions pour qu’il y ait vraiment un changement dans la vie politique du pays. » Le pouvoir essaye-t-il de limiter les dégâts dans la « périphérie », au Nord en particulier, parce que le Mont-Liban et Beyrouth sont, d’une certaine manière, d’ores et déjà acquis à l’opposition ? « La bataille n’est pas acquise, ni au Mont-Liban ni à Beyrouth, mais elle se présente dans de meilleures conditions », répond Nassib Lahoud, lucide. Et de poursuivre : « L’engineering électoral pernicieux auquel se livre le pouvoir est multidirectionnel et touche toutes les régions. Il faut y mettre un terme, et nous allons continuer la pression pour que la loi électorale soit établie sur des bases neutres et objectives. C’est dans ce sens qu’il faut comprendre la proposition que nous avons faite. En 2000, j’ai moi-même présenté une proposition d’amendement électoral au Parlement pour revenir à la loi de 1960. L’avantage de cette loi aujourd’hui, c’est que c’est un découpage historique et légitime. Les cazas existent dans le subconscient des Libanais. Ces derniers s’identifient à leur village, à leur ville, mais aussi à leur caza. Le découpage sur base de la loi de 1960 a déjà fait ses preuves entre 60 et 72. Il pourrait être une solution pour les élections de 2005 en attendant que nous nous mettions tous d’accord sur une loi électorale et un découpage administratif qui seraient cohérents. De plus, l’accord de Taëf a prévu que le découpage électoral se fasse sur base du découpage administratif, ce qui n’a jamais été le cas depuis 1992. Il faut s’atteler à une loi qui respecte l’accord de Taëf. Il est trop tard pour le faire, cette fois : retournons vers le découpage de 1960, qui n’est pas un découpage arbitraire fait par l’opposition contre les loyalistes. » Une expérience singulière L’expérience du RD est singulière. Au printemps, le parti présentera une multitude de candidats dans différentes régions, du nord au sud. Partant, il n’est pas étonnant que la formation serve d’exemple, à plus petite échelle, à l’opposition nationale plurielle. Pour Nassib Lahoud, le pluralisme « fait partie de la vocation du RD : pouvoir rallier des hommes politiques et des militants de toutes communautés sur un programme commun que nous défendrons nonobstant les régions où on se bat. Nous aurons un seul programme au Nord, au Sud, à Beyrouth, au Mont-Liban et dans la Békaa ». Et de poursuivre : « Nous avons participé activement à la rédaction du programme commun de l’opposition et à la proclamation solennelle de ce programme au Bristol. Nous y adhérons et nous sommes prêts à participer à cette bataille en commun. Les élections seront une action commune pour ce nouveau front d’opposition. » Et, dans ce contexte, le programme du RD se veut rassembleur, unificateur, à l’image même de son chef Nassib Lahoud : « Nous ne nous battrons pas sur une seule idée, mais sur quatre qui seront à la base de notre prochaine campagne électorale : la consolidation du système démocratique et la protection des libertés, le rééquilibrage des relations libano-syriennes, une politique économique libérale à visage social et, enfin, une dynamisation du rôle du Liban à l’intérieur du monde arabe et sur le plan régional. » Michel HAJJI GEORGIOU

Unité, pluralité, solidarité, démocratie, intégrité, libertés. Ces vocables paraissent anodins lorsqu’ils sont pris chacun individuellement, d’autant qu’on retrouve chacun d’eux au quotidien dans un grand nombre de discours politiques. Mais combinés les uns aux autres, comme chez le chef du Renouveau démocratique (RD), le député Nassib Lahoud, ils acquièrent cette force...