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Berry, à son tour, au centre d’une querelle politique

Finalement, la querellite n’est pas un mal qui frappe uniquement l’Exécutif. Voici en effet que sur ce plan, qu’il dénonce comme source de crise au niveau du pouvoir, Berry rejoint les deux autres présidents. Cette fois, cependant, l’enjeu n’est pas la présidentielle. Mais les législatives de 2005. Plus précisément, dans la Békaa. Explications :
Après deux passages successifs remarqués dans la haute plaine, qu’il daignait rarement honorer de sa visite jusqu’à ces derniers temps, Berry annonce qu’il va inaugurer demain samedi à Zahlé... une station de filtrage des eaux usées, c’est-à-dire sales. Comme symbole, on pouvait difficilement trouver mieux. À cette auguste occasion, le président de la Chambre se fait politiquement inviter par Élias Skaff, au Casino Arabi du Wadi el-Arayech. Lequel Skaff, ministre de l’Industrie, est comme on sait et comme feu son père Joseph, un grand faiseur d’élections dans la Békaa. Le signal est donc clair. Mais à qui s’adresse-t-il au juste ? Au Hezbollah ? Non, plutôt à un pôle de la région, le député Mahmoud Abou Hamdane. Dont on sait qu’il a été éjecté des rangs du mouvement Amal que Berry dirige. Le parlementaire, qui dispose d’une certaine assise, a aussitôt formé un groupe compact de dissidents amalistes békayotes. Il menace dès lors les positions de son ancien chef de file dans la région. Ses amis, qui ne se résument pas aux gens de la plaine, partent en campagne en sa faveur. Donc, contre Berry. Ce dernier se voit de la sorte accusé de déroger au principe fondamental de la séparation des pouvoirs. Comment ? Tout simplement en inaugurant, à tour de bras, des projets qui bien entendu sont du ressort de l’Exécutif. Il a ainsi coupé le ruban sur le Wazzani, en présence du président Lahoud qui a dû le laisser lever le voile sur la plaque commémorative, en infraction aux règles du protocole. Ce chantier avait été confié à l’émérite chouchou de Berry, cette pompe à fric qu’est le Conseil du Sud. À partir de cet exemple, et de quelques autres, les contempteurs de Berry se demandent quel droit de critique il peut se garder, en tant que Législatif censeur, par rapport à des projets qu’il inaugure mais qui sont réalisés par l’Exécutif.
En réalité, c’est là chercher la petite bête. La paille plutôt que la poutre. Car la séparation des pouvoirs au Liban, tout comme l’Équateur sur la mappemonde, est une ligne tout à fait fictive. Berry, président de la Chambre, est en effet directement partie prenante au sein de l’autorité exécutive, puisqu’il dispose de plusieurs ministres bien à lui et qu’il influe puissamment sur nombre d’autres. Au sein de l’Administration, sa part est toujours largement réservée, sinon il fait un malheur. On sait, du reste, que les tentatives de réforme entreprises à ses débuts par Hariri, puis les velléités des hossistes-lahoudistes ont capoté par suite des positions d’un Parlement très sensible aux humeurs du perchoir. Dans le temps, d’ailleurs, c’est bien le speaker de la place de l’Étoile qui avait établi la soi-disant charte d’honneur, la règle du jeu interprésidentiel dite de Faqra, restée lettre morte. Quand des officiels étrangers se pointent, Berry exige toujours d’être présent lors de leurs échanges avec le chef de l’État et avec le président du Conseil, bien que cela ne soit nulle part l’usage. Malgré les dérapages, les retournements de veste à répétition de la Chambre (pour la prorogation de Hraoui jadis, pour la refonte du code de procédure pénale dernièrement), Berry se comporte, selon ses adversaires, comme si le système libanais était parlementaire et non présidentiel ou semi-présidentiel. Il refuse, dans cet esprit, d’entendre parler d’une réduction de son mandat de quatre à deux ans. Il fait de même obstinément obstacle à un réexamen de la Constitution qui redonnerait au président de la République le droit de dissoudre la Chambre. Ce qui n’est possible aujourd’hui que sous des conditions quasi impossibles à réunir, comme un refus des parlementaires de tenir séance. À partir de ces données, comme le patriarche Sfeir mais pour d’autres raisons, Berry est contre tout amendement de la Constitution. Et il rue dans les brancards quand on lui propose de soumettre le Parlement, comme toute institution de l’État devrait l’être, au contrôle comptable de la Cour des comptes. Pour en revenir à la Békaa, il est manifeste que Berry cherche à faire pièce à Abou Hamdane. En même temps, il titille un peu son ancien rival, Hussein Husseini, habituellement ami des Skaff. Tout comme il se signale à l’attention du Hezbollah, en intervenant à Baalbeck même pour la commémoration de la disparition du fondateur d’Amal, l’imam Moussa Sadr. Cependant, l’occasion de Zahlé dévalue visiblement le statut honorifique de la présidence de la Chambre. En effet, pour une installation de recyclage d’eaux usées, un quelconque chef de section d’un ministère aurait parfaitement fait l’affaire. C’est ce qui pousse certains ministres à proposer que désormais l’attribution des inaugurations soit du ressort d’une commission ministérielle spéciale.
Philippe ABI-AKL
Finalement, la querellite n’est pas un mal qui frappe uniquement l’Exécutif. Voici en effet que sur ce plan, qu’il dénonce comme source de crise au niveau du pouvoir, Berry rejoint les deux autres présidents. Cette fois, cependant, l’enjeu n’est pas la présidentielle. Mais les législatives de 2005. Plus précisément, dans la Békaa. Explications :Après deux passages...