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Les experts excluent une opération israélienne d’envergure Retour sur scène du Hezbollah après des mois de marginalisation

Après des mois de silence, voire de marginalisation, le Hezbollah est de nouveau à la une de l’actualité locale et régionale. La tension des derniers jours, dans le secteur des fermes de Chebaa et dans le nord d’Israël, a certes mobilisé la communauté internationale, qui, secrétaire général de l’Onu en tête, s’est empressée de condamner la formation libanaise. Mais celle-ci a réussi, en dépit de tous les pronostics contraires des analystes, à revenir à l’équation qui prévalait avant la guerre en Irak, forte de la situation trouble dans la région : chaque agression israélienne entraînera une riposte et les survols continueront à essuyer des tirs de DCA. Quant à la guerre parallèle, celle des services secrets, elle se poursuit sans relâche entre le Hezbollah et Israël, mais là, c’est une autre histoire.
Depuis le début de la guerre américaine en Irak, on n’entendait plus parler du Hezbollah et sa dernière opération dans le secteur des fermes de Chebaa remontait au mois de janvier, c’est-à-dire avant la chute de Bagdad. Tous les analystes s’en étaient d’ailleurs donné à cœur joie, affirmant que cette formation avait perdu sa raison d’être et qu’elle vivait pratiquement ses derniers jours, même si le Liban officiel essayait tant bien que mal de lui trouver une place sur la scène interne. Malgré ses milliers de katiouchas pointés vers le nord d’Israël, le Hezbollah était donc plutôt marginalisé, le nouveau contexte régional exigeant une grande prudence et, surtout, le calme à la frontière israélo-libanaise.
Après avoir été reconnu comme l’un des principaux artisans de la libération du Liban-Sud en mai 2000, le Hezbollah se retrouvait soudain prisonnier des enjeux de ses deux parrains, la Syrie et l’Iran, contraints à revoir leurs calculs et leur stratégie après la chute de l’Irak.

De sévères rappels à l’ordre
Il avait d’ailleurs été sévèrement rappelé à l’ordre par les autorités syriennes, après l’opération du 21 janvier à Chebaa, qui avait failli remettre sérieusement en cause le calme à la frontière et entraîner les Syriens dans une aventure dont ils ne voulaient absolument pas. De son côté, l’Iran, par la voix de son président Mohammed Khatami, en visite à Beyrouth, avait clairement indiqué qu’il était favorable à la négociation et non à l’action militaire, rappelant que, désormais, le Hezbollah n’était plus son interlocuteur privilégié au Liban.
Le Hezbollah a certes tenté de ramer par-dessus la vague, mais sa marge de manœuvre était des plus réduites et ses moujahidine plutôt démotivés, malgré les tentatives de leur commandement de les calmer, tantôt en célébrant des mariages collectifs, tantôt en organisant des meetings en hommage à leurs efforts. C’était, en quelque sorte, le spleen, d’autant que Syriens, Iraniens et même Libanais estimaient qu’il fallait à tout prix éviter de fournir le moindre prétexte aux Américains et par conséquent aux Israéliens.
Fin analyste, le secrétaire général du Hezbollah, sayyed Hassan Nasrallah, suivait de près l’évolution de la situation régionale et attendait son heure, convaincu que le bourbier qui s’annonce en Irak, pour les Américains, ne pouvait que favoriser une reprise en main, par son parti, de l’initiative au Sud. Il avait commencé par annoncer la couleur au cours d’un discours assez violent à Jibchit, il y a une quinzaine de jours, lorsqu’il a menacé les Israéliens de nouveaux enlèvements. Mais c’est surtout l’assassinat du résistant Ali Hussein Saleh, par l’explosion de sa voiture samedi 2 août en plein cœur de la banlieue sud, qui lui a fourni l’occasion tant attendue d’un retour en force au sein de l’équation régionale.
Ce jour-là, les accusations portées contre le Mossad d’être à l’origine de l’attentat dépassaient le traditionnel verbiage libanais, si prompt à accuser Israël, à tort ou à raison, avant même le déclenchement de l’enquête. Non, cette fois, le Hezbollah savait exactement de quoi il en retournait. Tout comme les Israéliens avaient assassiné, en 1994, Fouad, le frère de Imad Moughnié recherché par les services israéliens et américains, par l’explosion d’une voiture en plein cœur de la banlieue sud, et, il y a quelques mois, le résistant Ramzi Nohra à l’entrée de son village au Sud, ils s’étaient cette fois aussi chargés du sort de Ali Hussein Saleh.

Un attentat signé
et un message clair
Inconnu de la grande majorité des Libanais, Saleh était pourtant un grand résistant, chargé de la coordination entre les organisations palestiniennes et l’Iran. Il aurait même facilité l’envoi de fonds en provenance d’associations iraniennes à ces mêmes organisations. De plus, selon certaines sources, il aurait été à l’origine de l’enlèvement par le Hezbollah du colonel israélien à la retraite Hanan Tenenbaum. La presse israélienne l’accuse même d’avoir coordonné avec les organisations palestiniennes certains des attentats qui auraient secoué les territoires occupés, avant la récente trêve. Son assassinat s’inscrit donc dans la logique israélienne et le message a été parfaitement capté par le Hezbollah, qui, bien entendu, ne pouvait pas ne pas répondre.
Mais au lieu de réagir par les mêmes moyens que ceux utilisés par Israël, le Hezbollah a choisi de réactiver le front de Chebaa. Selon des proches de la formation, c’était l’occasion attendue pour revenir à l’équation qui prévalait avant la guerre en Irak. Et le Hezbollah aurait été encouragé, dans ses desseins, par la nouvelle donne régionale, où les Américains s’embourbent de plus en plus en Irak, contraints à affronter une résistance populaire qui, en dépit de ce qu’affirme Washington, n’est pas dirigée par l’ancien régime irakien.
Contrairement à ce qui avait donc été dit, la chute du régime de Saddam Hussein n’avait pas signé la fin des mouvements de résistance, ni en Irak, ni en Palestine, ni dans la région en général. Fort de cette constatation, le Hezbollah a donc réagi en menant une opération d’envergure dans le secteur des fermes de Chebaa, dimanche dernier. Et, pour bien montrer son retour en force sur la scène régionale, il a lancé des tirs de DCA sur les avions israéliens qui survolaient le Liban, lundi, faisant un tué et des blessés dans une colonie israélienne proche de la frontière.
Ne pouvant contester l’opération de Chebaa qui s’inscrit dans le cadre « toléré » par la communauté internationale, les Israéliens ont violemment protesté contre les tirs de DCA, essayant d’abord de prétendre qu’il s’agissait d’obus directs tirés en direction de la colonie. Mais selon des sources proches du Hezbollah, le rapport des Nations unies aurait démontré que la colonie en question se trouverait dans une vallée, invisible de la colline d’où seraient partis les tirs. De plus, il s’agirait bien de balles de DCA, et un survol d’avions israéliens aurait été enregistré au moment même où les tirs seraient partis. Cela n’a pas empêché la communauté internationale de condamner sévèrement le Hezbollah et de lui faire assumer la responsabilité du regain de tension à la frontière. Mais les sources proches de la formation sont convaincues que la condamnation n’ira pas plus loin. Pour elles, Israéliens et Américains ne peuvent pas pour l’instant assumer les conséquences d’une vaste explosion à la frontière nord d’Israël, surtout au moment où les Américains ont fort à faire pour imposer un régime crédible en Irak et où les Israéliens affrontent de nouveaux attentats-suicide dans les territoires qu’ils occupent. Le Hezbollah pense donc pouvoir imposer de nouveau l’équation suivante : à Chebaa, les moujahidine font de la résistance, et les survols israéliens essuieront des tirs de DCA. La formation pense, qu’à moins de mener une vaste opération au Liban, les Israéliens ne peuvent qu’accepter ce nouvel équilibre. Mais l’opération d’envergure ne semble pas envisageable pour l’instant. Le Hezbollah considère qu’il a bien choisi son moment politique pour revenir sur la scène. Quant aux attentats, il y répondra en temps voulu et, disent les sources proches de la formation, de la façon qu’il jugera adéquate. Peut-être en exécutant les menaces de Hassan Nasrallah d’enlever de nouveau des Israéliens…

Scarlett HADDAD
Après des mois de silence, voire de marginalisation, le Hezbollah est de nouveau à la une de l’actualité locale et régionale. La tension des derniers jours, dans le secteur des fermes de Chebaa et dans le nord d’Israël, a certes mobilisé la communauté internationale, qui, secrétaire général de l’Onu en tête, s’est empressée de condamner la formation libanaise. Mais...