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FESTIVALS - Inauguration en grande pompe dans les arènes romaines « Aïda » sur les rivages de Tyr(PHOTO)

C’est devant un aréopage de personnalités politiques et mondaines que s’est déroulé, en grande pompe et dans les arènes romaines, le coup d’envoi du septième Festival de Tyr avec une sublime et spectaculaire Aïda de Verdi. Mais aussi devant un public nombreux, agité, indiscipliné, turbulent, qui n’hésitait pas à transformer les allées en promenoir, à bavarder impunément entre deux répliques, à faire scratch-scratch avec les papiers de chocolat et de chips quand il n’abusait pas, et sans vergogne, du téléphone portable en plein recueillement d’une aria céleste, tout en tirant les chaises bruyamment... Attitude bien cavalière pour du bel canto.
Annoncée pour 21 heures précises, cette œuvre commandée par le khédive d’Égypte Ismaïl pacha pour célébrer l’ouverture du canal de Suez et qui triompha au Caire en décembre 1871 devait être sous les feux de la rampe aux alentours de dix heures avec une foule qui continuait à affluer, très cool, après l’hymne national, au rythme des premières mesures. Au pupitre, le maestro Marcello Rota dirigeant l’Orchestre philharmonique d’Italie accompagné du Chœur lyrique de Lombardie.
Sur une scène immense dressée en plein air, avec pour fond le velours des nuits du Sud, un peu en retrait des gradins de l’arène romaine et de l’obélisque central se dresse, sous le feu croisé des sunlights, un somptueux décor. Décor d’une pyramide pharaonique avec escaliers, colonnes, dessins hiéroglyphiques comme volés à un papyrus et une énigmatique tête de sphinx où vont se presser, dans une prestigieuse distribution, plus de trois cents figurants, comparses, chanteurs, danseurs et protagonistes. Et se dérouler au gré de la mélodie verdienne, généreuse et inspirée, ample et soyeuse, fluide et déchirante, les tragiques amours du capitaine Rhadamès, intrépide guerrier couvert de gloire, et de la vertueuse esclave éthiopienne Aïda. La force et les détours du destin mettent en prise ces deux amants et le haut clergé du temple d’Osiris, un pharaon, et sa fille Amnéris, éprise du même homme que Aïda.
Soumis tous aux impitoyables lois des intermittences du cœur et aux aveugles diktats des normes sociales, ils traversent dans la tourmente, les larmes et les surprises leur indéchiffrable parcours humain, sans pouvoir triompher des revers de la vie. Et encore moins conjurer le malheur. Rhadamès et Aïda périront ensemble, victimes de leur amour, emmurés vivants…
Patriotisme, liberté, passion dévorante, fidélité absolue, sens mystique en dépit du paganisme affiché de l’histoire, Aïda,vingt-cinquième opéra en quatre actes de Verdi, est sans nul doute une œuvre de la maturité, où perfection et sagesse sont des atouts majeurs. Malgré le décor exotique et un livret qui évite invraisemblances et anachronismes d’un conte inspiré de l’égyptologue français Auguste Mariette, Aïda garde un esprit profondément « européen » dans sa musique. Paysages évocateurs du Nil dans une touche allusive, chœur des prêtres et des prêtresses porté par un chant éthéré avec quelques accords éoliens sur la harpe, faste des pharaons dans la grande parade, les marches triomphales, les morsures de la passion, la transformation d’une victoire en défaite, les illusions sur les sentiments humains et l’indéfectibilité de l’amour, Verdi les fait vivre avec intensité dans cet opéra palpitant d’une magnificence de rêve.
Costumes splendides et chatoyants, aria et duels à couper le souffle et d’une beauté sonore qui ne s’est pas démentie, trame dramatique bouleversante, tableaux d’une grande richesse chorégraphique et visuelle, cette version de Aïda sur les rivages de Tyr est un enchantement. Aux dernières paroles d’Amnéris, qui livrent un message de paix à un amant et une amie à jamais perdus, Tyr la rebelle, Tyr l’inexpugnable, les yeux émerveillés et le cœur en émoi, a prêté une oreille attentive.

Fiche technique

Aïda, Katia Pellegrino ; Amnéris, Anna-Maria Chiuri ; Rhadamès, Renzo Zulian ; Amonasro, Massimiliano Fichera ; Ramfis, Danilo Rigosa ; le pharaon, David Baronchelli ; le messager, Giovanni Mani ; la prêtresse, Marta Vulpi ; le chef d’orchestre, Marcello Rota ; mise en scène, Mario Corradi ; costumes, Paolo Rovati ; maître de chœur, Corrado Casati ; éclairage, Andrea Borrelli.

Edgar DAVIDIAN
C’est devant un aréopage de personnalités politiques et mondaines que s’est déroulé, en grande pompe et dans les arènes romaines, le coup d’envoi du septième Festival de Tyr avec une sublime et spectaculaire Aïda de Verdi. Mais aussi devant un public nombreux, agité, indiscipliné, turbulent, qui n’hésitait pas à transformer les allées en promenoir, à bavarder...