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Communautés - Convivialité et liberté, deux conditions indissociables pour que le Liban continue d’exister L’Église maronite n’a jamais aspiré à être une Église nation, affirme le synode patriarcal(photo)

L’Église maronite n’a jamais aspiré à être une Église nation. Cette déclaration a volé la vedette aux autres vérités contenues dans le communiqué final du synode patriarcal maronite, dont la première session s’est achevée samedi par une messe solennelle à la maison d’accueil Notre-Dame du Mont.

Cette affirmation doit être comprise comme une réponse de l’Église maronite à ceux qui lui ont reproché, durant la guerre, d’avoir œuvré pour la partition du Liban, et comme une mise au point pour tous les maronites qui pourraient ne pas partager ce point de vue.
Le secrétaire du synode patriarcal, Mgr Youssef Béchara, a confirmé cet aspect des choses dans un point de presse tenu immédiatement avant la messe solennelle. Aux journalistes qui l’interrogeaient sur le rôle politique joué par l’Église maronite, l’évêque a répondu que « la pensée ecclésiale » maronite n’a « jamais » été dans la direction de la partitition ou de l’Église nation ; qu’à aucun moment il n’a été question pour l’Église maronite de se séparer des autres Libanais pour former une entité politique distincte.
Mais, si Mgr Béchara a tenu à préciser que cela n’a jamais été une « pensée ecclésiale », c’est peut-être implicitement pour distinguer cette pensée de celle d’autres groupes de la communauté maronite qui réfléchissaient en d’autres termes et qui se sont heurtés à l’Église sur cette question, durant les années de guerre (1975-1990).
Sur les orientations fondamentales de l’Église maronite au plan politique, voici le passage du communiqué final :
« La mission de l’Église maronite dans le domaine de la politique et de la société est enracinée essentiellement dans sa vérité spirituelle, comme on peut le déduire des constantes de son action à travers l’histoire. L’Église maronite n’a jamais envisagé d’être, sur le plan politique, une Église nation, et sa vocation n’a jamais été de s’emparer d’un territoire qui lui appartiendrait exclusivement. Par contre, sous l’inspiration divine, sa mission a toujours été de partager un même destin avec d’autres, dans le cadre d’une même entité politique. Mais cette orientation spirituelle ne signifie pas que ses fidèles ont renoncé à leurs droits légitimes de citoyens, ni qu’ils ne sont pas attachés à la terre ou respectueux de sa valeur sacrée. »
« En ce qui concerne la présence de l’Église au Liban, nous avons réaffirmé que le choix des maronites est celui de la coexistence, de la convivialité. Et nous avons réaffirmé que le Liban n’a pas de valeur ou d’existence, sans la liberté. La convivialité et la liberté sont les deux conditions indissociables pour que le Liban demeure fidèle à lui-même. C’est sur cette base que nos regards se sont portés vers la réalité libanaise actuelle. Le retour à la normale est lent et bloqué. La participation totale aux responsabilités tarde à se concrétiser. Un exercice pleinier de la liberté attend de se traduire dans une saine pratique démocratique. C’est pourquoi, l’invitation de l’Église à embrasser les valeurs de participation et de liberté pour restituer au Liban toutes les composantes de sa souveraineté, de son indépendance et de son autonomie de décision, s’adresse à tous et se fait au bénéfice de tous, afin que le Liban remplisse sa mission, qui est d’être “un message de liberté et un modèle de pluralisme pour l’Orient et l’Occident”, selon les termes du souverain pontife (Message du 8 septembre 1989, 6).
« (...) Ce qui vaut pour les services rendus par les maronites au Liban vaut aussi pour les services qu’ils ont rendus au monde arabe dans lequel ils vivent, auquel ils appartiennent et aux valeurs humaines dont il a été le dépôt au cours de l’histoire, et auxquelles ils sont associés. Dans cet environnement, l’Église maronite a été un apôtre de la modernité dans son sens positif. Elle a contribué à sa renaissance littéraire et intellectuelle et a été témoin, en son sein, des valeurs de la démocratie et des droits de l’être humain. Avec toutes les forces vives qui s’y trouvent, les maronites sont invités à se solidariser aujourd’hui, pour la justice, la liberté et le développement dont jouiraient les générations nouvelles, et pour des solutions justes aux causes de ses peuples et de ses États, et d’abord en Palestine. « Dans le reste du monde, il a échu aux maronites d’être des éléments de rencontre entre les religions et les civilisations. Leur contribution au succès de cette rencontre pourrait être particulièrement précieuse, car ils ont porté et portent dans leurs nouvelles patries l’expérience unique et collective de la convivialité et du dialogue de vie, qui en font des apôtres de la concorde entre les peuples. Car ils transmettent par leur culture la preuve irréfutable qu’un mal mortel se cache dans le choc des civilisations, et que seul le dialogue entre elles garantit un avenir prometteur pour l’humanité entière. »

Une Église « experte
en convivialité »
Par ailleurs, l’autre grande vérité examinée par le synode patriarcal est la mutation numérique de l’Église maronite dans les pays d’émigration. Le communiqué fait de cette mutation l’une des principales raisons d’être du synode patriarcal. Il affirme à ce sujet : « La situation des maronites répandus dans le monde a été examinée sous tous les aspects, pour la première fois peut-être avec autant de clarté. Une étape historique première où l’on pouvait parler des relations entre le Liban résident et le Liban émigré est désormais révolue. L’état d’émigré a cessé d’être un état provisoire pour ceux qui ont quitté leur pays dans l’espoir d’y rentrer rapidement. Il s’est transformé en une nouvelle présence pour eux dans de nouveaux pays, et à une nouvelle expérience humaine de vie ecclésiale et de la présence de l’Église maronite dans le monde. »
(...) « Une nouvelle phase de la vie de l’Église maronite répandue dans le monde a commencé, poursuit le communiqué. Nous sommes en présence d’une Église unie par le patrimoine, les relations, les saints, l’appartenance au Machrek, l’appartenance au Liban, sa patrie spirituelle et l’attachement au patriarche résidant à Bkerké, garant de son unité passée, présente et à venir. Elle est universelle par l’extension géographique, le rôle et la mission au service de la rencontre avec autrui quel qu’il soit, car sur les pas du Christ son maître et sur les chemins du monde, elle est devenue experte en convivialité auprès de tous les peuples. Tout comme l’Église du Christ est une, sainte, catholique et apostolique, selon une expression du pape Paul VI, “experte en humanité” dans le monde entier. Toutefois, à l’heure de la mondialisation, l’Église du Liban est la garante des évêchés maronites dans le monde, sans laquelle ils se transformeraient en autant de maronités distinctes. »
Le communiqué final fait par ailleurs la place aux autres sujets abordés au cours du synode patriarcal : renouveau des personnes et des structures, importance de la formation des prêtres, la famille, les jeunes, l’Église et la question sociale et le code des canons des Églises orientales.
Fady NOUN

Sfeir : Le Liban est aux maronites ce que Rome est aux catholiques

Sur les questions de l’identité et du rôle politique des maronites, le patriarche Sfeir est revenu dans l’homélie qu’il a prononcée au cours de la messe de clôture du synode patriarcal.
Alors que, pour un maronite du Liban, il y a une certaine confusion entre identité nationale et identité ecclésiale, pour les maronites des pays d’émigration, a-t-il dit en substance, cette confusion a cessé. « À la lumière de ce que nous disons, le Liban est devenu la patrie spirituelle des maronites, comme Jérusalem l’est pour les chrétiens, Rome pour les catholiques et Constantinople pour les byzantins », a affirmé le chef de l’Église maronite.
« En politique, a enchaîné le patriarche Sfeir, l’unanimité entre les maronites au Liban est impossible, combien plus si les patries se multiplient. Dans les démocraties, il existe des partis auxquels peuvent adhérer les citoyens, selon leurs penchants politiques. Mais chez nous au moins, il est impossible de mélanger le politique et le religieux. Il n’est pas permis que la religion, encore moins la confession, se transforme en parti, pour qu’elle ne soit pas exposée aux gains et pertes qu’encourrent généralement les partis. »
Le patriarche a conclu en affirmant qu’il existe encore bien des sujets sur lesquels le synode patriarcal ne s’est pas prononcé, qui seront abordés au cours de la seconde session.

Créer une « situation synodale »

Le synode patriarcal maronite, qui vient de se tenir au cours de la première et troisième semaine de juin, comprend encore deux grandes phases. Un temps intermédiaire de la plus haute importance, puisqu’il doit créer une « situation synodale » et permettre aux fidèles qui le souhaitent de participer à ses travaux, et une seconde session au cours de laquelle les documents examinés recevront leur forme finale et seront votés pour devenir documents officiels de l’Église maronite.
L’étape intermédiaire prévoit, d’ici à septembre, la réorganisation des commissions et la préparation de livrets destinés aux évêchés, paroisses, ligues sacerdotales et mouvements ecclésiaux, dans lesquels les problématiques de chaque document synodal sont exposées, accompagnées d’une série de questions destinées à stimuler la réflexion.
Entre septembre et janvier 2004, les documents synodaux seront réécrits en fonction des remarques retenues au cours de la première session. Ces textes seront communiqués aux membres du synode qui devront formuler leurs remarques à ce sujet avant le 15 mars.
Suit un temps de rédaction qui s’achève en juin, au terme duquel la commission centrale, en présence des experts et de délégués de chaque évêché, parachèvera la rédaction des documents synodaux, qui seront envoyés aux membres. Ces derniers auront un délai pour adresser au secrétariat leurs remarques fondamentales.
Enfin, une deuxième session du synode se tiendra au Liban du 17 au 27 octobre 2004.
Un site électronique est à la disposition des intéressés pour de plus amples informations à l’adresse : www.maronitesynod.org
L’Église maronite n’a jamais aspiré à être une Église nation. Cette déclaration a volé la vedette aux autres vérités contenues dans le communiqué final du synode patriarcal maronite, dont la première session s’est achevée samedi par une messe solennelle à la maison d’accueil Notre-Dame du Mont.Cette affirmation doit être comprise comme une réponse de l’Église...