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Les avocats dénoncent les modalités d’application du code de procédure pénale Les méthodes de la police judiciaire mises en cause (photo)

La polémique suscitée autour de l’élaboration du code de procédure pénale, il y a un peu plus d’un an, est encore vivace dans les mémoires. Considéré à l’époque comme l’un des textes les plus avant-gardistes – notamment après l’adoption de modifications majeures par le Parlement –, le nouveau code s’est avéré, à l’application, défectueux à plus d’un égard. C’est pour dénoncer les lacunes au niveau du texte et de son application que l’Institut des droits de l’homme à l’Ordre des avocats de Beyrouth s’est mobilisé hier dans le cadre d’une conférence-débat sur ce thème. En présence de deux députés juristes, Ghassan Mohkheiber et Georges Nejm, à qui l’on a confié la tâche de transmettre à l’Assemblée nationale les remarques faites à ce sujet, les avocats ont établi un bilan plutôt négatif sur un texte censé avoir marqué une nette avancée sur le plan des droits de l’homme. « L’objectif de ce débat est de relever non pas les failles techniques à proprement parler mais plutôt celles qui ont trait au respect des droits de l’homme », a affirmé le directeur de l’Institut des droits de l’homme, Georges Assaf. « C’est une loi faite à la mesure du procureur général », dénonce un des avocats dans la salle qui relève que le texte n’est pas clair pour ce qui est des modalités de l’enquête préliminaire et des prérogatives du parquet et de la police judiciaire. Concrètement, ce sont les articles 47 et 49 qui sont mis en cause, car « imprécis », affirment les juristes, notamment pour ce qui est de la présence de l’avocat de défense auprès de son client lors de la déposition. « Dans la pratique, le procureur général donne mandat à la police judiciaire pour effectuer l’interrogatoire alors qu’elle n’est pas habilitée à le faire », explique Me Assaf. La police judiciaire est censée «assister » le procureur général, en recueillant les informations et les dépositions nécessaires. Or, relève Me Assaf, elle finit par se substituer à lui, transformant ainsi « l’écoute » en « interrogatoire ». Ce problème de compétences se trouve ainsi aggravé par le fait que la police judiciaire ne tolère pas, dans la pratique, la présence de l’avocat auprès de son client, ce qui laisse le champ libre à toutes sortes d’exactions. « La présence de l’avocat est indispensable à tous les stades de l’enquête », souligne Élias Abou Eid en dénonçant les « prérogatives excessives » que s’est octroyées la police judiciaire en la matière. Problème de compétence mais aussi de terminologie, ajoute Me Eid qui relève par ailleurs la confusion qui existe entre « l’inculpé virtuel » et la « personne entendue », « ce qui fausse toute la règle de jeu et conduit à transformer un simple témoin en inculpé », dit-il. Prenant la parole au nom des rares avocates qui se trouvaient dans la salle, Saïdé Habib raconte comment, en tant que femme, elle subit, lors de l’exercice de son métier, des pressions et des intimidations de tous genres, notamment par la police judiciaire qui « ne rate pas une occasion pour lui manquer du respect ». Dénonçant les procédures appliquées au tribunal militaire, Me Habib explique comment le juge d’instruction militaire l’avait un jour « empêché de s’exprimer » alors qu’elle était censée « défendre son client ». « D’ailleurs, dit-elle, notre présence au tribunal militaire est, dans la plupart des cas, inutile ; la décision du juge étant prise à l’avance et sur mesure. » Me Mokheiber se demande pour sa part pourquoi les avocats n’ont jamais pris la peine de soulever les questions de procédure devant la justice au lieu de se contenter de critiques dans des cercles fermés. Il suggère qu’une commission soit mise sur pied pour recueillir dorénavant « toutes les plaintes concernant l’application de ces procédures ». Abondant dans le même sens, Me Nejm a précisé qu’il n’y a eu jusqu’à aujourd’hui aucune « campagne en vue de nullifier les enquêtes entachées d’irrégularités ». Me Ramzi Jreige propose quant à lui de former un comité spécialisé, chargé d’étudier les modifications à apporter au texte. Autant de solutions que l’Institut des droits de l’homme devra prendre en considération afin d’établir un document de travail qui sera présenté, dans un premier temps, à l’Ordre des avocats, puis au Parlement. La balle est donc dans le camp des avocats dont on attend désormais des actions plus concrètes. Moderniser « oui » mais après consultation du barreau Suite à l’article paru dans L’Orient-Le Jour, le mercredi 29 janvier, intitulé : « Un texte rétrograde à plus d’un égard », sur le projet de réforme du code pénal, – projet critiqué par Hurryat Khassa – M. Albert Sara nous a adressé la communication suivante : « Je voudrais rendre hommage au rédacteur de notre présent code (de 1943), le grand jurisconsulte, le regretté Fouad Ammoun. En 1943, j’avais l’honneur de le rencontrer assez souvent. Le chef de l’État Ayoub Tabet, un autre grand Libanais, lui avait fait toute confiance en le chargeant de rédiger un code pénal devant succéder au code ottoman désuet. Le président Ammoun s’est adonné à ce travail durant de longs mois, consultant des traités et des codes parmi les plus modernes et des recueils de la jurisprudence la plus évoluée. Le résultat fut un code pénal des mieux rédigés de son époque, en 1943, et nous en étions fiers. « Aujourd’hui, le désir de modernisation des lois est, certes, louable, mais il faut se méfier de l’intention de certains rédacteurs. Il est frappant de voir comment le zèle de nos « modernisateurs » s’est porté surtout sur les matières où la justice – à l’instar de celle qui s’est manifestée dans l’affaire de la MTV – peut s’en prendre aux libertés publiques et se faire le défenseur de la « pensée unique ». « Quant on voit les dizaines de lois et règlements qui restent en souffrance, malgré leur urgence, faute de trouver chez nos responsables le temps nécessaire d’être traités, on se demande pour quelles raisons les « modernisateurs » ont manifesté tant de zèle et de célérité, sans prendre la peine de consulter, au cours de leurs travaux, les spécialistes et corps constitués comme le barreau. Nous devons enfin nous féliciter d’avoir une institution comme Hurryat Khassa pour mettre en garde contre les entorses à nos libertés. » Je. J.
La polémique suscitée autour de l’élaboration du code de procédure pénale, il y a un peu plus d’un an, est encore vivace dans les mémoires. Considéré à l’époque comme l’un des textes les plus avant-gardistes – notamment après l’adoption de modifications majeures par le Parlement –, le nouveau code s’est avéré, à l’application, défectueux à plus d’un...