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Actualités - CONFERENCES ET SEMINAIRES

Privatisations - Le Liban sera-t-il le dernier à entrer dans l'ère de la modernité ? Naaman promet la libéralisation des télécoms d'ici à 2002

Le ministre des Télécommunications Issam Naaman a inauguré hier un séminaire sur la privatisation de ce secteur en promettant qu’elle se ferait d’ici à janvier 2002. «D’ici là, un opérateur national bénéficiera du droit exclusif de gérer le téléphone fixe, local et international, du télex et du télégraphe». Le domaine des télécommunications sera le premier à être privatisé (...) par le biais d’un projet de loi qui doit remplacer celle datant de 1959, a-t-il ajouté. Un comité régulateur indépendant, doté de pouvoirs renforcés, sera mis en place pour réorganiser le secteur en octroyant des licences par adjudication. L’engagement avait un goût de déjà vu, mais il ne manquera pas de susciter, une fois de plus, un certain espoir de voir enfin le Liban prendre le bon chemin. Un sujet aussi sensible que la question des privatisations résume en fait, à lui seul, le nœud de la problématique libanaise. D’un côté, réunis à l’hôtel Méridien-Commodore par le LCPS (Lebanese Center for Policy Studies), un parterre d’experts, d’économistes, de conseillers de ministres... discutent le détail, échangent des opinions, mais sont au fond d’accord : il faut privatiser le secteur des télécommunications et libéraliser le marché pour que le Liban ne soit pas le dernier pays à entrer dans l’ère de la modernité, après l’Arabie séoudite ou la Mauritanie par exemple. De l’autre, la décision politique qui se fait attendre éternellement. Dans la situation actuelle, tout ce qu’il est possible de faire est de préparer les lois, concède l’un des intervenants, Kamal Chéhadé, ancien conseiller au ministère de l’Économie. «Le problème n’est ni technique ni juridique ou autre, il est politique. Il faut des responsables qui défendent leurs décisions jusqu’au bout et ne laissent pas leurs lois se faire enterrer ici ou là», tonne l’économiste Charbel Nahas. Car, les problèmes de la compagnie nationale du téléphone, qui emploie par exemple 4 700 personnes pour 700 000 lignes, soit 6,7 pour mille lignes, contre trois pour mille en moyenne dans d’autres pays, sont connus depuis longtemps. «Le constat est aujourd’hui le même qu’en 1996, lorsque j’ai réalisé une première étude sur les télécommunications au Liban», explique M. Chéhadé. Les portes de sortie sont identiques, mais avec le passage du temps, elles deviennent de plus en plus étroites, renchérit l’économiste Marwan Scandar. «Qu’a-t-on gagné à avoir retardé la privatisation de la Middle East ? 400 millions de dollars de pertes en quatre ans», lance-t-il. Le coût du temps est élevé à tous les niveaux. Il est particulièrement important pour le Trésor, souligne Marwan Barakat de la Banque Audi. «Car la structure du budget de l’État est telle qu’aucune mesure d’austérité, aussi stricte soit-elle, ne permettra de résorber la dette publique qui est de 136 % du PIB». Pour cet économiste, la privatisation est le seul moyen de rompre le cercle vicieux des déficits accumulés dont les conséquences sur l’économie sont catastrophiques. Si on considère, comme plusieurs intervenants, que le remboursement de la dette ne doit pas guider le processus de privatisation – c’est un avantage, pas un but en soi –, le coût économique du retard est peut-être aussi grand que le coût financier. Car la situation actuelle se résume en quelques mots, selon Kamal Chéhadé : monopole, investissements réduits, rentabilité faible, peu de réactivité à la demande, retard technologique, etc. Même en matière sociale, Joey Ghaleb, chercheur au LCPS, a montré que les conséquences sur les salaires, la formation... de la privatisation étaient positives, à la lumière des expériences menées dans le monde. Bilan mitigé Privatiser donc, mais pas à n’importe quelle condition. L’expérience «amère» du cellulaire est là pour le prouver. Quel que soit le parti que l’on choisit dans le dossier du cellulaire, celui du gouvernement ou celui des deux opérateurs, Cellis et LibanCell, force est de déplorer la façon dont il a été et continue d’être traité. Interventions politiques dont on cherche encore à comprendre les motivations exactes, selon le journaliste Jihad Zein. Retombées négatives certaines sur les investissements futurs, dit Charbel Nahas, dénonçant la légèreté avec laquelle sont maniés les chiffres au Liban. Au plan strictement financier, les revenus tirés par l’État sont appréciables, mais le bilan économique de cette expérience n’est pas bon, explique-t-il. On a assisté à une diversion des consommateurs vers le téléphone mobile, malgré les lourds investissements déjà engagés dans le réseau fixe. «Les investissements réalisés par les opérateurs du cellulaire sont certes importants, en deux ou trois ans ils représentent 2 % du PIB, mais on est arrivé à la situation paradoxale où le nombre d’abonnés au téléphone fixe, par rapport à la population totale, est inférieur à la moyenne internationale, alors que c’est l’inverse pour le réseau du cellulaire». Par ailleurs, la facture des équipements et des appareils téléphoniques importés s’est élevée à 400 millions de dollars, ce qui a contribué au déficit de la balance commerciale, alors que de telles importations avaient déjà été effectuées majoritairement pour le réseau fixe. La critique souligne simplement une absence totale de vision stratégique globale. L’expérience révèle aussi des lacunes criantes : concurrence, autorité de régulation, libéralisation du marché... autant de concepts qui ont jusque-là manqué à l’aventure du cellulaire au Liban et qui sont absolument nécessaires pour réussir la privatisation.
Le ministre des Télécommunications Issam Naaman a inauguré hier un séminaire sur la privatisation de ce secteur en promettant qu’elle se ferait d’ici à janvier 2002. «D’ici là, un opérateur national bénéficiera du droit exclusif de gérer le téléphone fixe, local et international, du télex et du télégraphe». Le domaine des télécommunications sera le premier à être...