Rechercher
Rechercher

Actualités - OPINION

Vie politique - Spéculations fébriles sur la portée de la décision syrienne Changement dans la continuité, du côté des officiers traitants

Titulaire d’un doctorat, le colonel Rustom Ghazalé a pris samedi en charge ses fonctions de chef des services de renseignements syriens au Liban. Un label synonyme d’officier traitant, sur place même, du dossier libanais, notamment dans son volet politique. Le colonel remplace, comme on sait, le général Ghazi Kanaan. Qui, au bout de vingt ans à ce poste de haute confiance, a été promu chef du département de la sûreté politique syrienne. Cette instance, qui est l’un des quatre piliers de la sécurité syrienne entendue à son sens large, s’occupe d’affaires sensibles. Comme les relations avec la Turquie. La sûreté politique (dont Kanaan était du reste l’un des consultants), avait réussi à désamorcer il y a quatre ans la crise articulée autour des reproches d’Ankara sur un présumé soutien syrien à Öçalan, le rebelle kurde, et à son PKK. Aujourd’hui, au Liban, un question fleurit sur toutes les lèvres : faut-il voir, dans l’initiative syrienne, un changement de ligne, ou une simple mesure de double promotion personnelle méritée ? Des sources informées répondent en privilégiant la deuxième hypothèse. D’autant, font-elles valoir, que la Syrie est depuis quelque temps déjà le théâtre d’un vaste mouvement de nominations ou de permutations, notamment au niveau des postes-clés. Ce qui s’explique largement par le fait que l’ancienne garde, qui a servi pratiquement depuis l’avènement du Baas dans les années soixante, ou au moins depuis l’arrivée au pouvoir de Hafez el-Assad au début des années soixante-dix, aspire à faire valoir ses droits à la retraite. Parallèlement, il faut bien activer le tableau d’avancement et récompenser par une promotion les cadres qui, comme Kanaan, ont loyalement servi à un même poste pendant vingt ans ou plus. Mais ces mêmes sources avouent, implicitement, qu’à Damas, on avait à l’origine sa petite idée derrière la tête. C’est-à-dire qu’au départ on avait songé, et on l’aurait même nommée sur une ordonnance, à une personnalité militaire de haut rang, venant de la capitale syrienne, sans liens antérieurs avec le dossier libanais. Les événements s’étant précipités dans la région comme localement, on se serait ravisé, pour garder ce dossier en mains sûres, dûment expérimentées. Le choix ne pouvait donc tomber que sur le colonel Ghazalé, qui était jusqu’alors le premier assistant, en tant que chef du team d’observateurs syriens, du général Kanaan. Il reste que, selon des professionnels du cru, le plus intéressant dans cet épisode c’est peut-être son timing. Ces sources veulent y voir en effet un signe en rapport avec l’évolution du climat intérieur. Considéré bien évidemment sous l’angle crucial d’une situation régionalo-mondiale, marquée par les menaces de frappe US en Irak, par la recrudescence de l’activisme islamiste dit terroriste dans le Golfe ou à Bali, et par les développements de la guerre israélo-palestinienne. Mais ces mêmes politiciens se hâtent de rappeler que cela fait plusieurs mois qu’on évoque le départ du général Kanaan. On s’en était même lassé. Au point qu’un ministre, interrogé il y a à peine deux semaines à ce propos par un député, lui avait soufflé : « Ce sont des bruits anciens, que l’opposition fait courir, pour continuer à se bercer de rêves et d’illusions. J’ai la certitude que le général Kanaan reste jusqu’à la fin de l’année, et peut-être même jusqu’à la fin du mandat du président Lahoud. » Cet extralucide n’a pas eu la chance des astrologues de fin décembre, qui ont un peu de temps devant eux avant que les faits ne les démentent après les fêtes. Presque au moment où il rendait son brillant verdict, l’on apprenait le changement à la tête des SR syriens au Liban. Un remplacement opéré dans une parfaite discrétion technique : pas plus que les autorités locales, le malheureux ministre cité, qui se pousse volontiers du col dans les salons en raison des ses excellentes relations syriennes, n’en avait été prévenu. Cependant, ce ministre semble avoir raison sur un point précis : l’opposition ne peut pas trop rêver. En effet, quand un premier adjoint succède à un titulaire, il y a fort à parier que la même ligne continuera à être suivie. De plus, un politicien du cru affirme à qui veut l’entendre que le général Kanaan lui a confié qu’à Damas il continuera à s’intéresser au dossier libanais, auquel d’ailleurs son nouveau poste ne peut pas être totalement étranger. Selon ce politicien, ce serait d’ailleurs là le vœu du président Bachar el-Assad. Et d’ajouter que la Syrie continue à estimer que c’est l’Est qui lui porte de l’hostilité et non l’inverse. Donc qu’elle n’est pas disposée à modifier ses positions, ou ses options de base au Liban. Du moins pour le moment, dans la phase d’attentisme qui précède une éventuelle frappe US en Irak. Cela étant, le même professionnel pense que la Syrie, trop occupée ailleurs, va moins se soucier des détails de la scène libanaise, et va réduire ses quotas d’arbitrage dans les conflits intérieurs. D’où sans doute une mise en relief accentuée du rôle d’orientation générale qui semble de nouveau dévolu au vice-président syrien, M. Abdel Halim Khaddam. Cependant, certains loyalistes du Rassemblement parlementaire de concertation estiment que les tensions vont s’apaiser. À leur avis, la Syrie a voulu faire un geste symbolique de changement vers l’ouverture et le dialogue avec tous, à la veille du Sommet de la francophonie que le Liban accueille. Philippe ABI-AKL
Titulaire d’un doctorat, le colonel Rustom Ghazalé a pris samedi en charge ses fonctions de chef des services de renseignements syriens au Liban. Un label synonyme d’officier traitant, sur place même, du dossier libanais, notamment dans son volet politique. Le colonel remplace, comme on sait, le général Ghazi Kanaan. Qui, au bout de vingt ans à ce poste de haute confiance, a...