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Actualités - REPORTAGES

Autour de Peshawar, les commerces d’armes et de drogue ont pignon sur rue - Les zones tribales, royaume des trafics illicites en tout genre

Haschisch, opium, héroïne, kalachnikov ou mitraillettes de toutes sortes. On trouve de tout dans les bazars des zones tribales aux portes de Peshawar. Échappant au contrôle direct des autorités pakistanaises, ces zones qui rassemblent essentiellement des Pakistanais et des Afghans d’origine pachtoune sont la caverne d’Ali Baba des amateurs de trafics illicites en tout genre. Sept «agences», ou zones tribales, sont disséminées aux alentours de Peshawar dans la North West Frontier Province (NWFP). Si elles relèvent de l’autorité d’un agent politique pakistanais, elles sont effectivement dirigées par des chefs tribaux. Dans les faits, ces zones s’apparentent à un État dans l’État, régis par les règles tribales, où la loi pakistanaise n’est qu’un vague mirage. Ainsi, nombre de talibans et criminels y trouvent refuge. Le kidnapping y étant également un commerce florissant, les étrangers et même les Pakistanais sont interdits d’entrée. Un journaliste en visite est d’ailleurs accompagné d’un garde pakistanais armé de sa kalachnikov. Mais après avoir passé le barrage d’entrée de ces zones, on se demande bien quelle différence pourrait faire une kalachnikov dans ces régions où chaque homme se promène armé. L’agence de Khyber ne fait pas exception. Comme les six autres zones tribales, elle est marquée par une culture de la violence et des armes. Dans le bazar, dominant en nombre les échoppes de fruits et de légumes, les magasins d’armes et de drogue ont pignon sur rue. Dans les vitrines, des mitraillettes, des armes de poing, des balances pour peser la drogue et, scotchés aux vitres, à côté d’une photo de Ben Laden, des rubans de haschisch artistiquement présentés. Ici, les prix défient toute concurrence. Le haschisch, provenant des cultures de cannabis de Jalalabad, est vendu entre 2 000 et 3 000 rp le kilogramme (30 à 50 dollars/kg), et les plaques ne manquent pas. Pas intéressé par cette drogue ? Pas de problème, l’opium est aussi disponible, mais il est un peu plus cher, 24 000 rp/kg (aux alentours de 380 dollars par kg). On peut tout toucher, sentir, comparer car la quantité est là. Dernière option, l’héroïne, toujours en provenance de l’Afghanistan. Mais, celle-ci reste un peu plus cachée. À Khyber, on peut aussi trouver toutes sortes d’armes. Elles représentent d’ailleurs le fonds de commerce de Chaeen qui a repris l’échoppe de son père, qui la tenait lui-même de son père. Affaire de famille… Exposées en vitrines des modèles de mitraillettes allemandes datant de la Seconde Guerre mondiale, des copies de fusils à répétition Beretta et même un pistolet stylo. «Les originaux Beretta coûtent 80 000 rp (1 300 $). Je te vends cette copie de fusil à répétition à 8 000 rp», affirme Chaeen. L’atelier de confection est à l’arrière. En ce moment, seulement trois ouvriers travaillent pour lui. Mais, quand les affaires sont bonnes, ils sont huit à polir, ajuster et monter des armes en tout genre. Si Khyber rassemble de nombreux marchands d’armes, le haut lieu de ce commerce est indiscutablement Dara Adam Khel, à une quarantaine de kilomètres de Peshawar. Ce secteur n’est pas à proprement parler une zone tribale, mais une région frontalière. Son accès n’en est pas pour autant facilité, les autorités pakistanaises ne délivrant pas d’autorisation d’entrée aux étrangers. Selon un journaliste local, 80 pour cent de la population de Dara Adam Khel sont impliquées d’une manière ou d’une autre dans le commerce des armes. Le chef de cette zone, Hajji Gul, sénateur suspendu de son poste après la prise de pouvoir par Pervez Musharraf, est lui-même un grand fabricant d’arme. Aujourd’hui, après avoir accumulé une fortune conséquente, il se serait retiré de ce commerce illégal pour ouvrir des magasins et des hôtels à Peshawar. Mais à Dara Adam Khel, le commerce continue et l’on entend régulièrement des détonations. Petite vérification des acheteurs quant à la qualité de l’arme avant de conclure toute transaction. Un peu éloigné du cœur du bazar, un petit magasin vend de tout. Dans la première salle, les étagères sont couvertes de paquets de 1 kg de haschisch et les tiroirs pleins de petites sacs d’opium… À l’arrière, dans une pièce plus vaste, l’atelier de confection des armes. Sur une petite table, une douzaine d’armatures de pistolets sont superposées. Ici on fabrique les éléments de base qui seront assemblés dans un autre magasin. Mais en ce moment, les affaires ne sont pas bonnes et les prix ont chuté. «Depuis que Pervez Musharraf a lancé sa campagne pour le contrôle des armes, les affaires n’ont cessé de se détériorer», explique un petit commerçant. Les principaux acheteurs de ces armes sont, selon ses commerçants, des Pakistanais, chefs de clans, de tribus ou de villages. Mais depuis que les autorités ne délivrent plus de permis de port d’armes et après une opération de collecte d’armes fondée sur le volontariat, et dont les résultats ont été très moyens, le nombre d’acheteurs a diminué. Cette situation pourrait poser problème à terme car le commerce des armes est la principale source de revenus de ces populations tribales. Selon un journaliste local, un général de l’armée pakistanaise se serait rendu il y a quelques mois à Dara Adam Khel afin de recruter quelques travailleurs pour les usines d’armes de Peshawar. Un moyen de réintégrer ses ouvriers dans la légalité. Mais ces mesures sont encore aujourd’hui insuffisantes pour réorienter le commerce de ces zones.
Haschisch, opium, héroïne, kalachnikov ou mitraillettes de toutes sortes. On trouve de tout dans les bazars des zones tribales aux portes de Peshawar. Échappant au contrôle direct des autorités pakistanaises, ces zones qui rassemblent essentiellement des Pakistanais et des Afghans d’origine pachtoune sont la caverne d’Ali Baba des amateurs de trafics illicites en tout genre. Sept...