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Actualités - CHRONOLOGIES

Débat parlementaire - Berry dénonce l’omnipotence des SR libanais au cours de la première séance du budget - Aiguillonné par Moustapha Saad, Ali Kanso donne - un coup de pied à la solidarité gouvernementale

Cela n’a pas été une surprise, mais bien un suspense. C’est-à-dire que tout le monde savait que la première journée du débat budgétaire serait placée sous le signe des tiraillements plus ou moins exacerbés au sein du pouvoir. Tout le monde savait qu’il allait se passer quelque chose : la dénonciation unilatérale, la veille, de la réunion de Faqra par Nabih Berry était, en soi, un signal. Sauf que personne ne pouvait prévoir ni quand ni comment allaient se concrétiser, place de l’Étoile, ces espèces de petits coups de couteau, tirés inter ou hors troïka. Du suspense donc, d’autant plus que le débat budgétaire est, indubitablement, chaque année, le débat-star de l’hémicycle. Les espérances des uns, les appréhensions des autres, les prévisions de tous ont été plus qu’exaucées. Suivant apparemment un scénario bien huilé, le député de Saïda Moustapha Saad, dont c’est le come-back au Parlement, interpelle par trois fois, et dès l’ouverture de la séance, le ministre du Travail, le sommant de s’expliquer sur la révision du système de retraites – et de la privatisation de la Sécurité sociale – telles qu’exposées dans le préambule du budget. Et lorsque Ali Kanso s’est levé pour asséner que non seulement ce préambule n’avait pas été discuté en Conseil des ministres, mais que lui-même s’opposait clairement et sans ambages à ce point bien précis qui dépend de son ministère, le silence dans les travées des députés était assourdissant. On se serait cru en plein Conseil des ministres. C’est-à-dire là où il est tout à fait naturel, voire commun, qu’un des membres du gouvernement exprime, devant ses collègues, le Premier ministre et le chef de l’État, un désaccord quelconque. Le problème, hier, c’est que cela s’est fait en plein hémicycle. Et devant toutes les télévisions. Premières historiques… Que les interventions de Moustapha Saad puis celle d’Ali Kanso aient été ou non encouragées par Baabda ou par Aïn el-Tiné, le résultat est le même : c’est la première fois que la solidarité, que la cohésion du cabinet Hariri sont à ce point malmenées – du moins publiquement. C’est aussi la première fois dans l’histoire, du moins contemporaine, du Parlement que le linge sale de l’Exécutif se lave d’une façon aussi évidente. C’est aussi la première fois que ce naturel, que Rafic Hariri s’est employé à chasser depuis son retour au pouvoir, semble revenir sur le devant de la scène politique : son côté one-man show – celui-là même qu’a dénoncé, implicitement, Ali Kanso. Rafic Hariri, visiblement furieux et décontenancé par l’intervention de son ministre du Travail, a fait ce que ce dernier s’est employé à faire : inviter le Parlement à être à la fois juge et partie. Le Premier ministre a informé le Législatif, réuni presque au grand complet, que s’il souhaitait modifier «la coutume», «une coutume qui dure depuis 50 ans», a rappelé Fouad Siniora, il n’y voyait «aucun inconvénient». Quelle coutume ? Celle qui veut que le préambule soit directement transmis par le ministère des Finances aux députés – sans avoir été, au préalable, approuvé par le Conseil des ministres. Il n’empêche – toujours au sujet de cette solidarité gouvernementale qui a pris, hier, un sacré coup – un des Trente du cabinet Hariri, croisé dans les couloirs du Parlement par L’Orient-Le Jour, a déclaré que «si les choses vont continuer dans ce sens, je ne vais pas hésiter à déclarer publiquement que le gouvernement, depuis sept mois, ne fait absolument rien». Quant à l’autre coup de tonnerre – le principal, d’ailleurs – qui a retenti, hier, place de l’Étoile, il est à imputer au n° 2 de l’État Nabih Berry, qui n’a pas hésité, lors de l’intervention du député Mikhaël Daher, à dénoncer l’omnipotence des services de renseignements «libanais». Il semblerait que cette flèche de Parthe, lancée avec le sourire par le président de la Chambre, s’inscrive dans la lignée de la polémique qui oppose depuis vendredi dernier – c’est-à-dire depuis les discours de l’Unesco lors de la cérémonie du premier anniversaire du retrait israélien – Baabda à Aïn el-Tiné. Dans la suite également du discours du député berriste Ali Khreiss, qui a récemment affirmé que «les services étaient en train de mener une campagne contre le président Berry». Quoi qu’il en soit, la phrase assassine du chef du Législatif comme sa dénonciation de la rencontre de Faqra semblent être toutes les deux un message, ferme, adressé par le Législatif à l’Exécutif bipolaire. «En commençant par le président Lahoud», précise une source parlementaire. Enfin, L’Orient-Le Jour a appris qu’un député membre du bloc haririen avait préparé un discours particulièrement violent à l’encontre des chefs de l’État et du Législatif, mais qu’il allait renoncer à le dire, après que le Premier ministre lui eut demandé de le retirer. L’argumentation-choc de Nassib Lahoud Mais que les choses soient claires : ces échauffourées n’ont pas empêché 16 parlementaires d’intervenir au sujet de la proposition de budget pour l’année 2001, avec comme toile de fond un débat constitutionnel sur la coutume mentionnée plus haut. Un débat lancé, comme à l’accoutumée, par l’un des ténors de la Chambre, Hussein Husseini. Première chose : l’impressionnant hiatus entre la relative tiédeur du rapport de la commission des Finances et du Budget à l’égard de la proposition gouvernementale, et l’insistance de la quasi-totalité des intervenants à dénoncer les orientations économiques suivies par l’équipe Hariri depuis son arrivée au pouvoir, et à regretter que «depuis sept mois, rien n’a vraiment évolué». Et concernant le rapport du ministère des Finances, la remarque qui a fait mouche a été celle du député Boutros Harb, qui a estimé que ce qui a été lu par Fouad Siniora «ne ressemblait en rien au préambule du budget». Il n’empêche, force est de constater que l’intervention la plus inattaquable et la plus complète a été celle du ténor parlementaire Nassib Lahoud, et que les discours les plus virulents à l’encontre du cabinet Hariri ont été ceux de Nicolas Fattouche et d’Ibrahim Bayan. Le point fort du laïus du député hezbollahi – qui a oublié pour une fois, ou presque, ses revendications liées au secteur pédagogique – a été une attaque en règle du «mauvais timing», la désormais fameuse manchette du quotidien haririen al-Mostaqbal. Concernant le volet politique des différentes interventions, il est à noter que les relations libano-syriennes ont été abordées par cinq députés, dont trois qui ont réitéré la nécessité de leur correction. Le cas de l’Université libanaise a été évoqué par le député Georges Dib Nehmé, qui s’est élevé contre le projet de fusion des sections de l’institution. Quant à l’envoi de l’armée au Sud, aucun député n’a soulevé ce sujet, à l’exception de Nassib Lahoud, qui l’a rappelé indirectement, en insistant sur la nécessité de voir le Liban «garder d’excellentes relations avec l’Onu». D’en respecter donc les résolutions. Un mot enfin sur Walid Joumblatt et Albert Moukheiber. L’absence de ces deux ténors a été particulièrement remarquée. Quant aux deux journées d’aujourd’hui et de demain, elles devraient être ponctuées par des interventions assez attendues. Celles, éventuellement, de Hussein Husseini, Omar Karamé, Nayla Moawad, Boutros Harb, Salah Honein, Akram Chehayeb, Pierre Gemayel, etc.
Cela n’a pas été une surprise, mais bien un suspense. C’est-à-dire que tout le monde savait que la première journée du débat budgétaire serait placée sous le signe des tiraillements plus ou moins exacerbés au sein du pouvoir. Tout le monde savait qu’il allait se passer quelque chose : la dénonciation unilatérale, la veille, de la réunion de Faqra par Nabih Berry...