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Actualités - OPINION

Gouvernement An 1 Que reste-t-il de l'euphorie des premiers moments ?

Le gouvernement vient tout juste de terminer sa première année. Il ne reste plus de l’euphorie des premiers moments qu’un sentiment diffus de désespoir. Pourquoi ? Il est évident que les promesse faites n’ont pas été tenues : la crise économique, héritée, il est vrai, de la période précédente, s’est aggravée, la reforme administrative n’a pas eu lieu, la justice est de plus en plus sélective dans son fonctionnement, les atteintes aux libertés débordent le cadre strictement politique... Cette liste de promesses non tenues, qui est loin d’être exhaustive, aurait dû susciter la déception, voire le mécontentement des Libanais, par leur désespoir. Quelles sont les raisons de ce désespoir ? La première de ces raisons est le sentiment d’un énorme gaspillage – fait par le gouvernement – des potentialités réformistes qui s’étaient constituées au cours des dernières années. Le soutien politique et populaire dont ont bénéficié les présidents Lahoud et Hoss n’a pas été un événement fortuit ou le résultat des efforts de propagande d’un quelconque service de renseignements, mais le fruit d’une campagne menée pendant des années par des forces réformistes – aussi bien à l’intérieur qu’à l’extérieur du Parlement – opposées à la politique menée par le précédent régime. Au Parlement, le groupe des «six» (Hoss, Husseini, Karamé, Lahoud, Harb et Beydoun) plus un certain nombres de députés indépendants dont Nayla Moawad, Najah Wakim, Camille Ziadé et d’autres ont rendu la vie dure aux précédents gouvernements. À l’extérieur, une multitude de mouvements a mené campagne pour la défense des libertés, l’organisation des élections municipales, la protection de l’environnement, l’épuration de l’administration, les revendications ouvrières... Que reste-t-il, un an après, de toutes ces potentialités ? La seule «réalisation» évidente du gouvernement est d’avoir réussi, en un temps record, à marginaliser complètement ces forces qui auraient dû constituer sa base politique. En parallèle à cet énorme gâchis politique, l’autre facteur qui permet d’expliquer le désespoir des Libanais est cette atteinte systématique à leur intelligence que comporte le discours de la classe politique. Il leur est, en effet, demandé d’accepter, dans un même temps, la chose et son contraire : – Un gouvernement «propre», mais dont les deux principaux piliers politiques ont participé à tous les gouvernements précédents à la tête de ministère importants. – Une campagne contre la corruption, mais qui fait la distinction entre «bons» et «mauvais» corrompus, en fonction de leurs appartenances politiques. – Une loi électorale «juste et équilibrée», mais dont le but évident est de permettre la réélection de certains au détriment d’autres. À cette distorsion du principe de logique s’ajoute une autre perversion, celle de l’angoisse apocalyptique. Elle consiste à avancer une thèse et à la relier, d’une manière généralement allusive, à une menace dont les effets seraient incontrôlables : augmentation des taxes ou effondrement de l’économie, coordination avec la Syrie ou reprise de la guerre civile, etc. Cette démarche que les gens ont généralement de la peine à démontrer se greffe sur un problème d’ordre identitaire également grave. Depuis quelque temps déjà, les Libanais ne savent plus qui ils sont ni où ils sont. À aucun moment, en effet, n’apparaît dans le discours officiel une préoccupation proprement libanaise. Le Liban n’existe désormais qu’à travers sa relation avec la Syrie et quiconque remettrait en question ce fait se verrait taxé d’être «israélien» ou même «américain». Or l’identité libanaise est indépendante de toute considération politique. Les intérêts du pays ne sont pas nécessairement identiques à ceux de la Syrie. Des divergences existent et cela est dans l’ordre des choses. Il faut le reconnaître – quitte par la suite à rechercher les solutions adéquates et à préserver les relations avec la Syrie – plutôt que de continuer à user d’une langue de bois qui ne sert manifestement ni les intérêts du Liban ni même ceux de la Syrie. Commencée sous les meilleurs auspices, l’aventure de ce gouvernement se termine piteusement. Pour les Libanais dont l’avenir apparaît désormais bouché, il n’y a de solution que dans une action solidaire autonome qui, à défaut de déboucher rapidement sur les changements espérés, leur permettra de sortir de leur désespérance et d’assumer leurs responsabilités de citoyens.
Le gouvernement vient tout juste de terminer sa première année. Il ne reste plus de l’euphorie des premiers moments qu’un sentiment diffus de désespoir. Pourquoi ? Il est évident que les promesse faites n’ont pas été tenues : la crise économique, héritée, il est vrai, de la période précédente, s’est aggravée, la reforme administrative n’a pas eu lieu, la justice...