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Actualités - CHRONOLOGIE

Société - L'Ordre souverain de Malte inaugure un centre social à Roum Jezzine : le calvaire au quotidien (photo)

Roum, caza de Jezzine, est l’un des premiers villages habités après le no man’s land de Kfarfalous. Passage séparant la zone libre du Liban-Sud de la zone contrôlée par l’ALS (Armée du Liban-Sud). Situé à quarante kilomètres de Marjeyoun (quartier général de l’ALS) et à vingt kilomètres de Saïda, le village, comme le chef-lieu du caza (Jezzine), s’est vidé petit à petit de ses habitants. Ici, ce n’est pas vraiment la zone de sécurité et ce n’est pas non plus la zone libre. Les soldats de l’armée libanaise et les représentants de l’État libanais (juges, caïmacam…) y sont présents. Ce fait n’empêche pas pourtant les alliés des Israéliens ou les résistants du Hezbollah de s’affonter dans une région qui tente, tant bien que mal, de survivre. Roum, qui a enterré le vendredi 14 mai, cinq de ses habitants, a célébré samedi dernier l’inauguration du Centre d’assistance sociale relevant de l’Ordre souverain de Malte, présent dans la localité depuis vingt ans. C’est à la tête d’une délégation venue de Beyrouth, que le prince Édouard de Lobkowicz, ambassadeur de l’Ordre souverain de Malte a été accueilli au barrage de Kfarfalous par le président du conseil municipal de Roum, M. Gergi Haddad ( Abou Hajaje). Avant de se diriger vers l’église Saint-Georges des grecs-catholiques, pour la célébration de la messe solennelle, la délégation s’est rendue chez M. Nabil Philippe Haddad, président de la fondation qui porte son nom, et qui a financé en partie la construction du Centre d’assistance sociale. Le président du conseil municipal déclare à L’Orient-Le Jour : «Le prince et la princesse de Lobkowicz sont nos héros locaux, ils sont les seuls depuis vingt ans à s’occuper de nous ; d’ailleurs nous leur avons offert les clefs du village». Un village peuplé initialement de 5 000 habitants, (grecs-catholiques, maronites et chiites). « Nous sommes actuellement un millier de personnes à Roum», indique-t-il, en soulignant que «la situation à Jezzine n’est pas meilleure : ils étaient 65 mille, il ne reste plus que quelques milliers d’habitants». Six kilomètres séparent Roum de Jezzine. Six kilomètres nommés «la route de la mort» par les habitants de la région. Depuis des années, ce passage est le théâtre d’attentats contre les voitures des membres de l’ALS. Pourtant ce sont les civils, femmes et enfants, qui sont le plus touchés. La semaine dernière un enfant de deux ans, trois femmes, et un homme (membre de la milice pro-israéienne), habitant tous Roum, ont été tués. «C’étaient des déplacés de l’est de Saïda, qui sont arrivés au village en 1984» indique une habitante. «Ils allaient à Jezzine pour faire des achats», ajoute-t-elle. «Nous sommes obligés de traverser quotidiennement cette route», raconte un homme du village en expliquant que «Jezzine est le chef lieu du caza, c’est là, entre autres, qu’on effectue toutes les formalités administratives». Jezzine aussi abrite le seul hôpital de la région. Une institution publique «fonctionnelle à moitié», dit-on. Ceux qui tombent malades à Roum se rendent au dispensaire de l’Ordre souverain de Malte, tenu tout comme le nouveau centre d’assistance sociale par la Congrégation des sœurs de la charité de Besançon. «La Croix-Rouge intervient dans les situations graves, quand il faut transporter un malade vers Saïda ou vers Beyrouth, notamment de nuit quand le passage de Kfarfalous est fermé», indique le président du conseil municipal. Roum affiche fièrement l’emblème de l’Ordre souverain de Malte sur ses terres. En effet, à chaque coin de rue des pancartes portant la croix de l’Ordre indiquent la direction du dispensaire, construit en 1980 et restauré en 1991, et du nouveau centre social inauguré samedi dernier. Pour les habitants du village, c’est probablement la seule présence rassurante dans la région. Pour l’inauguration, des drapeaux aux couleurs de l’Ordre, de l’Espagne (pays donateur) et du Liban, ont fait leur apparition dans la ruelle menant au dispensaire et au centre d’assistance sociale. Le clocher de l’église Saint-Georges des grecs-catholiques a, lui aussi, été recouvert d’un étendard aux couleurs de l’Ordre souverain de Malte. Une autre délégation est arrivée également de Beyrouth : elle est présidée par M. Mariano Garcia Munoz, ambassadeur d’Espagne. Pays qui a fourni 400 000 dollars pour l’achèvement du centre d’assistance sociale. La messe est célébrée par l’archevêque melkite de Saïda, Mgr Georges Kwaïter, en présence d’un peu plus de deux cent personnes : des paroissiens constitués pour la plupart de personnes du troisième âge, de femmes et de jeunes enfants. Quelques originaires de la localité ont effectué le trajet Beyrouth-Roum spécialement pour l’occasion. Dans son homélie, Mgr Kwaïter a remercié au nom des habitants de Roum toutes les parties qui ont rendu possible la construction du centre d’assistance social notamment «le prince de Lobkowicz, à qui les habitants du village ont donné avec beaucoup d’affection le nom de Roumiote (habitant de Roum) pour les avoir soutenus au cours des vingt dernières années, et l’Espagne, qui montre à travers le don octroyé son attachement aux valeurs chrétiennes». Il a également rendu hommage au courage des habitants de la localité. «L’espérance est plus que jamais nécessaire pour ceux qui vivent dans cette région ; il faut espérer mais aussi croire au retour de la paix», a-t-il déclaré. À la sortie de la messe, une femme essuie ses larmes. «La semaine dernière, cinq cercueils blancs sont sortis de cette même église…», dit-elle d’une voix étranglée. Elle n’achèvera pas sa phrase. «Il vaut mieux se taire», précise-t-elle. Après tout, le calvaire quotidien vécu par les habitants de la région n’est-il pas souvent passé sous silence ?
Roum, caza de Jezzine, est l’un des premiers villages habités après le no man’s land de Kfarfalous. Passage séparant la zone libre du Liban-Sud de la zone contrôlée par l’ALS (Armée du Liban-Sud). Situé à quarante kilomètres de Marjeyoun (quartier général de l’ALS) et à vingt kilomètres de Saïda, le village, comme le chef-lieu du caza (Jezzine), s’est vidé petit à petit...