Rechercher
Rechercher

Diaspora

Les Libanais du Canada se plient à la tradition de la cabane à sucre

Le Québec fournit 80 % de la production canadienne de sirop d’érable
Les mois de mars et d’avril sont l’occasion pour les Libanais du Canada de s’ouvrir aux traditions de leur pays d’accueil. Après le long et dur hiver, une sortie champêtre à la cabane à sucre s’impose, au moins une fois par saison. Les Québécois disent aussi qu’ils se rendent « aux sucres ». Se rendre aux sucres, c’est visiter une des nombreuses érablières situées sur le territoire québécois où l’on goûte à un repas traditionnel, généralement accompagné de sirop d’érable, où l’on entend de la musique folklorique, où l’on danse, où l’on fait un tour en calèche et où l’on mange de la tire, une sorte de sucette au sirop d’érable.
«Aller à la cabane à sucre est une sortie annuelle, aussi importante dans nos traditions que la bûche de Noël ou les “maamouls ” de Pâques », explique, enthousiaste, une Libano-Canadienne. « Nous organisons alors un groupe d’une cinquantaine de personnes de tous âges, composé de membres de la famille et d’amis. C’est une occasion de nous rencontrer et pour nos jeunes de se revoir après s’être perdus de vue », poursuit-elle, précisant que les jeunes adultes accompagnent volontiers leurs parents ce jour-là. La réservation est certes de rigueur, une quarantaine de jours à l’avance. Les convives paient juste leur billet d’entrée. À l’intérieur des érablières, toutes les activités sont gratuites et la nourriture est offerte à volonté.

Un repas traditionnel à la manière des bûcherons
Le Canada fournit 95 % de la production mondiale de sirop d’érable et 80 % de la production canadienne de sirop d’érable vient du Québec. La majorité de la communauté libanaise habitant Montréal, les endroits où les Libanais se rendent sont donc situés de manière générale dans la couronne de Montréal (les régions entourant la ville), dans les régions de Saint-Eustache ou de Rigaud.
Dès l’arrivée à l’érablière, un tour en calèche s’impose, pour visiter le domaine. Vient ensuite le tour du repas qui est servi par les familles propriétaires des érablières dans de grandes salles à l’allure de réfectoires. « Les Libanais ont pris l’habitude de faire circuler une casquette où chacun dépose 1 ou 2 dollars de pourboire qu’ils remettent à leurs hôtes avant le déjeuner, histoire d’être bien servis », raconte une inconditionnelle de cette sortie. Les convives sont assis sur des bancs et les tables sont recouvertes de nappes en vichy rouge et blanc.
Quant au repas traditionnel, il est composé de soupe aux pois jaunes, d’œufs en omelettes, de jambon ou de saucisses, de pommes de terre, de fèves au lard, de lait, de pâté gras étalé sur du pain, auquel est donné le nom de creton, de betteraves pressées au vinaigre, baptisées « pickles », et surtout d’ « oreilles de Christ » (à prononcer crisse) qui n’est autre que du lard frit coupé en lamelles. Le tout est généreusement arrosé de sirop d’érable. Ce repas s’inspire des plats robustes qui composaient autrefois les repas des bûcherons canadiens-français. Pour le dessert, les convives ont le choix entre une tarte au sucre, du gâteau à l’érable, communément appelé pudding chômeur, et des crêpes à l’érable.
À la fin du repas, les convives se dirigent vers une autre salle où un groupe de musiciens jouent différentes formes de danses, rock, tchatcha, valse, set carré, twist et même de la danse orientale. Parfois, c’est un DJ qui anime la fête. La danse nationale, baptisée gigue, est également jouée. Elle consiste dans un mélange de claquettes et de danse celtique.
En fin de journée, manger de la tire est un must. Elle est fabriquée à partir de sirop d’érable bouilli dont on verse un filet sur la neige. Chaque personne prend alors un bâtonnet et roule la tire qui durcit sur le bâtonnet. Une sucette « écœurante », autrement dit succulente en québécois, est alors fabriquée, qui fait la joie des petits et des grands. Tout en dégustant la tire, les enfants peuvent admirer les animaux dans les bergeries.

Production artisanale ou industrielle
Mais comment a été découvert le sirop d’érable ? Par hasard, raconte-t-on. Un Indien avait un jour planté sa hache dans un érable, sous le tronc duquel il avait laissé un seau. Le lendemain, au lieu d’aller puiser de l’eau, son épouse prit le seau rempli, qui était au pied de l’arbre, et y fit cuire le jambon. Le mets était excellent et sucré. Depuis, c’est ainsi qu’on récupère la sève d’érable, à partir du mois de mars, en entaillant les arbres, en insérant des « goudrelles » dans leur tronc et en déposant des seaux sous l’entaille. L’eau tombe goutte à goutte dans les seaux. Pour que la sève monte dans les érables au printemps, la température doit descendre la nuit au-dessous de zéro degré Celsius et remonter le jour.
Les érablières familiales recueillent toujours le sirop de cette manière, alors que la production industrielle recueille désormais le sirop au moyen de tuyaux qui ceinturent l’érablière et déversent le liquide dans des tonneaux. Une fois récoltée, cette eau est bouillie jusqu’à prendre la consistance d’un sirop. Celui-ci peut aussi être transformé en beurre par barattage. En s’épaississant, après cuisson prolongée, il devient de la tire, puis du sucre mou et ensuite du sucre dur. Quant aux visiteurs, c’est la production de l’année précédente qu’ils mangent à la cabane à sucre.
La cabane à sucre n’est pas la seule tradition à laquelle se plient volontiers les Libano-Canadiens. À l’instar des Canadiens, ils participent aussi à la traditionnelle cueillette des pommes, en automne, à la course de chiens dans la neige, en hiver, et à bien d’autres coutumes purement canadiennes. Une façon comme une autre de revendiquer leur nouvelle identité et de s’adapter dans ce pays du Nouveau Continent où les autorités regorgent d’imagination pour développer le tourisme, malgré le manque de patrimoine archéologique.
Les mois de mars et d’avril sont l’occasion pour les Libanais du Canada de s’ouvrir aux traditions de leur pays d’accueil. Après le long et dur hiver, une sortie champêtre à la cabane à sucre s’impose, au moins une fois par saison. Les Québécois disent aussi qu’ils se rendent « aux...