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Politique - Conflit au Liban-Sud

Combattants ou civils ? Comment le duo Hezbollah-Amal classe-t-il ses « martyrs » ?

Un combattant du Hezbollah explique les différents types d’affiliés.

Combattants ou civils ? Comment le duo Hezbollah-Amal classe-t-il ses « martyrs » ?

Des combattants et partisans du Hezbollah assistant aux funérailles de l’un de ses cadres, Hassan Hussein, de son épouse Rouwaïda Moustapha et de leur fils Ali Hussein, tués la veille dans un bombardement israélien, au Liban-Sud, début mars 2024. Photo AFP

Depuis que les combats ont éclaté entre le Hezbollah et l’armée israélienne le 8 octobre, 285 combattants ont été tués, selon les annonces du parti chiite, qu’il identifie systématiquement en fournissant leurs nom, âge, lieu de naissance, surnom et une photo. Pourtant, à plusieurs reprises, des membres des familles et des proches des personnes tuées ont affirmé qu’il s’agissait en réalité de civils et que le Hezbollah se les était appropriés en tant que « martyrs ».

C’est le cas de Khalil Farès, tué dans une frappe israélienne à Jadra (Chouf) le 10 février dernier. Selon Dana Reslan, une habitante du village, il était « propriétaire d’un magasin de légumes local dont il tenait une petite boutique de fortune sur le bord de la route depuis plusieurs années ». « Plusieurs habitants de la localité ont été choqués lorsque le Hezbollah l’a présenté comme l’un de ses combattants tués sur la route de Jérusalem », c’est-à-dire tué au combat, a-t-elle expliqué à L’Orient Today.

Pour mémoire

À Jadra, la mort s’est trompée de cible

Charbel Azzi, la cinquantaine, qui achetait des légumes à Khalil Farès quelques minutes avant que ce dernier ne soit tué, avait, lui, déclaré à L’Orient-Le Jour en février qu’après la première frappe ce jour-là, le légumier lui avait dit : « Je reviens dans une minute », avant de se précipiter vers la scène du drame. « J’ai fini par le suivre et, 1 minute 15 secondes plus tard, j’étais à 20 mètres derrière lui lorsqu’un second missile l’a frappé de plein fouet », nous racontait-il. Et d’ajouter : « Le fait qu’il ait couru comme cela avant la seconde frappe montre à quel point il ne connaissait rien aux zones de guerre. » 

Kassem Kassir, un analyste réputé proche du Hezbollah, ne croit pas que le parti essaie d’augmenter le nombre de ses combattants tués : « Ils n’ont rien à y gagner et n’ont aucune raison de le faire. » Il souligne que le gros du travail de la formation chiite dépend du secret et donc « une personne pourrait être membre du Hezbollah pendant des années sans que le grand public ne le sache ». Un combattant du Hezbollah, théoriquement non autorisé à parler à la presse, a, lui, détaillé à L’Orient Today les différents types d’affiliés au parti : « Certains sont officiellement membres ; d’autres sont des partisans ou ont de nombreux membres de leur famille qui sont affiliés au parti, et donc, s’ils sont tués, par respect, le parti les revendique comme siens. »

« Allocation » ?
Tous les tués revendiqués par le Hezbollah comme faisant partie de ses troupes ont pourtant droit à la qualification de « martyrs tués sur la route de Jérusalem ». Pourquoi ? « Simplement parce que nous croyons que les sacrifices des membres officiels du Hezbollah et les victimes des frappes israéliennes font partie d’une lutte plus étendue contre l’ennemi pour libérer Jérusalem des sionistes », note Kassem Kassir. 

Le Hezbollah n’est pas le seul à revendiquer ses « martyrs ». Le mouvement Amal fait de même. Mi-février, une frappe israélienne a tué une partie de la famille de Hussein Ahmad Berjaoui à Nabatiyé. Tous les habitants de la ville s’étaient alors dits choqués que l’appartement de la famille ait été attaqué, insistant sur le fait que celle-ci n’avait aucune affiliation politique. Deux jours plus tard, Hussein Ahmad Berjaoui a été qualifié de « membre du mouvement Amal tué en accomplissant son devoir jihadiste de défense du Liban et du Sud ».

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Le Hezbollah et le mouvement Amal sont différents à cet égard. « Le Hezbollah pleure ses cadres et ses membres tués en tant que combattants morts sur le chemin de Jérusalem, en donnant au conflit un caractère régional, tandis que le mouvement Amal insiste sur le fait qu’ils sont morts en défendant le Liban. Cette différence est significative », souligne le combattant anonyme du Hezbollah.

Imad Salamey, professeur de relations internationales à l’Université libano-américaine (LAU), explique que, « rationnellement parlant, le Hezbollah devrait être soucieux de dissimuler le nombre de ses combattants tués pour montrer qu’Israël échoue dans ses attaques et que celles-ci n’atteignent pas leurs cibles ». Cependant, « le parti veut aussi montrer aux Palestiniens de Gaza qu’il sacrifie les siens pour la cause de Jérusalem et se tient à leurs côtés », souligne pour sa part le combattant du Hezbollah.

Beaucoup toutefois pensent que les familles des victimes souhaitent cette revendication par le Hezbollah ou Amal afin de toucher une allocation de leur part. Une porte-parole du Hezb a néanmoins expliqué à L’Orient Today que la formation pro-iranienne ne vise pas à dissimuler ou à exagérer le nombre de ses combattants tués, mais qu’il existe plusieurs types de « membres impliqués dans le parti » : « Il y a ceux qui sont officiellement affiliés et sont enregistrés comme recevant un salaire ; puis il y a les gens que nous appelons les “taabi’a” (mobilisés), qui sont proches du parti mais ne reçoivent aucune aide financière. Lorsque les mobilisés sont tués par des frappes israéliennes, le Hezbollah les pleure. Mais ils ne sont pas payés, et leurs familles ne le seront pas non plus », conclut la porte-parole.

Depuis que les combats ont éclaté entre le Hezbollah et l’armée israélienne le 8 octobre, 285 combattants ont été tués, selon les annonces du parti chiite, qu’il identifie systématiquement en fournissant leurs nom, âge, lieu de naissance, surnom et une photo. Pourtant, à plusieurs reprises, des membres des familles et des proches des personnes tuées ont affirmé qu’il...

commentaires (13)

Nous les considérerons comme étant des martyrs le jour où ils viendraient défendre leur drapeau et leur terre libanaise et non des pays étrangers et des causes fallacieuses pour le détruire.

Sissi zayyat

12 h 24, le 22 avril 2024

Tous les commentaires

Commentaires (13)

  • Nous les considérerons comme étant des martyrs le jour où ils viendraient défendre leur drapeau et leur terre libanaise et non des pays étrangers et des causes fallacieuses pour le détruire.

    Sissi zayyat

    12 h 24, le 22 avril 2024

  • Amal prétend donner une dimension nationale aux actions de ses miliciens prétendus morts "en accomplissant leur devoir jihadiste de défense du Liban". Le Hezbollah, sur ce point, est plus honnête. La formule " tué sur la route de Jérusalem" signifie que  ce combat n’avait rien à voir avec la défense du Liban.

    Yves Prevost

    07 h 51, le 21 avril 2024

  • Moi citoyen moyen toi citoyen divin, passe moi un falafel.

    Wlek Sanferlou

    07 h 47, le 21 avril 2024

  • Extrait de l’article….. « il y a les gens que nous appelons les “taabi’a” (mobilisés), qui sont proches du parti mais ne reçoivent aucune aide financière. Lorsque les mobilisés sont tués par des frappes israéliennes, le Hezbollah les pleure. Mais ils ne sont pas payés, et leurs familles ne le seront pas non plus », conclut la porte-parole »… Donc, pour comprendre : chacun pourra interpréter ceci mais le résultat restera le même.

    LE FRANCOPHONE

    02 h 24, le 21 avril 2024

  • Paix à leurs âmes tous. Juste pour le respect des défunts. C’est tout. Cependant pour les appellations ? Un martyr c’est le soldat d’une armée régulière qui meurt au combat ou durant une guerre pour la cause de son pays. Il paie de sa vie pour défendre son pays et ses compatriotes. Parce qu’un pays civilisé possède une armée régulière qui représente tout le pays….et non une milice.

    LE FRANCOPHONE

    02 h 12, le 21 avril 2024

  • En plus il fallait prendre en considération les dégâts et les conséquences horribles qu’une telle guerre pourrait affecter les citoyens qui partagent pas cette conviction et il me semble sont majoritaire Chose n’a pas été faite Pour cette raison la décision d’une guerre c’est une décision d’un état que ses représentants élus par les citoyens possèdent une légitimité Je termine en rapportant que c’est une guerre israélo iranienne qui passe sur les territoires libanaises et d’autres territoires arabes.

    william semaan

    19 h 07, le 20 avril 2024

  • Effectivement Tous le respects pour les Victimes décédés, enfin de compte ce sont des être humains Mais ça mériterais une discussion pour qu’elle cause ? Idéologique régional religieux ou patriotisme …. Et cette question devait être adressée en premier plan à leur leaders À titre d’exemple Est ce nous pourrions considérer les soldats péris durant la guerre irako iranienne plus qu’une million de deux côtés Martyr ou victimes chacun est décédé pour la cause qu’ils croyait vrai

    william semaan

    18 h 56, le 20 avril 2024

  • Bel article merci pour ces clarifications et respect aux martyrs tombes pour la cause qu'ils trouvent juste et honnorable

    kassem chady

    16 h 15, le 20 avril 2024

  • Martyrs pour l’Iran fakihien uniquement !

    Wow

    16 h 15, le 20 avril 2024

  • ET PUISQUE ILS SONT CLASSES DIFFEREMMENT, AU PARADIS (?) LE NOMBRE DES VIERGES DOIT VARIER.

    LA LIBRE EXPRESSION

    13 h 38, le 20 avril 2024

  • Netanyahu est un parent protecteur. Il envoie son fils vivre dans l'opulence loin du conflit. Quelle belle personne !

    peacepeiche@gmail.com

    13 h 05, le 20 avril 2024

  • Ils ont le culte du martyr. Peu importe l’identité ou la cause des morts ils passent pour pertes et profits et se sentent honorés par ce qualificatif de martyr qui a l’air de séduire leurs parents qui ne les fabriquent que pour les envoyer à la mort. C’est toute la différence avec le reste des parents libanais et du monde entier qui veillent à ce que leurs chérubins soient à l’abri de tout danger au péril de leurs propres vies. C’est la nature qui nous a inculqué ça. Aucun animal ne laisserait sa progéniture courir un danger en sa présence, ça s’appelle un devoir parental.

    Sissi zayyat

    11 h 44, le 20 avril 2024

  • On s en fout.

    Marie Claude

    11 h 43, le 20 avril 2024

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