L’initiative de la Modération nationale remet en lumière les divergences FL-Kataëb

Samir Geagea est enthousiaste, Samy Gemayel est réticent. Si l’initiative lancée il y a près de deux semaines par les députés du bloc de la Modération nationale, majoritairement sunnites ex-haririens, en vue de débloquer la présidentielle, et qui prévoit des concertations parlementaires suivies d’une séance électorale ouverte, n’a pas encore donné les résultats escomptés, elle a remis en lumière les divergences (ou la concurrence sur la scène chrétienne) entre les Forces libanaises et les Kataëb. D’autant que ces deux partis font front uni au sein de l’opposition face au Hezbollah dans le cadre de la bataille présidentielle. Ce camp est toutefois, étant donné le poids du bloc parlementaire des FL, fédéré par Samir Geagea, ce qui pourrait ne pas (toujours) plaire à Samy Gemayel.

Ce n’est d’ailleurs pas la première fois que ce dernier fait preuve de plus d’intransigeance dans son discours d’opposant au camp du Hezbollah. Aux yeux de plusieurs observateurs, c’est une façon pour le chef des Kataëb – longtemps coincé sur la scène chrétienne entre les leaders les plus majoritaires de la communauté, le Courant patriotique libre et les FL – de jouer un rôle de premier plan. M. Gemayel a en effet critiqué la démarche des députés ex-haririens, qu’il affirme n’avoir « pas comprise », quelques jours seulement après le feu vert que le leader des FL leur avait accordé. Ces divergences traduisent-elles une volonté des deux hommes de se démarquer l’un de l’autre pour des calculs politiques chrétiens ? Ou s’agit-il d’une simple différence de points de vue à laquelle pourrait remédier la commission récemment mise en place pour tenter, une nouvelle fois, de souder les anti-Hezbollah ?

Une chose est sûre : Samy Gemayel n’en démord pas. Pour la troisième fois en l’espace d’une semaine, le chef des Kataëb a critiqué jeudi l’initiative des ex-haririens. « Nous respectons les membres du bloc de la Modération nationale. Mais il y a encore des points à clarifier dans leur proposition », a-t-il dit dans une interview accordée à la chaîne locale LBCI. S’il n’a pas clarifié les points qui devraient encore être selon lui élucidés, il a réitéré sa position au sujet de la présidentielle : « Si le Hezbollah abandonne la candidature (du chef des Marada) Sleiman Frangié, le futur président de la République pourrait être élu en 48 heures. » Comme pour mettre en lumière, une nouvelle fois, le fait que l’initiative des anciens haririens n’inclut aucune garantie de voir le Hezbollah lâcher son candidat pour se conformer aux résultats de l’hypothétique séance de concertations parlementaires. « C’est sur ce dernier point que s’articule notre position à l’égard de la démarche. Mais cela ne veut pas dire que nous sommes en désaccord stratégique avec les FL », commente Élias Hankache, député Kataëb, rappelant que l’opposition est arrivée en rangs soudés à la Chambre pour l’entretien avec l’émissaire américain, Amos Hochstein, lundi soir. « Notre participation ensemble (FL, Kataëb, bloc du Renouveau) montre que nous sommes sur la même longueur d’onde. Et c’est ce qui importe le plus dans notre bataille, tant pour épargner au Liban la guerre totale que pour ce qui est de l’élection d’un président », ajoute-t-il.  

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Même son de cloche du côté des FL. « Nous sommes en contact permanent avec les Kataëb et le reste des protagonistes de l’opposition dans le cadre de la bataille présidentielle », déclare à L’Orient-Le Jour Ghayath Yazbeck, député du parti. « Nos deux formations voient le projet des députés ex-haririens sous deux angles différents. Nous considérons que c’est un moyen de mettre à nu le camp du Hezbollah prêt à tout pour imposer son candidat à tous les protagonistes. Alors que pour les Kataëb, cela ne suffit pas pour mettre le Hezbollah face à ses obligations », explique-t-il.

Encore une commission…
Il reste que ces prises de position n’empêchent pas plusieurs députés relevant de l’opposition de faire valoir que le chef des FL s’est hâté d’approuver l’initiative de la Modération nationale sans concertations préalables avec ses alliés, à l’heure où ces derniers « déploient des efforts pour préserver leur unité face au Hezbollah », pour reprendre les termes d’un de ces parlementaires qui a requis l’anonymat. Il rappelle dans ce cadre que c’est dans un souci d’unité que le bloc du Renouveau et plusieurs ténors Kataëb se sont exprimés au sujet de l’initiative, mais ont pris le soin de faire valoir que la position officielle sera exprimée à l’issue de concertations avec le reste des composantes de l’opposition.

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Quoi qu’il en soit, les deux partis chrétiens minimisent l’impact de leurs divergences pour focaliser leurs efforts sur ce qu’un responsable Kataëb haut placé appelle « l’élargissement du front d’opposants ». Une tâche dont est chargée une commission récemment mise en place, et incluant des députés représentant toutes les composantes de l’opposition. Il s’agit de Samy Gemayel, Michel Moawad (Renouveau), Georges Okaïs (FL) et Waddah Sadek (contestation).