Le plan israélien d'expansion des colonies a contribué au changement de langage de Washington

Le projet israélien d'ajouter des milliers de logements aux colonies de Cisjordanie occupée, annoncé la semaine dernière, était le dernier coup de pouce dont l'administration Biden avait besoin pour les déclarer « incompatibles » avec le droit international, ont déclaré à l'agence Reuters des sources et des responsables américains au fait de la situation.

Au lieu de la présentation soigneusement chorégraphiée de la politique, typique de Washington, le secrétaire d'État Antony Blinken a opéré ce revirement en réponse à une question lors d'une conférence de presse à Buenos Aires, capitale de l'Argentine.

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« La politique américaine est depuis longtemps, sous les administrations républicaines et démocrates, que les nouvelles implantations sont contre-productives pour parvenir à une paix durable », a déclaré M. Blinken. « Elles sont également incompatibles avec le droit international ».

Le changement politique s'est fait attendre, mais la décision finale a été prise en quelques heures, prenant beaucoup de monde par surprise et soulevant des questions sur les raisons du choix de ce moment, pour revenir à ce qui avait été la position des États-Unis pendant quatre décennies, jusqu'à ce qu'elle soit modifiée par l'administration précédente de Donald Trump. Vingt-quatre heures auparavant, il n'était pas prévu que M. Blinken fasse une telle annonce vendredi lors de la conférence de presse prévue, ont indiqué des sources.

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Mais après que le ministre des Finances d'extrême droite, Bezalel Smotrich, a déclaré que le gouvernement israélien avait avalisé des plans visant à approuver la construction de quelque 3 300 nouveaux logements dans les colonies, en réponse à une fusillade palestinienne meurtrière en Cisjordanie, les responsables américains ont conclu que le moment était venu de dévoiler le changement de langage.

« C'est quelque chose que l'administration envisageait depuis longtemps, et les événements récents ont clairement montré que le moment était venu de l'exprimer », a déclaré un fonctionnaire américain au courant de la décision.

Israël s’engage à poursuivre sur sa lancée

Dirigeant influent de l'un des partis de la droite dure dans la coalition gouvernementale du Premier ministre Benjamin Netanyahu, M. Smotrich vit lui-même dans une colonie de Cisjordanie.

Mardi, en fin de journée, il a réitéré sa promesse de poursuivre l'expansion des colonies, en annonçant l'approbation d'une nouvelle colonie appelée Mishmar Yehuda dans le Gush Etzion, au sud de Jérusalem, et en déclarant que les travaux se poursuivraient en vue d'en autoriser d'autres. « Nous poursuivrons la dynamique de colonisation dans tout le pays », a déclaré M. Smotrich dans un communiqué.

Ce changement de politique a permis aux États-Unis de s'aligner sur la plupart des pays dans le monde, qui considèrent comme illégales les colonies construites sur le territoire dont Israël s'est emparé lors de la guerre de 1967 au Proche-Orient.

Depuis son entrée en fonction en janvier 2021, l'administration Biden a failli à plusieurs reprises rétablir le langage d'avant l'ère Trump mais, à chaque fois, le projet a été mis de côté en grande partie parce qu'il n'a pas obtenu le feu vert de tous les hauts responsables de l'administration, ont indiqué les sources.

L'attaque du mouvement islamiste Hamas le 7 octobre 2023, qui a tué 1.200 Israéliens, en a pris plus de 250 autres en otage et a déclenché une campagne militaire israélienne meurtrière, a temporairement interrompu les projets d'un tel changement, même si les discussions internes sur la question se sont poursuivies, selon des responsables.

Un obstacle à la paix

La décision de procéder à ce changement souligne la frustration croissante de l'administration Biden à l'égard de M. Netanyahu. Le dirigeant israélien est de plus en plus en désaccord avec son principal soutien, le président Joe Biden, sur toute une série de questions relatives au conflit entre Israël et le Hamas.

Malgré les pressions américaines contre une réoccupation de la bande de Gaza, M. Netanyahu a déclaré à plusieurs reprises qu'Israël se chargerait de la sécurité dans cette enclave densément peuplée une fois la guerre terminée. Il a également refusé d'adhérer à un accord de paix envisageant deux États, israélien et palestinien, côte à côte.

Washington a averti, à plusieurs reprises, les responsables israéliens que l'expansion des colonies constituait un obstacle à la paix et qu'Israël devait agir pour mettre fin aux violences commises par les colons à l'encontre des Palestiniens en Cisjordanie. Il a récemment imposé des sanctions à quatre Israéliens accusés d'être impliqués dans des actes de violence commis par des colons.

Le ministère palestinien des Affaires étrangères a condamné l'annonce de la colonisation israélienne la semaine dernière, estimant qu'elle compromettait les chances de parvenir à une solution fondée sur la coexistence de deux États.

L'association israélienne Peace Now, qui surveille l'expansion des colonies, a affirmé, en janvier dernier, qu'il y avait eu une augmentation sans précédent des activités de colonisation depuis le début de la guerre de Gaza en octobre.

« D'un point de vue politique, nous avons toujours été clairs sur le fait que nous pensions que les colonies étaient un obstacle à la paix et qu'elles affaiblissaient, et non pas renforçaient, la sécurité d'Israël », a déclaré lundi le porte-parole du département d'État, Matthew Miller, lorsqu'on lui a demandé pourquoi il avait fallu trois ans à l'administration pour procéder à ce changement. « En tant que question juridique, c'est quelque chose qui était en cours d'examen ici au Département depuis un certain temps », a ajouté M. Miller. Il n'a pas voulu préciser quand cet examen avait commencé.

Cet article a été initialement rédigé en anglais par Don Durfee et Daniel Wallis.