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Naître - Lorient-Le Siecle

Une politique aberrante

8 décembre 1947. Dix ans plus tôt, Michel Chiha rachetait le quotidien francophone « Le Jour ». Dans les colonnes du journal, l’intellectuel ne cesse, depuis, d’alerter contre les dangers du projet sioniste. Quelques jours après le vote par l’ONU du plan de partage de la Palestine, ouvrant la voie cinq mois plus tard à la création de l’État d’Israël, ce dernier dénonce « une des erreurs les plus considérables de la politique contemporaine ». « D’une chose apparemment petite, les conséquences les plus surprenantes vont sortir », pressent-il. 

Une politique aberrante

« Le Jour », le 8 décembre 1947. Illustration Jaimee Haddad

À l’occasion de son centenaire, L’Orient-Le Jour fait revivre les grands textes de L'Orient, du Jour et de L'Orient-Le Jour qui ont marqué le siècle. Ici, l'éditorial de Michel Chiha publié dans Le Jour le 8 décembre 1947.

« La protestation collective contre le « diktat » de l’ONU se fait de plus en plus impressionnante. Depuis qu’on sait que des nations n’ont pas voté librement, la décision créant l’État juif en Palestine paraît à chacun viciée. Les larmes du représentant de Haïti demeureront célèbres dans l’histoire. Et c’est en vain que la propagande juive revêtant les formes les plus inattendues se livre et se livrera à des plaidoyers passionnés.

Le comble est de venir dire aujourd’hui que les pays arabes ont, par racisme, manqué de souplesse et d’esprit de conciliation. Un rédacteur de l’AFP s’aventurait hier à transmettre par son agence ceci : « On échappe difficilement, dans l’opinion internationale la mieux disposée à l’égard des Arabes, à l’impression que leurs délégués ont manqué, par excès d’intransigeance raciale, les occasions que leur offrait le débat de faire adopter une solution plus favorable aux intérêts qu’ils défendaient. »

Si le plus subtil des enfants d’Israël eût été le rédacteur en question de l’AFP, il ne se fût exprimé autrement ; il n’eût pas écrit quelque chose de plus téméraire ; car, c’est littéralement imputer à leurs adversaires ce que les juifs sont, c’est-à-dire les représentants déchaînés du racisme le plus envahissant et le plus exclusif de la terre.

Portrait

Michel Chiha, un phare qui attend d’être rallumé

C’est aller loin vraiment que d’oser écrire cela. La position de la France, dans le débat, la position de la France « qui est aussi une puissance musulmane », rappelle le rédacteur de l’AFP, ne gagne pas à être défendue ainsi.

La décision de partage de la Palestine par la création de l’État juif est une des erreurs les plus considérables de la politique contemporaine. D’une chose apparemment petite, les conséquences les plus surprenantes vont sortir. Et ce n’est pas offenser la raison que d’écrire que cette petite histoire contribuera à ébranler la terre dans ses fondements.

À partir d’aujourd’hui, la voix des pays arabes va se raffermir et leur action s’élargir.

La plainte qui monte vers la justice infirme des hommes va se faire plus pressante. Sous prétexte de donner un foyer à un peuple errant et qu’aucune Palestine ne peut contenir, voilà les foyers d’autres peuples ébranlés, menacés, détruits ; et voilà la souveraineté juive érigée à la face du monde comme un fait légitime au prix d’un morcellement géographique, d’un arbitraire sans exemple.

C’est l’avenir qui dira ce que représentera la pression d’Israël, et du million et demi d’immigrants que les juifs annoncent pour les proches années, sur les frontières terrestres de la Palestine.

Il n’est pas dans notre tempérament d’annoncer le malheur à la manière de Jérémie, mais c’est faire acte de clairvoyance que d’envisager, au terme des folies auxquelles nous assistons, des jours tragiques et une nouvelle diaspora. Pour affirmer leur personnalité collective dans la paix et dans la concorde, les juifs n’avaient pas besoin de tout cela. »


À l’occasion de son centenaire, L’Orient-Le Jour fait revivre les grands textes de L'Orient, du Jour et de L'Orient-Le Jour qui ont marqué le siècle. Ici, l'éditorial de Michel Chiha publié dans Le Jour le 8 décembre 1947.« La protestation collective contre le « diktat » de l’ONU se fait de plus en plus impressionnante. Depuis qu’on sait que des nations...

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