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Au fil de nos 100 ans - Lorient-Le Siecle

Confessions d’un enfant du siècle

Confessions d’un enfant du siècle

Une question d’apparence simple nous a longtemps laissés sans voix. Avoir cent ans, qu’est-ce que c’est ?

Pour un être humain, le phénomène est presque ordinaire. Jamais le monde n’avait compté autant de centenaires. À l’échelle d’un journal, c’est une autre histoire, plus tragique. L’ère du numérique et de l’instantané a fait du papier une relique d’un temps passé. L’agonie de la presse écrite a commencé il y a des décennies. Partout dans le monde, survivre est un combat. Nous avons, nous aussi, subi des pertes en chemin. Tout en essayant, chaque jour, d’échapper à la fatalité.

Les médias d’aujourd’hui inspirent tour à tour mépris, rejet, indifférence ou fascination. Dans notre cas, il faut ajouter une couche de pittoresque. Quotidien francophone né à Beyrouth, L’Orient-Le Jour est aussi devenu au fil du temps un objet de curiosité. Pour des reporters ou diplomates de passage, amateurs de journalisme « local ». Pour des étudiants fascinés par cet espace un peu fou où se mêlent professionnel et intime, faits et opinions, petite et grande histoire. Parfois même pour des membres de la « famille OLJ ».

De l’encre a coulé. Des hommages ont été rendus, des célébrations ont eu lieu, des reportages ont été enregistrés. Quelques livres ont été écrits, un mémoire a même été rédigé sur « le comportement politique du journal ». Que reste-t-il qui n’ait été dit ? Peut-être une chose. Quelque part entre l’enquête et l’introspection, un espace en jachère. Un examen vient de l’intérieur. L’Orient-Le Jour se raconte.

Mais se raconter implique de savoir qui parle. Or nous n’en avons aucune idée. Ou plutôt, nous en avons plusieurs idées. Notre héritage est multiple, « nous » évolue au fil du siècle.

Il y a d’abord L’Orient, né en 1924 d’une âme un peu bohème, dont le nom vieillit avec celui de son cofondateur, Georges Naccache. Le Jour, ancien rival, ressuscité d’entre les morts au début des années 1960, annonçant l’arrivée en force d’une nouvelle génération. L’Orient-Le Jour, enfant hybride né le 15 juin 1971 d’une union qui n’aurait pas dû avoir lieu.

Il y a également les autres. L’Orient Littéraire, qui continue de nous fait vivre l’actualité littéraire depuis 1929, al-Jarida, éphémère expérience arabophone née en 1953, L’Orient Express fondé en 1995 à l’initiative de Samir Kassir, Le Commerce du Levant disparu en 2021 après avoir été racheté vingt-trois ans plus tôt, Les Copains qui deviendra plus tard L’Orient-Le Jour Junior, ou encore L’Orient Today, dernier né de la famille, en 2020. Les rédactions travaillant côte à côte, mais aussi les soldats de l’ombre et les oubliés de l’histoire qui ont fait l’institution, parfois continuent de la faire. Le récit de ce siècle est aussi le leur.

Portrait

Georges Naccache, « L’Orient » compliqué

À cela s’ajoute la diversité des profils individuels qui composent toute rédaction. Le regard porté sur l’histoire n’est pas le même en fonction des âges, des origines et des parcours. Il y a ceux qui ont connu le monde de l’avant-fusion, les héritiers du Jour ou de L’Orient. Ceux qui ont fait leurs armes dans des locaux de fortune, dont la mémoire restera à jamais marquée par un journalisme précaire fait de batteries rechargeables, de bougies et de nuits d’hôtel. Ceux qui ont vécu, parfois géré, le passage à l’ère du numérique. Et les petits derniers qui, à 30 ou 60 ans, resteront les éternels « nouveaux ». Jusqu’à ce qu’une nouvelle génération les remplace.

Dans sa diversité, L’Orient-Le Jour reste avant tout un enfant du siècle. Un produit de la modernité politique, un acteur de l’indépendance, une victime collatérale de la guerre, un sinistré de la crise, un rescapé de l’époque. Désordonnée, compliquée et parfois orageuse, notre histoire n’est pas linéaire. Elle est parsemée de drames, ponctuée d’erreurs, peut-être pleine de travers.

Avis de recherche

À la recherche du premier numéro de « L'Orient »...

Cette histoire mérite pourtant d’être racontée. Chaque mois, nous avons décidé de partir à sa rencontre. S’extraire du rythme effréné de l’actualité. Retrouver le point de départ. Retracer nos origines, non pas pour exalter nos racines, mais pour saisir notre mécanique première. Aujourd’hui comme hier, les questions se ressemblent. Pourquoi un journal, pourquoi à Beyrouth, et pourquoi en français ? À chaque époque, ses réponses. Nous les explorerons une à une, tout au long de l’année, à travers les différents âges de la vie du journal, mais aussi du Liban et de la région. Avec une boussole : comprendre d’où l’on vient pour savoir où l’on va.

Nous ne serons probablement pas exhaustifs, ni même objectifs. « Pour écrire l’histoire de sa vie, il faut d’abord avoir vécu ; aussi n’est-ce pas la mienne que j’écris », livre Alfred de Musset aux premières lignes de La Confession d’un enfant du siècle, son roman autobiographique. Comme lui, nous ne prêtons pas allégeance au passé. Nous n’essaierons pas de tout dire. Mais nous serons, autant que possible, fidèles aux faits.


Une question d’apparence simple nous a longtemps laissés sans voix. Avoir cent ans, qu’est-ce que c’est ?Pour un être humain, le phénomène est presque ordinaire. Jamais le monde n’avait compté autant de centenaires. À l’échelle d’un journal, c’est une autre histoire, plus tragique. L’ère du numérique et de l’instantané a fait du papier une relique d’un...

commentaires (2)

Excellente vidéo. Et vous êtes et nous sommes encore là! Merci l’Orient-le Jour, celui de mes souvenirs et de mon présent.??

De Chadarévian Simone

21 h 07, le 28 février 2024

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Commentaires (2)

  • Excellente vidéo. Et vous êtes et nous sommes encore là! Merci l’Orient-le Jour, celui de mes souvenirs et de mon présent.??

    De Chadarévian Simone

    21 h 07, le 28 février 2024

  • L’ère du numérique et de l’instantané nous a en effet fait perdre le parfum du papier si spécial qui nous permettait de lire notre quotidien dans son fond doucement et calmement .

    Antoine Sabbagha

    18 h 52, le 28 février 2024

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