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Culture - Les recommandations culturelles de L’OLJ

Le jazz soufi de Mounir Troudi à Saïda, Beyrouth et Tripoli

Pour ses 10 ans et sa nouvelle saison, Station Beirut s’offre une parenthèse de jazz soufi avec le trio de Mounir Troudi.

Le jazz soufi de Mounir Troudi à Saïda, Beyrouth et Tripoli

Mounir Troudi et son Sufi Jazz Trio donnent le coup d’envoi décalé de cette saison d’hiver à Station Beirut. Photo DR

S’il est un domaine au Liban où la résurrection est récurrente, c’est bien la culture, où les protagonistes ne baissent jamais les bras, peu importe l’ampleur de l’adversité. Mieux encore : cette adversité semble, à chaque épisode ardu, stimuler tous les acteurs de la scène à reprendre du poil de la bête.

C’est le cas de Nabil Canaan qui pilote Station dont c’est le 10e anniversaire. Dernière entrave en date : les événements du 7 octobre 2023 qui ont empêché le trio du chanteur tunisien Mounir Troudi de se produire à Beyrouth sur les dates retenues. Initialement prévue pour novembre 2023, la tournée au Liban organisée par la plateforme de Station, Shuruq Music, a été ajournée a priori, sine die, mais c’était sans compter avec la volonté et l’engagement de cet artiste pour qui le jazz soufi respire, au-delà de sa transcendance, une sorte de joie apaisante. Mounir Troudi était déterminé à ce que ni le froid ni la situation qui prévalent dans la région ne puissent avoir raison de ce rendez-vous avec son public levantin.

Mounir Troudi et son Sufi Jazz Trio donnent donc le coup d’envoi décalé de cette saison d’hiver à Station Beirut avec un répertoire qui reflète cette musique mystique, à la croisée de l’électro jazz et des influences bédouines, qui pour lui sont l’authentique musique tunisienne, celle qui régnait avant que les beys n’imposent leurs soirées orientales.

Le multi-instrumentiste français Sig aux claviers, violoncelle et effets. Photo DR

Né durant la période de mai 68, Mounir Troudi est un enfant de la révolution. Il sera aussi un adulte happé par la révolution tunisienne. Issu d’une lignée de chanteurs, il grandit bercé par la musique. Artiste engagé, il mène des actions humanitaires en pleine révolution tunisienne et va régulièrement livrer des médicaments pendant la guerre dans les hôpitaux libyens frontaliers avec la Tunisie. Un engagement qu’il prend avec le Liban aussi, ainsi qu’avec la Palestine, pour lesquels il prend fait et cause. Il tenait à s’y rendre à tout prix « pour ce qu’il peut lui donner avec sa voix, sa musique, et ce qu’il peut emporter avec lui ou recevoir surtout », confie-t-il à L’Orient Le Jour. Un engagement qu’il n’a de cesse de défendre à travers sa musique soufie qu’il veut désacraliser, histoire de se libérer de toute contrainte. « Le sacré est en nous, il n’y a pas de sacré qu’on reçoit », affirme celui qui réfute le terme de musique soufie. « Je n’aime pas ce terme, en fait, il n’existe pas pour moi, il n’y a que le soufisme, la musique permet de s’exprimer en tant que soufi et de faire réagir le monde avec cette idée d’ouverture », explique l’artiste qui distingue deux formes de soufisme, « la philosophique et la folklorique qui permet de brasser des bénéfices ; la seule musique qui vaille est celle qui pousse les gens à être plus sincères, c’est cela le vrai sens du soufisme, accepter le mal comme le bien ». Une musique prétexte/outil comme il se plaît à l’appeler, celle qui lui permet de dépasser les frontières, les cultures, d’engendrer cette contamination de rébellion. « En deux mots, je suis soufi free style », lance-t-il, enthousiaste, avant d’élaborer sur « une musique qu’il choisit et qui l’a choisi », et qu’il porte au-delà de sa propre définition, lui qui a toujours affectionné les incursions dans divers genres musicaux. Une musique qu’il bouscule, épure et transgresse avec des harmonies asymétriques. En témoignent, entre autres, ces nombreuses collaborations, dont une notoire sur deux albums du label Blue Note avec le trompettiste suisse Erik Truffaz, habitué de la scène musicale au Liban, et une autre avec Brian Eno du groupe Roxy Music, ainsi que le saxophoniste américain Archie Shepp qui lui aussi était passé par le pays en 2004 avec Liban Jazz à la belle époque ou ce qui semblait l’être.

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Pour cette tournée, Mounir Troudi est accompagné du batteur letton Artis Orubs et du multi-instrumentiste français Sig aux claviers, violoncelle et effets qui se déclare « amoureux du Liban » et ajoute : « Si on peut donner de l’amour, même si la situation est compliquée, c’est le plus important, et notre dissonance est une forme de liberté. » « Le plus important est notre communication, la qualité de nos vers, de nos poésies, des échanges d’harmonies qui peuvent se superposer et créer des dissonances comme dans la vie », raconte Sig. Le trio, selon Mounir Troudi, a en partage ce soufisme qu’il qualifie d’action révolutionnaire. En d’autres termes, il prône la liberté et le respect de l’autre. « La sagesse, c’est un engagement, c’est être là au moment où il le faut », insiste Mounir Troudi. Sig, pour sa part, relève que souvent le trio compose sur scène, il n’improvise pas, et que la qualité de leur batteur Artis Orubs sauve toujours la mise en cas de dérapage. Artis Orubs affirme d’ailleurs connaître leurs exigences et la direction qu’ils prennent dans ce langage à l’unisson.

Le groupe, qui n’en est donc pas un formellement, se réunit une fois l’an pour partir en tournée. Et cette fois, elle les emmenés à Riga, Copenhague et Istanbul, d’où il arrive au Liban pour trois dates dans trois lieux distincts.

Le batteur letton Artis Orubs. Photo DR

Nabil Canaan explique que Station a pris le parti de programmer des artistes locaux et internationaux qui repoussent les frontières des genres. Des pointures du jazz contemporain comme le pianiste norvégien Bugge Wesseltoft, le trompettiste suisse Erik Truffaz, qui s’est d’ailleurs produit avec Sig en 2019, et de nouveau Sig en 2023, en duo avec le batteur Fouad Afra, ainsi que le pianiste suisse Marc Perrenoud y ont notamment été invitées.

Mounir Troudi en trio sera en concert le jeudi 1er février au Hammam al-Jadeed à Saïda, le vendredi 2 février à Station Beirut et le samedi 3 février à Stereo Kawalis à Tripoli. Portes ouvertes à partir de 21 heures.

Les billets sont en vente chez Antoine et à la porte.

S’il est un domaine au Liban où la résurrection est récurrente, c’est bien la culture, où les protagonistes ne baissent jamais les bras, peu importe l’ampleur de l’adversité. Mieux encore : cette adversité semble, à chaque épisode ardu, stimuler tous les acteurs de la scène à reprendre du poil de la bête.C’est le cas de Nabil Canaan qui pilote Station dont c’est le 10e...

commentaires (1)

Mounir Troudi et son Sufi Jazz Trio, n'aiment pas associer le Soufisme à la musique...il faudra qu'il se decide ou qu'il change le nom du trio;)

Kaldany Antoine

05 h 12, le 02 février 2024

Tous les commentaires

Commentaires (1)

  • Mounir Troudi et son Sufi Jazz Trio, n'aiment pas associer le Soufisme à la musique...il faudra qu'il se decide ou qu'il change le nom du trio;)

    Kaldany Antoine

    05 h 12, le 02 février 2024

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