Comme un air de déjà-vu. Lors de son discours dimanche, le secrétaire général du Hezbollah Hassan Nasrallah a repris dans les grandes lignes les points forts de son allocution du vendredi 5 janvier, réaffirmant son ouverture à un règlement politique au Liban-Sud avec Israël après la fin de la guerre à Gaza. « Mettez fin à l’agression israélienne à Gaza et nous parlerons par la suite », a-t-il affirmé à l’intention des puissances occidentales, les Américains en tête, qui essayent d’éviter une escalade des affrontements entre l’État hébreu et le parti chiite via un accord diplomatique.
« Ils essayent de nous faire peur et nous obliger à arrêter les combats immédiatement en disant qu’Israël va finir par mener une guerre contre le Liban, a affirmé le chef du Hezbollah lors de sa prise de parole. Toutefois, nous répondons que nous n’avons pas peur de la guerre. Au contraire, cela fait depuis le 8 octobre (date à laquelle la milice chiite a rejoint les affrontements pour soutenir le Hamas palestinien) que nous sommes prêts à cette éventualité. » Il a, dans ce cadre, appelé à avoir peur pour « Israël et pas pour le Liban ». Et d’ironiser : « Les émissaires nous disent même que, dans le cadre de leur passage à la troisième phase de la guerre, les Israéliens ont retiré six de leurs divisons militaires à Gaza pour les stationner à la frontière avec le Liban... Ces soldats, fatigués et démotivés, sont les bienvenus. »
Le leader chiite a pris le parole lors d’une cérémonie d’hommage à Wissam Tawil, un commandant militaire du Hezbollah tué par Israël la semaine dernière. Son allocution intervient quelques jours après la visite éclair d’Amos Hochstein, l’émissaire présidentiel américain, qui propose de calmer la situation au Liban-Sud en délimitant la frontière terrestre entre le Liban et Israël, dans le cadre d’un « package deal » comprenant également l’élection d’un président de la République et la reprise économique, plus de quatre ans après le début de la crise financière. Lors de cette tournée, le diplomate US a été informé par les Libanais, notamment le Premier ministre sortant Nagib Mikati et le chef du Parlement Nabih Berry, qu’aucun accord n’était possible avant l’arrêt des affrontements à Gaza. Dès lors, M. Hochstein évoque une « solution médiane temporaire » le temps qu’un accord définitif puisse être mis sur la table. Selon le quotidien pro-Hezbollah al-Akhbar, citant des « visiteurs de Nabih Berry », il a proposé une solution intérmédiaire liée à l’arrêt progressif des hostilités à Gaza qui se reflétera au Liban-Sud. Le maître du perchoir aurait également affirmé qu’il était favorable à une application complète de la résolution 1701 du Conseil de sécurité, qui prévoit d’éloigner le Hezbollah de la frontière en échange du respect par Israël de la souveraineté libanaise, mais qu’aucune négociation n’est possible sans règlement de la question des fermes de Chebaa, qui fait l’objet d’une contestation entre Beyrouth et Damas, mais occupée par Tel-Aviv depuis 1967.
« Les sacrifices du jihad »
Hassan Nasrallah a d’ailleurs fait savoir que la condition posée par le Hezbollah s’applique également aux autres groupes de l’axe pro-iranien. « Tant que l’agression à Gaza n’est pas terminée, tous les fronts de soutien resteront mobilisés », a-t-il insisté, endossant une nouvelle fois, mais de façon encore plus claire, son rôle de commandant en chef de la « résistance » inspirée de Téhéran. « Si on continue dans cette voie, que ce soit à Gaza, en Cisjordanie, au Liban, au Yémen ou en Irak, le gouvernement ennemi n’aura d’autre choix que d’accepter les conditions de la résistance, et donc de mettre fin à son agression et de négocier », a-t-il estimé. C’est d’ailleurs lui qui a annoncé que des factions irakiennes sont responsables de l’explosion survenue dimanche matin dans la ville portuaire de Haïfa, dans le nord d’Israël généralement visé par le Hezbollah (peut-être pour se décharger de toute responsabilité). Il s’est également fait le porte-parole des houthis yéménites, frappés en fin de semaine par les Américains et les Britanniques en riposte aux opérations qu’ils mènent en mer Rouge contre les navires israéliens ou se dirigeant vers l’État hébreu. « Alors que les Yéménites avaient assuré que les navires sans lien avec Israël pouvaient se déplacer librement, les Américains ont transformé la mer Rouge en champ de bataille, nuisant à tout le trafic maritime », a-t-il menacé. Toutefois, le dignitaire chiite a, encore une fois, insisté sur le fait que l’Iran n’était pas derrière ces opérations, ne contrôlant, selon lui, pas les agissements de ses « alliés ».
Mais outre les Américains, et comme c’était le cas la semaine dernière, Hassan Nasrallah s’est également adressé lors de son allocution à sa base populaire, frappée de plein fouet par les affrontements en cours entre Israël et le Hezbollah. « Des familles ont dû quitter leurs maisons en portant leurs meubles sur le dos. Ces familles sont résilientes, car il n’est pas du tout facile d’être loin de sa maison, son village, son école... Ça fait partie des sacrifices du jihad », a-t-il déclaré, comme lorsqu’il s’agit de remonter le moral à des combattants. « Je vous dis que vos sacrifices ne sont pas vains, au contraire, ils ont des effets sur toute la région », a-t-il ajouté, soulignant l’importance de la solidarité et de l’entraide entre les adhérents du parti. Tout au long de son discours, Hassan Nasrallah a également montré Israël comme étant beaucoup plus impacté par les attaques du Hezbollah qu’il n’y paraît. « Le gouvernement de Benjamin Netanyahu fait preuve de mutisme sur les pertes israéliennes, au Liban comme à Gaza », a-t-il affirmé, estimant que le nombre de soldats tués par sa milice est « de deux à cinq fois plus élevé » que le chiffre officiel (neuf soldats). « Par exemple, a-t-il dit, dans notre attaque contre la base de Meron, 18 des 20 missiles Kornet lancés ont atteint leur cible, tuant des soldats israéliens, ce qu’Israël n’a jamais reconnu. » L’opération contre cette base a été présentée par le Hezbollah comme une réplique à l’assassinat, le 2 janvier, de Saleh el-Arouri, numéro deux du Hamas, en pleine banlieue sud de Beyrouth. C’est en réponse à cette frappe qu’Israël a éliminé Wissam Tawil, décrit comme la tête pensante derrière les tirs sur le Meron, auquel Nasrallah a rendu hommage dans son discours. Pas un mot, par contre, sur une riposte potentielle à son assassinat.
commentaires (19)
Il me semble que HN a parlé aussi des journalistes et généraux de l'entité sioniste. Parler de soldats démotivés, cela me fait rire.
Dorfler lazare
17 h 11, le 15 janvier 2024