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Moyen-Orient - ÉCLAIRAGE

Après l’assassinat de Saleh el-Arouri, les gains politiques de Netanyahu

Avec l’élimination du numéro deux du Hamas, le gouvernement israélien peut clamer une victoire stratégique, tout en justifiant la poursuite de la guerre.

Après l’assassinat de Saleh el-Arouri, les gains politiques de Netanyahu

Le Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahu, entouré de soldats dans un lieu non divulgué de la bande de Gaza, le 26 novembre 2023. Photo Bureau du Premier ministre israélien/AFP

Israël avait prévenu. Le 22 novembre déjà, Benjamin Netanyahu avait déclaré, lors d’une conférence de presse à Tel-Aviv, avoir donné pour instruction au Mossad, le renseignement extérieur, « d’agir contre les dirigeants du Hamas où qu’ils se trouvent ». Plus d’un mois après, Saleh el-Arouri, numéro deux du mouvement islamiste et confondateur de sa branche armée, les brigades al-Qassam, est tué au cours d'une frappe attribuée à Israël - non revendiquée - dans la banlieue sud de Beyrouth. Ce qui constitue l’assassinat du plus haut commandant du Hamas depuis l’opération Déluge d’al-Aqsa le 7 octobre et le premier en dehors de Gaza. À peine 24 heures plus tard, le chef du Mossad renchérit, affirmant que son service « s’engage à régler ses comptes avec les meurtriers qui sont descendus sur la lisière de Gaza ».

Si les officiels israéliens avaient donné le ton, le coup de mardi soir s’avérait risqué, alors que l’attaque, menée sur le sol libanais, a davantage alimenté le scénario d’un embrasement régional. L’État hébreu aurait certes fait le calcul selon lequel le Hezbollah et l’Iran ne souhaitent pas se diriger vers cette éventualité, selon plusieurs observateurs, et parié de l’autre côté sur les gains découlant de l’élimination de Saleh el-Arouri.

Narratif d’une victoire

Près de trois mois après le début de la campagne militaire israélienne menée à Gaza en riposte à la triple incursion du Hamas sur son territoire, l’État hébreu reste loin de ses objectifs d’« anéantir » le mouvement islamiste, bien que Tel-Aviv insiste régulièrement sur le fait que l’offensive pourrait se poursuivre de nombreux mois. Si Israël se targue d’avoir détruit de nombreux tunnels du Hamas, ses cibles privilégiées à Gaza, à l’instar de Yahya Sinouar ou Mohammad Deif, n’ont toujours pas été abattues. Face à cette situation, il peut brandir la victoire de l’élimination de Saleh el-Arouri. « Son assassinat est un moyen pour Israël de montrer ses capacités militaires, surtout si l'on considère qu'en trois mois de guerre, les réalisations qu'il peut mettre en avant à Gaza sont très tactiques et ne signent pas une percée stratégique, observe Mairav Zonszein, chercheuse américaine à l'International Crisis Group. D'une certaine manière, cette élimination est donc avant tout un moyen de consolider un peu plus le récit d'une victoire à ce stade ».

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Ce succès est d’autant plus nécessaire à Israël pour envoyer un double message à l’opinion publique mondiale et à sa propre population. Alors que les critiques extérieures s’intensifient face aux images qui parviennent de Gaza et au bilan de plus de 22 400 morts annoncé par le Hamas, le mécontentement s’affiche au grand jour sur la scène interne. Depuis le début de la séquence, au moins 175 soldats israéliens sont morts dans l’enclave palestinienne. Une grande partie des Israéliens s’insurge également quant au sort des près de 130 otages restants à Gaza, dont une vingtaine a été déclarée morte par Tel-Aviv, tandis que plus d’une centaine avait été libérée fin novembre dans le cadre d’un accord négocié indirectement avec le Hamas.

Accusé de négligence, l’État hébreu a accentué la colère de sa population lorsque le mouvement islamiste a déclaré le 8 décembre qu’un captif israélien avait été tué dans l’enclave au cours d’une tentative de sauvetage des forces israéliennes. « À ce stade, il n'est pas possible de déterminer les circonstances de la mort de Sahar (Baruch), et on ne sait pas s'il a été tué par le Hamas ou par les tirs de nos forces », a déclaré l’armée dans un communiqué. Suscitant encore la polémique, les trois otages tués par erreur par Israël dans la banlieue est de la ville de Gaza à la mi-décembre avaient hissé un drapeau blanc et étaient torse nu lorsqu'ils ont été abattus, a déclaré par la suite l’armée israélienne. 

Temps long

L’assassinat de Saleh el-Arouri est en outre intervenu au lendemain d’une défaite majeure pour le gouvernement Netanyahu dont la très controversée réforme judiciaire avait provoqué chaque semaine des mobilisations massives dans le pays avant le déclenchement de la guerre. Lundi, la Cour suprême a rejeté à une courte majorité un volet phare de cette réforme. S’opposant à sept de leurs pairs, huit juges ont annulé une mesure, adoptée par la Knesset fin juillet, qui limitait leur propre pouvoir de bloquer les décisions de l’exécutif jugées « déraisonnables ». Immédiatement après la décision de lundi, le Likoud au pouvoir et ses alliés de coalition ont fustigé le revers de la Cour suprême, arguant que les débats liés à la réforme judiciaire devraient être traités après la fin de la guerre. Deux jours plus tard, la plus haute instance judiciaire a néanmoins retardé à l’élection du prochain Parlement la promulgation d’une autre loi de ce chantier limitant la possibilité de déclarer un Premier ministre inapte à sa charge et de le démettre de ses fonctions.

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C'est un nouveau coup dur pour le chef du gouvernement. Car depuis le début de la séquence, Benjamin Netanyahu - lui-même mis en cause dans trois affaires judiciaires et qui a vu son procès pour corruption reprendre à Jérusalem début décembre - joue le temps long. « Le plan de Netanyahu est de faire en sorte que l’idée de la victoire ne soit pas clairement définie et que la guerre se prolonge en une guerre d’usure », commente Mairav Zonszein. La campagne militaire israélienne à Gaza est récemment entrée dans sa troisième phase, qui devrait être de plus faible intensité et notamment axée sur l’élimination dirigée de ses cibles. À cet égard, la frappe ayant tué Saleh el-Arouri peut permettre à Israël de justifier la longue durée de la guerre au vu du succès obtenu et de l’élimination potentielle d’autres responsables du Hamas ou de « l’axe de la résistance » dans le futur.

Deal d’otages

Avec cette attaque, Benjamin Netanyahu peut également chercher à rassurer ses partenaires ultranationalistes en réaffirmant son indépendance vis-à-vis de son soutien américain. Selon deux responsables de Washington récemment cités par Axios, l’administration Biden n’avait pas été prévenue à l’avance de l’assassinat de Saleh el-Arouri, tandis qu’un haut responsable israélien a indiqué au média qu’Israël avait informé Washington « au moment où l’opération se déroulait ».

Alors que les États-Unis ont récemment accru la pression sur leur allié israélien pour passer à une nouvelle phase de la guerre, les ministres des Finances, Bezalel Smotrich, et de la Sécurité nationale, Itamar ben-Gvir, menacent régulièrement de quitter la coalition si les autorités n’adoptent pas une ligne dure dans la guerre en cours. Au cours des derniers jours, Washington a durci le ton face aux déclarations jugées « incendiaires » des partenaires de la coalition d’extrême-droite de Benjamin Netanyahu liées au déplacement de la population gazaouie.

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Mais si le chef du gouvernement israélien peut calmer un temps le mécontentement à son encontre, la frappe de mardi soir est loin de dissiper tous les problèmes. D’une part, l’élimination de Saleh el-Arouri risque de compliquer la possibilité d’un nouveau cycle d’échange de prisonniers palestiniens et d’otages israéliens, alors que plusieurs médias palestiniens ont indiqué que le Hamas a demandé après mardi soir aux médiateurs de geler les efforts de négociation qui progressaient ces derniers jours. Selon une source égyptienne au fait des discussions citée par The New Arab, la visite d’une délégation israélienne au Caire - l’un des médiateurs aux côtés de Doha et Washington - pour discuter d’un nouveau deal a été écourtée après l’assassinat de Saleh el-Arouri. « Les opérations militaires israéliennes ne jouent pas en faveur de la libération des otages mais Israël continue de prétendre que cela est le cas », note Mairav Zonszein.

Face à un certain consensus au sein de la société israélienne sur le fait que les problèmes internes doivent être réglés à l’issue de la guerre, la population israélienne risque à nouveau de diriger sa colère contre le Premier ministre en cas de retard ou de non-aboutissement d’un deal sur les otages. Selon une enquête d’opinion conduite à la mi-décembre par l’Institut israélien de la démocratie, 69 % des personnes interrogées, y compris une majorité d’électeurs de droite, souhaitent la tenue d'élections immédiatement après la fin de la guerre.

Israël avait prévenu. Le 22 novembre déjà, Benjamin Netanyahu avait déclaré, lors d’une conférence de presse à Tel-Aviv, avoir donné pour instruction au Mossad, le renseignement extérieur, « d’agir contre les dirigeants du Hamas où qu’ils se trouvent ». Plus d’un mois après, Saleh el-Arouri, numéro deux du mouvement islamiste et confondateur de sa branche armée,...

commentaires (3)

Il y a eu 4 génocides au XXème siècle On entend par génocide la destruction totale ou partielle d’un groupe national, ethnique, racial ou religieux. Le terme génocide apparaît au cours de la Seconde Guerre mondiale, lorsque le juriste polonais Raphael Lemkin caractérise, en 1944, « la pratique de l’extermination de nations et de groupes ethniques ». Le terme « génocide » a par la suite été employé rétrospectivement pour le massacre systématique des Herero et Nama dans le Sud-Ouest africain allemand (1904-1908), celui des Arméniens par les Turcs (1915-1916), et enfin le Rwanda

Dorfler lazare

12 h 27, le 05 janvier 2024

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Commentaires (3)

  • Il y a eu 4 génocides au XXème siècle On entend par génocide la destruction totale ou partielle d’un groupe national, ethnique, racial ou religieux. Le terme génocide apparaît au cours de la Seconde Guerre mondiale, lorsque le juriste polonais Raphael Lemkin caractérise, en 1944, « la pratique de l’extermination de nations et de groupes ethniques ». Le terme « génocide » a par la suite été employé rétrospectivement pour le massacre systématique des Herero et Nama dans le Sud-Ouest africain allemand (1904-1908), celui des Arméniens par les Turcs (1915-1916), et enfin le Rwanda

    Dorfler lazare

    12 h 27, le 05 janvier 2024

  • Le génocide à Gaza ainsi que les arrestations massive dans les autres régions occupées montre bien qu'Israel planifit d'en finir avec les Arabes, une fois pour toute. Il ne s'agit plus d'éliminer Hamas. Plus d'un million et demie de la population autochtone fut déplacé. Pas de retour possible à leur foyer. Sur ce plan, et uniquement sur ce plan, Israël a certainement gagné son pari.

    Raed Habib

    08 h 42, le 05 janvier 2024

  • Exit, Netanyahu des prochaines élections e sortie honteuse direction prison d’israël et possibilité d’y inclure son épouse poursuivisme. Le likoud, c’est fini, et par son exclusion, les extrémistes n’auront plus droits au chapitre. La paix des braves se fera et deux états se reconnaissants mutuellement se fera.

    Mohamed Melhem

    05 h 25, le 05 janvier 2024

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