Ça y est ! Après une semaine bien remplie de projections, de rencontres et de marques de soutien à la Palestine, la sixième édition du festival d’el-Gouna vient de se clôturer. Le palmarès a été rendu : des films uniques et puissants venus des quatre coins du monde ont glané des prix très attendus.Les sœurs libanaises Michelle et Noel Keserwany, qui continuent de rafler les mises avec leur court-métrage Les Chenilles, ont décroché le prix du meilleur court-métrage arabe, tandis que le réalisateur philippin Sam Manasca a décroché l’Étoile d’or avec Cross my hand and hope to die.
Côté long-métrage, le film sud-coréen In our day, de Hong Sangsoo, a remporté l’Étoile d’or tandis que l’émouvant dessin d’animation A Greyhound of a girl de l’Italien Enzo D’Alò a obtenu l’Étoile d’argent. Pour ce qui est de l’Étoile de bronze, c’est un film brésilien, A Strange Path, de Guto Parente, qui l’a décrochée haut la main.
Dans la catégorie des documentaires, l’Égyptien Ibrahim Nash’at n’est pas parti les mains vides, et s’est vu décerner l’Étoile d’argent ainsi que le FIPRESCI prize (International Federation of Film Critics) pour Hollywoodgate.
Le fameux Cinema for humanity audience award a été accordé au film dramatique Goodbye Julia du réalisateur soudanais Mohammad Kordofani.
Le festival aux prises avec un climat tendu
Au vu des massacres à Gaza qui n’ont cessé de s’intensifier depuis les attaques du 7 octobre, le festival, censé se dérouler du 13 au 20 octobre, a annoncé sur Instagram avoir été reporté pour les dates du 27 octobre au 2 novembre sans mentionner explicitement son soutien pour la Palestine. Ce post a provoqué un tollé dans les commentaires de la majorité, dénonçant la « lâcheté » du comité de ne pas prendre parti. Une semaine plus tard, en déclarant cette fois-ci son profond soutien à la population de Gaza, le festival a informé qu’il reportait une nouvelle fois l’édition de son programme pour les dates du 14 au 21 décembre. Par respect pour ce qui se déroule dans les territoires voisins, cet événement, connu pour ses célébrations grandioses, a annoncé l’annulation de toutes les festivités pour toute la semaine.
Une édition spéciale Palestine
En plus de son programme déjà prévu depuis plusieurs mois, le festival a organisé une programmation spéciale dédiée au cinéma palestinien en collaboration avec le Palestine Film Institute, dans le but de mettre en lumière la situation actuelle à Gaza. Sous le nom de « Window on Palestine », des films en plusieurs formats englobent plusieurs thématiques à travers différentes périodes, un volet du festival qui aspire à faire entendre des voix marginalisées et à mettre en lumière les obstacles rencontrés par les Palestiniens.
Le public a ainsi eu l’opportunité de découvrir Bye Bye Tiberias (2023) de Lina Soualem, qui représente la Palestine aux Oscars 2024 et retrace le parcours de femmes palestiniennes à travers les générations. De même que le film Drawing for Better Dreams (2015) de May Odeh qui dépeint les luttes des enfants palestiniens dans les territoires occupés à travers des dessins animés d’enfants. Ou encore le premier long-métrage The Teacher (2023) de Farah Nabulsi, qui résume les frustrations quotidiennes des Palestiniens avec Saleh Bakri en tête d’affiche.
Une discussion accompagnant ce programme de films, « Camera in Crisis : Un regard sur la Palestine », a exploré la complexité de la réalisation de films en Palestine. Les cinéastes Rashid Mashharawi, Najwa Najjar, Khalil al-Mozian et l’acteur Ahmed al-Munirawi ont partagé leurs expériences et évoqué les défis uniques rencontrés au cours du processus de tournage.
La musique pour rendre hommage aux Gazaouis
« Je n’ai plus les mots, que puis-je dire de plus ? / Mes larmes ont desséché et mon cœur est brisé / Je suis loin mais je continue à prier pour vous. » C’est avec les paroles de sa nouvelle chanson bouleversante Ghosn Zeytoun (Branche d’olivier) que la chanteuse Elyanna a ouvert le festival. Ce morceau poignant rend hommage à son pays détruit par les ravages de la guerre. Devant un public transporté par sa voix pure et puissante, la jeune femme exprime la douleur de son peuple en perpétuelle souffrance.
La chanson The World is Blind, interprétée par le chanteur égyptien Abu lors de la cérémonie d’ouverture, a été désignée comme hymne du festival dans le cadre du « Cinema for humanity », slogan de cet événement depuis 2017. Dans le but de toucher un plus grand public, il a offert une interprétation puissante en anglais en évoquant l’aveuglement du monde face aux enfants de Gaza qui sont injustement tués depuis plus de deux mois.
Et le tapis rouge pour dénoncer et soutenir
Afficher son soutien à la Palestine a mis en péril le travail de nombreuses personnes dans le show-business, ce qui a poussé de nombreuses célébrités à se mettre à l’écart de toute dénonciation. Mais le festival d’el-Gouna, qui a vu un nombre important de ses invités afficher un soutien inconditionnel pour la cause palestinienne – que ce soit en portant le keffieh, en écrivant « Gaza » sur la joue ou en arborant « Stop the massacre » – constitue une exception. Notamment lorsque le festival international du film Red Sea à Djeddah (30 novembre-9 décembre) a préféré ne pas prendre parti et dont le tapis rouge a gardé son éternel principe pour les stars d’afficher leur plus belles et extravagantes tenues.