Des décennies après le défunt « Fatehland », va-t-on vers un « Hamasland » au Liban ? Face à la pression internationale pour qu'il cesse ses opérations militaires sur le front sud et retire la force al-Radwan, son unité d’élite, vers le nord du Litani en application totale de la résolution 1701 du Conseil de sécurité, le Hezbollah – et derrière lui l’axe auquel il appartient – a choisi de répondre à sa manière. Lundi, le Hamas palestinien a annoncé, depuis Beyrouth, la création d’une unité baptisée « Les jeunes du Déluge d'al-Aqsa », dans le but de « confirmer le rôle du peuple palestinien, où qu’il se trouve, dans la résistance à l'occupation par tous les moyens légitimes disponibles ».
Dans son communiqué, le Hamas invite « les jeunes et les hommes de notre peuple à se joindre aux jeunes résistants et à participer à la construction de l'avenir et à la libération de Jérusalem et de la Mosquée al-Aqsa ». En pleine guerre entre le mouvement palestinien et Israël, cette annonce sonne comme un retournement contre de nombreuses résolutions internationales, mais aussi contre l'accord de Taëf et la Constitution. On peut même y voir une réédition du scénario de 1969, lorsque l'accord du Caire a été signé, octroyant une légitimité à la lutte armée palestinienne depuis le Liban-Sud.
Un tollé au Liban
L’annonce a donc sans surprise suscité une pluie de réactions sur la scène politique, la plupart condamnant une démarche qui viole la souveraineté libanaise et qui pourrait conduire à la création de foyers armés incontrôlés dans les camps palestiniens. À commencer par le chef du Courant patriotique libre, Gebran Bassil, pourtant allié du Hezbollah. « Nous rejetons catégoriquement la création de cette unité par le Hamas et estimons que toute action armée à partir du Liban est une atteinte à la souveraineté nationale », a-t-il écrit sur son compte X. « Le Liban a le droit de se renforcer par sa “résistance nationale” pour se défendre contre Israël. Il s'affaiblit en permettant la création d’un “Hamasland” dans le Sud », a souligné le chef du CPL. À son tour, le leader des Kataëb, Samy Gemayel, s’est indigné de la démarche du Hamas. « L’unité des jeunes d’al-Aqsa (devrait être créée) en Palestine, pas au Liban, ni à partir du Liban », a-t-il écrit sur X. « Nous ne reviendrons pas à un temps révolu », a-t-il martelé. Ghayath Yazbeck, député des Forces libanaises, a lui aussi mis en garde contre « l’arrivée des Jeunes d’al-Aqsa au Liban-Sud et le fait de laisser le champ libre au Hamas ». « Le Liban qui ne tolère pas les infractions du Hezbollah n’acceptera pas que sa souveraineté soit violée par le Hamas. Seule l’armée (doit être présente) au Liban-Sud », a-t-il dit. Achraf Rifi, député sunnite relevant de l’opposition, a lui aussi critiqué « une grave erreur qui devrait être rectifiée ». D’autant que la démarche « ne sera pas bénéfique à la cause palestinienne que l’axe de la moumanaa instrumentalise pour ses propres fins », a-t-il écrit sur son compte X.
Face au tollé, le représentant du Hamas au Liban, Ahmad Abdel Hadi, a tenté, mardi, de rectifier le tir. Multipliant les déclarations médiatiques, il a indiqué qu’il ne s’agissait pas d’une unité militaire visant à recruter des jeunes afin qu’ils prennent part à la « résistance armée ». « C’est un cadre populaire visant uniquement à encadrer les jeunes palestiniens qui ont été nombreux à vouloir rejoindre le Hamas après le 7 octobre et à profiter de leurs compétences scientifiques et artistiques », a-t-il dit. M. Abdel Hadi a démenti toute volonté de prendre le contrôle, à travers cette démarche, des camps palestiniens au Liban. « Nous assurons que nous n’envisageons aucun retour en arrière. Cette annonce ne veut pas dire un “Hamasland” ni une violation de la souveraineté du Liban, car cette page a été tournée », a-t-il affirmé. Réagissant à ces propos, le Premier ministre Nagib Mikati a déclaré en réponse à une question lors d’un point de presse : « Cette démarche est totalement rejetée, et nous ne l'accepterons en aucun cas. Mais les personnes concernées ont clarifié aujourd’hui que l'intention n'était pas militaire. »
L’annonce du Hamas a même été commentée de l’autre côté de la frontière. « Quel État préfèrent les Libanais, le « Hamasland », qui fait partie de l'« Iranland », ou l'État libanais libre et indépendant ? », a écrit le porte-parole arabophone de l'armée israélienne, Avichay Adraee, sur son compte X, ne manquant pas de rappeler, en s’adressant aux Libanais, le fameux slogan palestinien lancé durant la guerre civile libanaise : « La route de Jérusalem passe par Jounié ». Il a également estimé que la démarche du Hamas a « reçu le soutien et la bénédiction du Hezbollah », « ce qui signifie que le Liban se dirige vers l'inconnu ».
Le message du Hezbollah
Sauf que dans les milieux du camp pro-iranien, on affirme ne se soucier guère des menaces. Le Hezbollah ne s'attarde pas non plus aux appels à la création d'une zone démilitarisée à la frontière sud et au respect de la 1701, arguant que c'est Israël qui viole la résolution onusienne. En ce qui concerne les menaces israéliennes de mener une invasion terrestre pour éloigner le Hezbollah au nord du Litani, le parti affirme se préparer à toutes les éventualités. « Nous sommes prêts à mener une bataille intense et féroce pour empêcher les Israéliens, qui ont échoué à atteindre leurs objectifs militaires dans la bande de Gaza, de le faire au Liban », affirme une source proche du Hezbollah. Et d'ajouter : « Le Hezbollah a répondu à tous les messages qu'il a reçus en affirmant que les opérations qu'il mène dans le Sud sont en solidarité avec le peuple palestinien, et que si les combats à Gaza cessent, ce sera le retour au statu quo d’avant le 7 octobre, et il n'y aura donc plus besoin de parler de la résolution 1701 ». La source ajoute que le Hezbollah « refuse catégoriquement tout marchandage entre l'application de la résolution internationale et la présidence de la République ou tout autre dossier politique ». Il estime en effet qu'il lui est « impossible de compromettre sa liberté de mouvement et sa sécurité dans le Sud, ou de soumettre sa présence stratégique dans la région à des critères politiques », même si cela lui permettrait d’élire son candidat, Sleiman Frangié, à Baabda.
L'annonce du Hamas, qui a sûrement reçu l'aval du Hezbollah, semble même être la riposte du parti chiite à la pression et aux menaces internationales. Car, au-delà des précisions du porte-parole du mouvement palestinien, cette démarche en temps de guerre ouvre la porte au recrutement des combattants et des résistants de tous les pays de la région afin de rejoindre les opérations menées à partir du territoire libanais. Du Sud en particulier. Le Hezbollah semble vouloir tirer profit de la position du Hamas, que ce soit à Gaza ou au Liban, pour attirer, à travers le mouvement frériste, une large partie de l'opinion publique sunnite, très sensible à la cause palestinienne. C'est dans cette optique que s'inscrit la création des « Jeunes du Déluge d'al-Aqsa », à l’heure où le Hezbollah travaille, selon des informations obtenues par notre journal, à former de nouveaux groupes sous le nom de « Jeunesse de l'unité des fronts ». « Cela signifie que la scène libanaise est devenue grand ouverte aux opérations contre Israël, dans une reproduction de l'expérience des organisations palestiniennes avant et pendant la guerre civile », dénonce une figure politique opposée au Hezbollah. Mais le plus important, c'est que cette démarche peut également être liée à la possibilité de voir des combattants du Hamas sortir de Gaza, en cas de poursuite des opérations militaires israéliennes visant à les en déloger. Le Sud sera alors transformé en sorte de « moumanaaland » incluant plusieurs formations, mais sous l'égide du Hezbollah.
commentaires (16)
QUI FAUT IL MAUDIRE POUR EN ETRE ARRIVE LA? MICHEL AOUN NASRALLAH GEBRAN BASSIL SAAD HARRIRI NABIH BERRY SAMIR GEAGEA MIKATI SLEIMAN FRANGIE JOSEPH AOUN TOUS LES DEPUTES je peux encore lister les noms mais il me faudra encore plus de place que les 208 caracteres restant autorises par l'Orient LA VERITE: FATHLAND A COUTE A TOUS LES LIBANAIS DE TOUTES RELIGIONS ET APPARTENANCE PLUS QU'IL NE POUVAIT SUPPORTER. EN 1975 LES ATTAQUES CAUSEES PAR UN NOMME ARAFAT EST DANS TOUTES LES MEMOIRES ET POUR RIEN AU MOINDE CECI DEVRA SE RENOUVELER AVEC NASRALLAH OU HAMAS .RAPPELER VOUS DONC DE CECI
LA VERITE
14 h 56, le 13 décembre 2023