
Le palais de justice de Baabda, en mars 2022. Photo d'archives Reuters / Ahmad al-Kerdi
Une centaine de juges libanais ont décidé vendredi de suspendre leur travail sine die, afin de protester contre leurs conditions de vie et de travail, dans un pays en pleine crise socio-économique, ont confirmé plusieurs magistrats, sous couvert d'anonymat, à L'Orient-Le Jour.
L'un des juges ayant décidé de protester a précisé qu'un groupe de 111 magistrats ont jusqu'à présent suspendu leurs activités, mais que ce nombre pourrait être appelé à augmenter avec la reprise de l'année judiciaire, le 15 septembre. Il a expliqué que l'une des raisons ayant poussé les juges à cette décision est qu'ils n'ont pas encore pour ce mois les aides financières qu'ils reçoivent d'habitude mensuellement par le canal de la caisse de mutuelle des magistrats, depuis le début de l'année.
Moyens minimum de subsistance
Ces aides s'élèvent à un montant compris entre 500 et 1200 dollars en espèces, en fonction du grade du bénéficiaire, qui vient s'ajouter au salaire mensuel. Selon un magistrat, les juges reçoivent un salaire de maximum six millions de livres libanaises (qui équivaut à 67 dollars au taux du jour sur le marché parallèle).
Selon le juge contacté, « même avec ces aides, nous ne pouvons plus joindre les deux bouts », notamment en raison de la cherté des écoles pour les personnes ayant des enfants, et de celle des frais des soins de santé, que la caisse de mutuelle ne parvient plus à couvrir.
Les juges reçoivent ces aides depuis janvier 2023. C'est après l'approbation de ces versements financiers mensuels qu'ils avaient mis fin à une grève lancée à la mi-août 2022 pour demander un réajustement de leurs salaires.
Dans un communiqué publié sur l'Agence nationale d'Information (Ani officielle), les 111 juges contestataires ont indiqué que cette suspension du travail aura lieu « jusqu'à ce qu'ils puissent obtenir des moyens minimum de subsistance et travailler en toute dignité ». Le texte cite, parmi les raisons de ce mouvement « l'incapacité de l'Etat à couvrir les frais de santé, d'hospitalisation et d'éducation des juges et de leur famille, et les conditions déplorables de travail dans les Palais de justice ».
Un autre magistrat a, pour sa part, relevé auprès de notre publication les difficultés des juges à continuer à travailler dans les conditions actuelles et « en l'absence d'un État de droit ». Il a souligné que si tous les magistrats n'ont pas rejoint le movement de protestation, c'est que « chacun fait ce qu'il peut en fonction de ses capacités à résister, mais jusqu'à quand cela sera-t-il possible ? »
Insalubrité
Un troisième juge a encore déploré les conditions de travail à l'intérieur des Palais de justice, dénonçant l'insalubrité des lieux.
Une source proche du Conseil supérieur de la magistrature (CSM) a, elle, affirmé que le président de cet organe, Souhail Abboud, « continue de déployer tous les efforts possibles pour trouver des solutions », rapportant que des réunions ont eu lieu à cet effet ces dernières semaines entre M. Abboud et le ministre de la Justice, le président du Conseil d'État ou encore le président de la Cour des comptes. Le président du CSM se charge normalement de la bonne organisation administrative de la justice, et non de ce genre de questions d'ordre financier.
Une centaine de juges libanais ont décidé vendredi de suspendre leur travail sine die, afin de protester contre leurs conditions de vie et de travail, dans un pays en pleine crise socio-économique, ont confirmé plusieurs magistrats, sous couvert d'anonymat, à L'Orient-Le Jour. L'un des juges ayant décidé de protester a précisé qu'un groupe de 111 magistrats ont jusqu'à présent...
commentaires (11)
Pourquoi se couvrir d’anonymat et de honte s’ils sont dans leurs droits? C’est plus que louche. Lorsqu’on considère que nos droits sont bafoués, il n’y a aucune honte à les réclamer haut et fort alors c’est quoi le hic? Ils profitent du système et viennent craché dans la soupe pour nous faire croire qu’ils sont lésés comme ce peuple qui peine à voir une justice, une vraie s’appliquer dans son pays d’où leur anonymat?
Sissi zayyat
12 h 39, le 05 septembre 2023