Incident de Kahalé : mes libres réflexions

L’incident de Kahalé a donné libre cours à mes réflexions ci-dessous, lesquelles ne sont pas destinées à plaire, mais à faire réfléchir, ni à prendre le contre-pied de l’opinion chrétienne dominante et des médias « mainstream » dépourvus d’esprit critique, mais à poser le pied sur la terre ferme de la logique et de la vérité.

– Réflexion I : on peut certes qualifier la mort de Fadi Bejjani d’héroïque, mais aussi, selon moi, de tragique et de gratuite car Kahalé n’était pas attaquée par les hordes pro-iraniennes pour devoir être défendu par les armes. Le camion ne faisait que passer son chemin. Certainement que moult autres camions du même acabit avaient précédé... et suivront si la vraie résistance ne se déclare pas, non point la résistance par les armes légères contre des armes illégales lourdes, mais par une révolution du genre 17 octobre, celle qui avait véritablement menacé la formation pro-iranienne. En effet, seule la révolution civile pourra venir à bout de la révolution islamique. Il n’y a pas d’autre solution que l’action révolutionnaire pacifique. Seul le poing de la révolution d’hier, aujourd’hui rongé par la rouille et transformé en moignon, pourra faire plier le bras illégalement armé du Hezbollah.

– Réflexion II : quoique regrettable et inutile, à mes yeux, la mort de Fadi Bejjani nous aura peut-être évité le pire. Figurons-nous un instant si l’incident s’était soldé par la mort d’un milicien du Hezbollah aux mains d’un habitant de Kahalé ; si le score funeste de la fusillade avait été 1-0 en faveur de Kahalé plutôt qu’un « match nul » Kahalé 1-Haret Hreik 1, que ce

serait-il passé ?

Un nouveau 7 mai, peut-être, ou pire !

Et ce dans un rapport de force inégal, non parce que le parti prétendument de Dieu est plus fort par nature, mais parce que les Libanais ont cru au caractère temporaire de sa résistance armée à l’occupant israélien jusqu’à la libération du territoire et lui ont laissé le monopole des armes miliciennes sans se douter qu’elles seront lâchement redirigées contre leur poitrine.

– Réflexion III : était-il approprié d’accrocher un portrait de Fadi Bejjani armé sur la façade de l’église, sous la croix de Celui qui a dit « Qui use de l’épée périra par l’épée » (Mt. 26, 52) ?

Fadi Bejjani l’aurait-il voulu ? Comment l’archevêque et le curé de la paroisse ont-ils accepté un tel décor milicien contraire au message chrétien ?

Nous condamnons les « armes illégales » pour afficher les nôtres sur la devanture de notre lieu de culte ?

– Réflexion IV : les ténors de l’ex-14 Mars et de la pseudo-opposition, si prompts à monter au créneau à chaque incident sécuritaire pour condamner l’existence de cet État dans l’État avec son armée parallèle et demander sa dissolution, jusqu’à en faire leur leitmotiv, peuvent-ils nous expliquer comment ils comptent s’y prendre pour mettre fin à cette anomalie ? Lors de la révolution du Cèdre qu’ils ont torpillée par leurs divisions et leurs luttes de pouvoir, ils avaient tracé et montré la voie. Quelle est la nouvelle marche à suivre après avoir interrompu la marche de ladite révolution ? Serait-ce la solution palliative et déficiente de la décentralisation administrative ? Ou l’insignifiante stratégie de défense ? Qu’ont-ils à offrir de concret, autre que leurs mimiques et gesticulations habituelles ?

– Réflexion V : incident de Tayouné, incident de Kahalé, incident de... n’auront aucune incidence sur le morne quotidien ni sur la triste réalité (ou surréalité) tant qu’ils resteront sans suite et sans conséquences. La série des incidents ressemble à la série des attentats, et chaque élément de la série obéit au cycle standard d’un produit : lancement, croissance, maturité, déclin. Mais dans un temps plus court. Les victimes, héros, martyrs vont très vite reposer dans l’ombre de l’oubli, et pour rien, tant que les « bottines ne suivront pas les babines ». Et, on ne saurait trop le répéter, ce sont les bottines de la révolution qui pourront faire reculer les bottes de l’iranisation.

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