Rechercher
Rechercher

Partez à la (re)découverte de villages du Liban - Tourisme interne

Bhamdoun, ou la réinvention du temps passé...

Bercé par un vent doux et frais, Bhamdoun offre une escapade à portée de main.

(Cet été, nous vous emmenons à la (re)découverte de villages libanais, en vous proposant certains reportages qui avaient été publiés lors des différentes éditions de notre concours « Le village préféré des Libanais ». Ce reportage, republié dans une version légèrement amendée, avait été originellement publié le 20 juillet 2017.)

À vingt minutes seulement de Beyrouth, Bhamdoun culmine à 1 100 mètres et présente à qui veut fuir le brouhaha de la ville une escapade à portée de main. Bercé par un air doux et frais qui sent les fleurs de tilleul, Bhamdoun propose un retour aux beaux jours d'antan. Mais pas que....

Parlez-nous de Bhamdoun... « Il faut préciser, au départ, de quel village il s'agit... Celui d'aujourd'hui ou celui du passé ? » s'enquiert d'emblée Nadim Moujaes, fils de Bhamdoun. « Il fut un temps où Bhamdoun était un paradis », raconte le propriétaire de l'hôtel Carlton. Il faut dire que lorsqu'ils en parlent, l'écrasante majorité des habitants du village évoquent aisément deux époques, celle d'avant la guerre dévastatrice et celle d'après. Et si le nonagénaire recourt au temps passé pour formuler sa phrase, c'est parce qu'il reste nostalgique de toute la splendeur d'antan de ce centre de villégiature. Même si le village tente toujours de cicatriser une plaie longtemps ouverte, il a tout d'un paradis « retrouvé ». Bhamdoun a préservé tous les atouts qui en avaient fait un des centres de villégiature les plus prisés par les Beyrouthins et les touristes du Golfe. Un juste milieu entre un printemps qui a pourtant fait ses adieux et un été qui s'annonce (très) chaud ailleurs. Les tilleuls en fleur embaumant les rues, les allées et les places, d'une propreté impeccable. Entre vignobles et vergers qui s'étendent à perte de vue, le soleil tape fort, certes, mais il est rapidement contrebalancé par l'air doux et frais, qui est l'apanage de Bhamdoun.

Une autre question est posée lorsqu'on demande à un habitant de nous parler de sa localité : « Bhamdoun Village (Bhamdoun al-Dayaa) ou Bhamdoun Gare (Bhamdoun al-Mhatta) ? » En fait, la région de Bhamdoun est gérée par deux municipalités, celle de Dayaa et celle de Mhatta. La municipalité de Bhamdoun Gare s'est détachée de la municipalité initiale, celle de Bhamdoun Village, il y a plus de cent ans, à la suite de l'installation de la gare et de la création de nombreux commerces dans les alentours.

Épicurisme

Que ce soit à Dayaa ou à Mhatta, le visiteur peut déambuler dans les rues anciennes à la découverte des vieilles bâtisses du village, dont certaines sont magnifiquement restaurées, tandis que d'autres gardent encore les stigmates de la guerre.

Au tournant d'une route intérieure, une enseigne interpelle : Le Télégraphe. Le Télégraphe de Belle-Vue de Bhamdoun n'est plus, de nos jours, tel que l'ont connu les vieux du village. Durant la Seconde Guerre mondiale, ce qui est aujourd'hui un restaurant était le siège de la radio de la France libre du général de Gaulle qui, dit-on, se rendait souvent au village l'été. Il a été également, à un moment donné, le lieu de résidence de l'ambassadeur de France qui estivait dans ce village en particulier parce que son fils souffrait de maladies pulmonaires, et que le climat de Bhamdoun agissait comme un baume sur ses douleurs. Aujourd'hui, le Télégraphe est devenu, avec le célèbre Halim, l'un des meilleurs restaurants de la région, dirigé par Naji Boutros, un Beyrouthin dont la mère est de Bhamdoun et qui s'est installé dans le village avec sa famille en 2000 pour se lancer dans l'industrie du vin.

Bhamdoun est essentiellement un village où il fait bon respirer, manger... et boire surtout ! Connu pour son héritage viticole et célèbre pour ses raisins caressés par le vent, le vin de Bhamdoun est réservé aux happy few qui lui rendent visite. Des vignobles existent partout. Il fut un temps où Bhamdoun, seul, produisait 160 000 tonnes de raisins, dont 40 % étaient consacrés à la production du vin.

Des tours pour la découverte des vignobles ainsi que des randonnées de 5 à 20 km de distance, toujours au cœur des vignobles, sont organisés régulièrement. Le Château Belle-Vue, du nom de l'ancien hôtel Belle-Vue qui abrite le Télégraphe, est le fruit de ce riche héritage viticole. Un de ses vins rouge a été appelé La Renaissance, « parce que c'était le premier vin produit à Bhamdoun après la fin de la guerre », raconte M. Boutros, fondateur et propriétaire du château. D'autres vins sont appréciés par les visiteurs, comme le Clos de Cana et Domaine Iris, du nom d'une fleur, Iris Sofrana, qu'on ne trouve qu'au Liban et qu'on tente aujourd'hui de protéger.

Mais plus que le vin, c'est la hrissé qui est la signature de Bhamdoun, un village à majorité grecque-orthodoxe, mais qui compte une grande famille maronite, les Tabet. À l'occasion de la fête de l'Assomption, célébrée le 15 août de chaque année, un véritable festival est organisé en hommage à la Sainte Vierge. Tous les habitants se rassemblent, toutes religions confondues, pour préparer cette hrissé, ce qui donne lieu parfois à des échanges amusants sur la meilleure hrissé, entre grecs-orthodoxes et maronites. Composée essentiellement de viande de mouton et de blé portés à ébullition dans de l'eau, la hrissé nécessite une cuisson qui dure entre 4 et 5 heures.

Une gare, une synagogue, une histoire

Les pierres racontent mieux que quiconque, peut-être, l'histoire de Bhamdoun. La façade de la gare, construite en 1898, est toujours criblée de balles, un impact qui n'est pas la seule blessure de la station. La suspension de son activité en 1983, dans le sillage de l'invasion israélienne de 1982, est sa plus grande blessure, à jamais ouverte, si l'on tient compte du fait que Bhamdoun al-Mhatta s'est développée lorsque la gare a été ouverte et qu'une activité économique importante s'est constituée autour d'elle.

Même dans l'état dans lequel elle se trouve, la gare reste un des sites historiques de Bhamdoun et vaut incontestablement le détour. Il est vrai qu'elle ne mène plus nulle part, mais il suffit de s'y rendre pour plonger dans l'atmosphère d'un passé glorieux.

Elle aussi livrée à l'abandon, la synagogue de Bhamdoun, lieu de villégiature préféré des Juifs libanais à l'époque, est l'un des principaux temples juifs au Liban et constitue un site historique d'une importance majeure dans la région. L'accès à la synagogue dont on situe la construction vers le début du XXe siècle est malheureusement interdit aux visiteurs, comme à n'importe quel passant.

Même s’il n’en reste que des ruines, le site de la vieille gare de Bhamdoun vaut bien le détour. Photo Anne Ilcinkas


Fiche technique

Superficie: Bhamdoun Village : 5,7 km2. Bhamdoun Gare : 1,9 km2.
Nombre d'inscrits sur les listes électorales : Bhamdoun Village : 3 200 électeurs. Bhamdoun Gare : 1 100 électeurs.

Altitude : Bhamdoun Village : 1 250 m. Bhamdoun Gare : 1 100 m.
Climat de Bhamdoun Village et de Bhamdoun Gare : temps très agréable et sec en été, plutôt frais le soir. Froid en hiver. 


Comment y accéder ?

Deux routes principales mènent à Bhamdoun :

– De Beyrouth : route de Damas – Fiyadiyé – Jamhour – Kahalé – Araya – Aley – Bhamdoun.
– Du Metn : Aïn Saadé – Hammana – Mdayrej – Saoufar – Bhamdoun.




À ne pas rater

– Randonnées et tourisme écologique dans la vallée et les vignobles.
– Visite des caves et découverte de l'héritage viticole de Bhamdoun.
– Le festival du village et la préparation de la hrissé, pour la fête de l'Assomption.


La spécialité culinaire rapportée par Kamal Mouzawak (Souk el-Tayeb)

Un incident diplomatique (ou plus) pourrait arriver si la hrissé passe ailleurs qu'à Bhamdoun : les Bhamdounis sont très fiers de ce plat, et surtout de toute l'histoire qui tourne autour ! Pour la fête de la Vierge, plus de 200 kg de blé et 25 moutons cuisent au feu de bois pendant toute la nuit pour préparer une hrissé qui sera distribuée aux Bahmdounis et à tous les visiteurs. L'histoire veut qu'au XIXe siècle, vers 1851, une épidémie frappe Bhamdoun et tue beaucoup de gens. Le patriarche qui arrive en visite reçoit un accueil extrêmement modeste en nombre et comprend alors le problème. Il envoie chercher l'icône miraculeuse du patriarcat, et tout le monde se met à prier pour que l'épidémie passe. Depuis, ce jour est commémoré chaque 15 août, et la hrissé est cuisinée dans les desset, les chaudrons à la Obélix, sur la place du village.

(Cet été, nous vous emmenons à la (re)découverte de villages libanais, en vous proposant certains reportages qui avaient été publiés lors des différentes éditions de notre concours « Le village préféré des Libanais ». Ce reportage, republié dans une version légèrement amendée, avait été originellement publié le 20 juillet 2017.)À vingt minutes seulement de Beyrouth, Bhamdoun...

commentaires (0)

Commentaires (0)

Retour en haut