Il ne manquait plus que cette réconciliation arabo-perse feutrée sous l’égide des Chinois pour voir les Libanais, toutes boutiques sectaires confondues, frétiller du croupion dans l’espoir d’un retour rapide sur investissement… avec l’argent des autres ! Ils sont là à savourer la satisfaction bruyante et la forfanterie ininterrompue, servies par des guignols politiques qui viennent leur bourrer le mou de leur fine analyse conjoncturelle. Il faut tout de même reconnaître le formidable progrès engrangé par ces vieux débris dans la mise en musique de leurs réactions, ânonnées devant les caméras ou étalées sur Twitter, face au coup de force diplomatique du pays bleu.
Depuis, c’est fou ce que les chaînes télé et les réseaux sociaux s’amusent. À toute heure du jour et de la nuit, c’est jus de crâne à tous les étages, avec en vedette un député, ministre ou journaliste qui sait beaucoup de choses qu’il faudrait connaître mieux que lui pour vérifier s’il n’est pas un âne.
L’heureux élu a généralement un boulot simplissime : bien embrouiller son verbiage pour lui donner un max de crédibilité. C’est connu, les simplets locaux sont toujours très impressionnés par les mouvements compliqués de pions sur les échiquiers et les conspirations de chancelleries. Il ne viendrait à personne, par exemple, l’idée toute bête qu’Iraniens et Saoudiens se sont accordés sur un minimum syndical conforme à leurs intérêts, tout en envoyant balader leurs sous-fifres respectifs.
Déjà que, d’instinct, le Libanais croit raide que l’univers tout entier s’articule autour de son nombril, il lui fallait ces retrouvailles pour s’imaginer que son bled a repris d’emblée sa place au centre des bavardages diplomatiques internationaux. On continue ainsi de se frotter la panse à l’idée que cette République déglinguée puisse encore intéresser du monde. Normal : plus il y a d’abrutis, moins il y a de gens pour s’en apercevoir… D’ailleurs, comme on le voit, Iraniens et Saoudiens, tous deux gouvernés par des épaves exotiques quasiment de droit divin, sont très bien placés pour nous dispenser leurs conseils en matière de démocratie, d’alternance politique et de partage du pouvoir.
Mais Dieu soit loué, la poubelle locale est toujours en place : un Premier ministre sortant qui n’en finit pas de sortir et qui se complaît à brouter paisiblement ses affaires courantes ; et un taulier de Chambre qui à chaque contrariété cadenasse le Parlement comme si c’était une annexe de son armoire à vaisselle perso dans son clapier de Aïn el-Tiné. Tout passe, tout casse, tout lasse…
Reste bien entendu les Chinois, qui doivent bien se marrer entre deux rouleaux de printemps à contempler la déliquescence du Liban. En Chine, il y avait jadis l’empire du Milieu. Chez nous, visiblement, c’est le milieu qui empire.
gabynasr@lorientlejour.com
En manque d'inspiration Monsieur Nasr ? Vous aviez déjà utilisé cette formule de conclusion il y a une dizaine d'années... Un lecteur attentif et assidu
17 h 35, le 20 mars 2023