Après avoir comparu devant la police judiciaire à la caserne Barbar al-Khazen dans le quartier de Verdun à Beyrouth lundi, neuf des onze proches des victimes de la double explosion au port, qui avaient été convoqués pour répondre aux accusations d'émeute, de vandalisme et de dégradation de bureaux à la suite d'une violente manifestation, ont été libérés sous caution d'élection de domicile dans l'après-midi même. Les deux autres, William Noun et Peter Bou Saab, ont été transférés à la Sécurité de l'État avant d'être également libérés plus tard dans la soirée, a rapporté notre journaliste sur place Lyana Alameddine, à Ramlet el-Baïda.
William Noun et Peter Bou Saab font l'objet d'une enquête dans le cadre d'une affaire distincte, concernant des commentaires effectués lors de leur passage dans une émission de télévision. William Noun a été détenu de vendredi à samedi dans cette affaire, avant d'être libéré sous caution d'élection de domicile.
Depuis Ramlet el-Baïda, Melhem Khalaf, député des Forces du changement, a déclaré aux médias locaux : "Nous espérons que l'enthousiasme observé lors de l'enquête sur les proches des victimes, sera observé lors de l'enquête sur l'explosion au port."
Pour sa part, le député George Okaïs (Forces libanaises), qui était également présent à la caserne, a déclaré qu'"il y a une grande volonté politique d'enterrer la vérité autour de l'explosion au port". "J'invite les parents des victimes à demander la reprise de l'enquête qui a été arrêtée depuis un an et trois mois", a-t-il ajouté.
"Je suis un homme impulsif"
S'adressant aux médias locaux après sa libération, William Noun a déclaré : "Nous demandons justice pour le 4 août. Je suis responsable de tout ce que je dis et je suis un homme impulsif."
Lundi, treize proches des victimes étaient appelés à comparaître devant la police judiciaire à la caserne Barbar el- Khazen, dans le quartier de Verdun à Beyrouth, pour répondre de faits d'émeute, de vandalisme et de dégradation de bureaux à la suite d'un mouvement de protestation organisé mardi dernier. Celui-ci avait dégénéré en échauffourées avec les forces de sécurité, alors que, selon les dires des proches des victimes, leur "tristesse s'est transformée en colère" face à la suspension, depuis plus d'un an, de l'enquête sur le drame du 4 août 2020. Il s'agit de William Noun, Georges Hitti, Oussama Fakih, Kiyan Tleis, Majid Hélou, Elie Mallahi, Abdo Matta, Elie Bou Saab, Peter Bou Saab, Antoine Salamé, Charbel Wardé et les avocats Pierre Gemayel et Cécile Roukoz. Seuls 11 des 13 ont finalement comparu devant la police judiciaire, le Barreau de Beyrouth ayant refusé que ses membres, les deux avocats, se présentent devant les enquêteurs.
Le travail du juge d'instruction chargé de cette affaire, Tarek Bitar, demeure entre-temps entravé par des manœuvres politiques depuis des mois.
Sit-in
En solidarité, d'autres membres des familles des victimes, des activistes et des députés ont manifesté devant la caserne de Verdun. Les membres du Parlement Michel Douaihy, Cynthia Zarazir, Mark Daou et Najat Saliba, étaient notamment présents sur les lieux..
Devant la caserne de Verdun, l"avocate Roukoz a déploré que "depuis le 23 décembre 2021, tout s'est arrêté après que les anciens ministres Ghazi Zeaïter et Ali Hassan Khalil ont présenté un recours en dessaisissement" contre le magistrat Bitar. "Les Libanais doivent bouger", a-t-elle plaidé.
"Etat policier"
"Nous sommes dans un état policier et de milices. Ils essayent de nous faire taire, mais nous allons continuer de lutter jusqu’à la fin", a déclaré Peter Bou Saab à L'OLJ à son arrivée, notant qu'une mobilisation est également prévue jeudi devant le siège du Parlement, où les députés doivent se réunir à 11h pour tenter d'élire un nouveau président de la République.
"Ça fait deux ans qu’ils essayent de gagner du temps. Ils pensent qu’ils vont réussir à nous fatiguer. Mais ce qu’ils ne comprennent pas c'est que notre tristesse s'est transformée en colère. C'est pour cela que nous sommes forts. Cette technique qui consiste à nous traîner en justice nous renforce et met en colère les Libanais", a pour sa part confié Maria Farès, fiancée de M. Noun et dont la sœur Sahar est également décédée dans la déflagration.
La mère d’une des victimes de la double explosion, Emm (mère) Ahmad, a regretté le fait que des personnes qui sont dans leur droit soient "traînées aux postes de police, alors que les personnes recherchées ne sont pas poursuivies car elles bénéficient d'une immunité" politique. "Même s'ils nous arrêtent, nous continuerons à lutter pour la vérité", a-t-elle lancé.
"Nous n’avons pas peur, preuve en est que toutes les personnes convoquées se sont présentées. La loi n’est utilisée qu’à notre encontre", a estimé Mariana Fodoulian, qui a perdu sa sœur dans le drame du 4 août, appelant à la reprise de l'enquête par le juge Bitar.
L'avocat Pierre Gemayel, dont le frère Jacques a été tué par les explosions, a regretté "le fait que les personnes poursuivies dans l’affaire sont protégées par la police". Il a également indiqué que si l'une des personnes convoquées aujourd'hui "ne sort pas, aucune ne sortira".
commentaires (9)
Ce genre d’événement n’irait jamais du arrivé. Honte à vous tous, magistrats avocats, FSI, armée et j’en passe. Nous ne sommes pas fiers ni rassurés d’être sous votre pseudo protection téléguidée par vos maîtres les vendus. TFEHHH
Sissi zayyat
13 h 41, le 18 janvier 2023