Toujours pas d'issue à l'horizon. La neuvième séance parlementaire consacrée à l'élection d'un président de la République au Liban a été levée jeudi, moins d'une heure après qu'elle ait débuté, sans aboutir à l'élection d'un successeur à Michel Aoun, dont le mandat a expiré le 31 octobre.
Comme les semaines précédentes, le président de la Chambre, Nabih Berry, a levé la séance, à peine le décompte des voix du premier tour achevé, avant d'annoncer, alors que plusieurs députés avaient déjà quitté l'hémicycle, la tenue d'une nouvelle réunion le jeudi 15 décembre à 11h. Cette séance sera la dernière pour l'année 2022.
Avant le défaut de quorum, Nabih Berry a annoncé aux groupes parlementaires qu'il compte leur demander leur avis concernant la tenue d'un dialogue autour de la présidentielle. M. Berry avait renoncé jusque-là à organiser un tel dialogue face au refus de plusieurs groupes.
Ce rituel désormais bien huilé d'un premier tour suivi d'une levée de séance, le quorum étant perdu après le départ de députés du Hezbollah, du mouvement Amal et du Courant patriotique libre, se répète inlassablement depuis la première réunion parlementaire électorale organisée le 29 septembre dernier, malgré la vacance totale de l'Exécutif dans un Liban en plein effondrement.
Lors du premier tour, un total de 105 députés ont voté jeudi. Trente-neuf ont accordé leur suffrage au parlementaire de Zghorta Michel Moawad qui avait obtenu 37 voix lors de la huitième séance, un score en hausse légère donc par rapport à la précédente. Trente-neuf députés ont voté blanc, contre 52 la semaine dernière, ce qui constitue une nette baisse. Parmi les autres candidats ayant reçu des voix, le professeur et universitaire respecté Issam Khalifé a été plébiscité par cinq députés (contre quatre la semaine dernière), l'ancien ministre Ziyad Baroud par un parlementaire (contre deux jeudi dernier).
Par ailleurs, neuf députés se sont prononcés pour "Le nouveau Liban", un seul a voté "Pour le Liban", un seul aussi pour le candidat officiel Fawzi Bou Malhab, trois pour l'ex-patron des Douanes, Badri Daher (actuellement emprisonné dans le cadre de l'enquête sur l'explosion au port de Beyrouth), un seul en faveur de l'ex-député et candidat officiel Salah Honein. Un bulletin contenait l'inscription "Moawad Badri Daher", et un autre "L'entente". Quatre bulletins on enfin été annulés, dont l'un contenant le nom de l'ancien président sud-africain Nelson Mandela, icône de la lutte contre l'apartheid.
Le nom de Sleiman Frangié, chef des Marada, qui avait été glissé dans l'urne il y a trois semaines, n'est pas ressorti ce jeudi.
Dialogue
Le député de Zghorta et candidat Michel Moawad a estimé que "l'attitude de certains qui font perdre le quorum ainsi que le vote à la légère (...) ennuie les Libanais et dégoûte les députés". Il a jugé que cela a pour but de "nous soumettre et nous imposer un candidat".
Le député Ali Hassan Khalil (Amal) a estimé pour sa part qu'"il n'y aura de sortie de crise qu'à travers la communication et le dialogue". "Chaque parti doit revoir sa position afin que ce dialogue soit lancé", a-t-il plaidé.
Jusque là, le CPL, le Hezbollah et le mouvement Amal ont continué de mettre un bulletin blanc dans l'urne, faute d'entente sur un présidentiable. Le parti chiite favorise officieusement la candidature de M. Frangié, un choix refusé par le CPL.
Mais mardi, le chef du CPL Gebran Bassil avait indiqué que son parti pourrait s'écarter de la stratégie du vote blanc, adoptée jusqu'à présent par son allié chiite le Hezbollah dans les séances électorales, en signe de protestation après la tenue d'une réunion du gouvernement sortant lundi avalisée par le Hezbollah.
Les séances législatives visant à élire un nouveau président restent stériles depuis plus de deux mois, faute de consensus entre les différents blocs politiques sur un candidat unique. Une telle entente est traditionnellement considérée comme un prérequis à toute élection d'un nouveau chef de l'Etat au Liban, et est réclamée régulièrement par le Hezbollah et ses alliés qui ont, lors des dernières séances, voté blanc. Face à eux, les Forces libanaises (de Samir Geagea), le Parti socialiste progressiste du leader druze Walid Joumblatt ainsi que le parti Kataëb et des députés indépendants se sont exprimés en faveur de leur collègue de Zghorta, Michel Moawad. Mais ils peinent toutefois à rassembler plus de suffrages autour de leur poulain dont la candidature est de toute façon rejetée par le Hezbollah et le CPL.
Lors du premier tour, le président doit être élu avec 86 voix, alors qu'une majorité absolue de 65 voix est requise lors des tours suivants. Toutefois, jusque-là, la Chambre n'est toujours pas parvenue à un deuxième tour de vote, les députés du camp du Hezbollah et ses alliés se retirant de la séance à l'issue du dépouillement du premier tour, conduisant à chaque fois à la perte du quorum. A chaque nouvelle séance, M. Berry considère qu'il s'agit à nouveau d'un premier tour, et que le nombre de voix requis est de 86 pour élire un président. Une manœuvre toutefois contraire à la Constitution.
commentaires (14)
Le parti iranien a toujours besoin de Bassil, et par conséquent il continue à le supporter. Viendra le jour où il l'enverra se balader quand il aura tout consommé.
Esber
19 h 32, le 08 décembre 2022