Et rebelote, encore raté !

Au rythme des séances parlementaires loupées, on peut dire sans hésiter que le jeu des chaises musicales reprend durablement ses droits. Et pour cause, il y a trop de paires de fesses pour un seul fauteuil. Mais qu’on se rassure, la musique reste la même. Objectif : laisser mariner le Libanais de base dans la soupe au purin et empêcher tout frémissement de son encéphalogramme plat.

Face aux opposants qui ont dégotté au moins un candidat, faut voir la cavalcade des bouffons d’en face pour dénicher la perle rare qui viendra sauver cette République tapioca dépourvue de bananes. Sans compter les contorsions sur la frontière maritime du patron du Parti des mille et une barbes qui, après avoir alterné index au vent, coup de poing sur la table et coup de pied dans la termitière, a fini par s’étaler comme une tarte Tatin devant les gloutons qui l’entourent… La fanfaronnade est une donnée culturelle essentielle chez les Arabes.

Après cette seconde débandade de la ménagerie de l’Étoile, on recommencera les rencontres en catiminette comme jadis au temps des loufiats et des soubrettes, les chuchotis honteux dans des alcôves feutrées tapissées de symboles religieux, pendant que les larbins des uns et des autres se donnent des airs de conspirateurs investis de dons divinatoires.

Bon, il restera toujours un ou deux excités qui vont hurler au crime de lèse-démocratie, mais pas de quoi fouetter une chatte, vu qu’on expliquera gentiment à ces autistes que ce sera, comme d’habitude, notre IBM à nous : inchallah, boucra, maalech…

Tout cela n’est pas trop mal en tout cas. Un président de la République introuvable, c’est un salaire de moins payé par le contribuable, et c’est toujours ça de pris. Encore quelques semaines de ce cirque, et l’on finira par réaliser l’inutilité de la fonction. Ne reste plus qu’à se convaincre de la futilité des deux autres potiches à califourchon sur Aïn el-Tiné et le Sérail. Istiz Nabeuh d’abord, qui a viré commissaire-priseur depuis qu’on lui a appris à enchaîner les séances et à oublier qu’à défaut de victoires, le Parti agrume n’a plus que la dérouillée du 13 octobre 1990 à célébrer ; Mikou-les-miquettes ensuite, qui en est réduit à prier régulièrement saint Maron en syriaque pour rassurer le patriarche.

Sauf que faire le vide par en haut n’enchantera pas les bêlants, toujours prompts à applaudir leurs roitelets locaux et à leur tendre la trique pour se faire battre. Ceux-là trouvent normal de poireauter béats, plusieurs années s’il le faut, dans l’espoir qu’un rot fuité d’une ambassade ou un prout échappé des frontières vienne un jour leur donner le signal de la publication des bans, du pelotage épais, puis du cou-couche panier.

Il n’y a pas à dire, au Liban, on n’arrête pas le progrès en matière de démocratie. Il s’arrête tout seul…

gabynasr@lorientlejour.com