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Nos Lecteurs ont la Parole

Mettre en valeur ses talents

Pour mener à bien une besogne intéressante, il y a deux choses à faire : la première, c’est de s’y mettre, la seconde, de s’y remettre. La première est la plus difficile. Commencer par recueillir quelques règles notables, relevant de la sagesse pratique, qui donnent des résultats. Car se lancer dans une entreprise nouvelle, c’est comme faire un premier saut en parachute : cela demande de l’audace. Mais le plus pénible, quand on a une lettre à écrire, c’est la première ligne.

Premièrement, quand on ne sait pas très bien comment entamer une lettre, on commence par l’un de ces six mots : « qui », « quand » « où », « quoi », « pourquoi », « comment ». Cela ne manque jamais de déclencher l’inspiration.

Deuxièmement, on se donne un but. Par exemple sur le plan sportif, si on se met en tête de devenir un champion, d’abord on déniche un très bon coureur, on s’entraîne avec lui en le rattrapant dans la course pendant plusieurs entraînements, ensuite on s’arrange avec force de le dépasser. Plus il est fort, plus vite on progresse et à force de persévérance et de constance on finit par le dépasser à l’arrivée du but de trois à six pas. C’est déjà une petite victoire. Il faut prendre conscience que le temps est notre fonds de roulement : « L’organiser est pour chacun de nous le problème numéro un. » Ceux qui abattent vraiment de la besogne ne commencent pas par organiser leur « travail » aussi ils commencent par organiser leur « temps ».

Comme l’argent, le temps a sa façon de nous filer entre les doigts : un petit peu par-ci, un petit peu par-là, et finalement nous nous trouvons à la fin, d’une journée chargée, en train de nous demander où il a pu bien passer. C’est seulement en établissant un « budget » des heures et des minutes de la journée que nous pourrons trouver du « temps » qui reste en notre faveur. C’est cette marge disponible qui permet d’échapper à l’impression d’être harcelé et procure le sentiment de vraiment dominer son propre travail.

Une des techniques les plus efficaces dans l’organisation du temps consiste tout simplement à se fixer, pour l’achèvement de chaque tâche, « une heure » ou « une date » limite. On proposa un jour à un ami d’écrire un article sur un thème social. Il s’est mis à travailler nuit et jour, abordant le sujet sous des angles différents. Mais plus il s’acharnait, plus il s’embrouillait.

Un jour, il se rendit compte que cela n’allait pas du tout, puis il se rappela ce que son père lui avait dit dans le passé : « Tu n’as jamais remarqué qu’une des premières choses qui te frappent, quand tu es auprès d’une jeune fille, c’est son parfum ? Au bout d’un moment, tu n’y penses plus. Mais si après t’être éloigné d’elle tu reviens auprès d’elle, ce parfum est plus vif que jamais. Si tu en faisais autant avec cet article tu réussirais mieux à le composer, laisse-le donc reposer et fais autre chose. Tu y reviendras plus tard. »

Il suivit son conseil et en a réalisé l’efficacité. Depuis lors, il a remarqué que la plupart des gens qui travaillent sur des idées usent de ce procédé. Ils s’acharnent sur une question jusqu’à ce qu’ils n’y voient plus clair, puis ils passent à autre chose. Plus tard, ils reviennent à la première question, et tout s’éclaire.

Il faut toujours éliminer ce qui est étranger au sujet. Imaginez-vous entouré d’une bulle invisible à l’intérieur de laquelle vous êtes protégé de toute distraction. Le monde extérieur est toujours là, mais la paroi de votre bulle élimine tout ce qui est étranger au travail en cours.

Se concentrer n’est pas réduire son activité d’esprit. C’est épanouir toutes ses facultés et s’en servir au maximum pour saisir de la façon la plus complète tous les aspects du sujet étudié. On appelle cette sorte de concentration le secret de la force « en politique », « à la guerre », « dans les affaires », et dans « la conduite de toute « activité humaine ».

Puis, il s’agit encore de trouver son propre rythme de travail. La façon classique de découper la journée consiste à attribuer tant d’heures au travail, tant « aux loisirs », tant à la « détente et au sommeil ». Mais si on se sent disposé à travailler après le dîner – ou même à trois heures du matin – pourquoi pas ? On peut, en des lieux et à des moments tout à fait imprévus, fournir un travail créateur considérable.

Un grand médecin, pris entre son enseignement, ses ouvrages médicaux et sa clientèle, avait très peu de temps à consacrer à la passion qu’il eut, sa vie durant, pour la littérature. Pourtant, il réservait, chaque soir, un quart d’heure complet à la rédaction du catalogue annoté de son immense bibliothèque. Quand il mourut, son ambitieuse bibliothèque comprenait environ sept mille huit cents rubriques différentes.

Encore un conseil : « Mener le travail à terme. » Les travaux, comme les récits, ont un commencement, un déroulement et une fin. Après s’être attelé à un ouvrage, beaucoup d’entre nous ne savent pas quand ni où s’arrêter. Le remède consiste à établir d’abord un plan, de manière à pouvoir se dire, quand toutes ses parties ont été remplies, alors : « C’est terminé. » Car si nous avons perdu de vue notre but, il nous faudra redoubler de nouveau nos efforts déjà entamés une première fois. Définissons notre but avec précision, de façon à pouvoir passer à d’autres occupations une fois que nous l’aurons atteint.

Pour beaucoup d’entre nous, le travail est simplement une chose que l’on subit ; le secret, c’est d’en faire un acte créateur. Ce qui est passionnant, c’est que, vu sous cet angle, il devient un des éléments les plus stimulants, les plus féconds et les plus satisfaisants de notre existence.


Les textes publiés dans le cadre de la rubrique Courrier n’engagent que leurs auteurs. Dans cet espace, L’Orient-Le Jour offre à ses lecteurs l’opportunité d’exprimer leurs idées, leurs commentaires et leurs réflexions sur divers sujets, à condition que les propos ne soient ni diffamatoires ni injurieux ni racistes.

Pour mener à bien une besogne intéressante, il y a deux choses à faire : la première, c’est de s’y mettre, la seconde, de s’y remettre. La première est la plus difficile. Commencer par recueillir quelques règles notables, relevant de la sagesse pratique, qui donnent des résultats. Car se lancer dans une entreprise nouvelle, c’est comme faire un premier saut en parachute :...

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