
Le chef du CPL Gebran Bassil à Sin el-Fil, le 6 septembre 2022. Photo Tayyar.org
Le chef du Courant patriotique libre (CPL, aouniste) Gebran Bassil a déclaré mardi que si le gouvernement sortant de Nagib Mikati assumait les fonctions du chef de l’État après la fin du sexennat Aoun, il le considérerait comme un cabinet "qui usurpe le pouvoir". Les tractations concernant la mise sur pied du nouveau cabinet ont été supplantées ces dernières semaines par un débat sur la possibilité ou non que le gouvernement sortant de Nagib Mikati puisse assumer les prérogatives du chef de l’État, à l'approche de la fin du mandat présidentiel le 31 octobre.
Dans un discours à l'issue d'une réunion du groupe parlementaire aouniste à Sin el-Fil, M. Bassil s'en est par ailleurs pris au chef des Forces libanaises Samir Geagea, qui l'avait violemment attaqué dans un discours dimanche soir.
"Il y a quelques jours, le Premier ministre avait affirmé que chaque jour sans gouvernement coûte 25 millions de dollars. Pourquoi alors avancer à pas de tortue et prendre sciemment son temps en attendant que se termine le mandat" du président Aoun, s'est interrogé Gebran Bassil. "Il a déjà annoncé son intention à certains ministres et hier il l'a déclaré de manière claire : il est prêt à assumer les prérogatives du président en cas de vacance. Mais nous l'avons déjà dit et redit, un gouvernement qui n'a pas la confiance du nouveau Parlement et qui n'a pas les pleins pouvoirs ne peut pas se réunir et exercer des prérogatives supplémentaires, notamment celles du chef de l’État", a-t-il ajouté. "Nous avions dit que cela risque de provoquer un chaos constitutionnel, mais ils nous ont répondu avec un discours confessionnel. Le vide ne peut remplir le vide et un chaos constitutionnel en justifie un autre", a-t-il lancé. "Nous ne reconnaîtrons pas la légitimité du gouvernement démissionnaire après la fin du mandat présidentiel. Nous considérerons qu'il usurpe le pouvoir et a perdu sa légitimité, même si le monde entier reconnaissait un tel cabinet", a-t-il mis en garde.
Lundi soir, M. Mikati avait déclaré qu'"en cas de vacance présidentielle, les prérogatives du chef de l'État sont transférées au gouvernement sortant actuel", une position à laquelle s'opposent farouchement le président Aoun et son camp. Cette position de Baabda et du CPL est perçue par de nombreux observateurs comme un prétexte permettant au chef de l’État de s'accrocher à sa fonction après la fin de son mandat. Le gouvernement actuel expédie les affaires courantes depuis le 22 mai, suite aux élections législatives, et Nagib Mikati avait été reconduit à son poste fin juin. Le Premier ministre désigné a accusé à plusieurs reprises Gebran Bassil de bloquer les discussions autour de la composition de la future équipe ministérielle.
Réponse à Geagea
Rebondissant par ailleurs sur une déclaration de Samir Geagea dimanche, selon laquelle l'histoire oubliera Michel Aoun à la fin de son mandat, M. Bassil a rétorqué que "pour pouvoir parler de l'histoire, il ne faut pas être un tueur d'enfants, de Premiers ministres, de zaïms, de religieux, il ne faut pas être un collaborateur qui touche de l'argent de l'étranger", en allusion aux accusations lancées contre M. Geagea pendant la guerre civile (1975-1990). Il a encore estimé que M. Geagea "ne sait pas compter combien de députés il a dans son groupe parlementaire", alors que les deux chefs de file affirment avoir le bloc le plus nombreux avec leurs différents alliés.
L'inaction des juges libanais
M. Bassil a en outre réitéré son appel pour que le gouverneur de la Banque du Liban Riad Salamé soit démis de ses fonctions. "Pourquoi personne ne réclame cela avec nous", s'est-il indigné, estimant que le gouverneur de la BDL a "mis dans sa poche la moitié des politiciens, journalistes et juges du pays". "Personne ne parle de lui parce que tout le monde touche des pots-de-vin", a-t-il accusé. "Toutefois, il ne peut pas acheter les juges européens, qui découvrent tous les jours des faits et des chiffres effrayants" dans les comptes à l'étranger de M. Salamé. Ces juges envoient leurs dossiers au Liban où "les juges libanais ne font que les contempler sans rien faire".
Le député de Batroun a dans ce cadre tancé les magistrats libanais pour leur mouvement de grève. "Ils doivent bien sûr réclamer leurs droits, nous le comprenons, mais ils ne peuvent pas suspendre le suivi des dossiers", a-t-il ajouté. Il a d'ailleurs demandé que le dossier de la double explosion au port de Beyrouth soit traité en priorité, dénonçant l'arrestation "injuste et arbitraire, voire le kidnapping" des personnes en détention dans cette affaire depuis deux ans, "qui ne faisaient que leur travail". Parmi les détenus se trouve notamment l'ex-directeur des Douanes Badri Daher, proche du CPL et du président Aoun. "Le Conseil supérieur de la magistrature, son président et certains de ses membres portent la responsabilité du blocage de la justice" et de ces détentions, a-t-il accusé, se disant prêt à avoir recours à une justice "non-libanaise" si la justice locale reste bloquée.
Plus de deux ans après le 4 août 2020, l'instruction de cette affaire est suspendue en raison des nombreuses demandes de révocation du juge en charge, Tarek Bitar, par de hauts responsables politiques convoqués pour interrogatoire ou faisant l'objet de poursuites. Les personnes en état d'arrestation dans cette affaire, et notamment des responsables douaniers et portuaires, comme l'ancien directeur des Douanes Badri Daher, sont en attendant toujours en détention.
Parlante la photo. Décidément il a du mal a maitriser le levage d’indexe. UN indexe, pas deux! Comme à la répétition!
02 h 21, le 08 septembre 2022