Les diplomates libanais à l'étranger seront bientôt payés, pour la première fois depuis mai

Depuis décembre, les diplomates libanais à l'étranger perçoivent leurs revenus par intermittence, faute de devises dans un Liban en pleine crise. C'est dans ce contexte que le ministère des Finances a affirmé lundi que les salaires impayés depuis mai ont commencé à leur être versés, suite à des discussions avec la Banque du Liban (BDL). Pour autant, les missions diplomatiques libanaises demeurent confrontées à de nombreux obstacles. Privées depuis neuf mois des montants consacrés au bon fonctionnement de leurs ambassades, elles se retrouvent aujourd'hui acculées à s'autofinancer et craignent que la crise que traverse le Liban n'impacte leur travail.

"Depuis décembre 2021, nous recevons nos salaires par intermittence. Ceux de décembre ont été versés en janvier, ceux de janvier et février en février, alors que ceux des mois de mars et avril n'ont été transférés que le 10 mai, soit cinq jours avant les législatives", confie un diplomate chevronné à L'Orient-Le Jour, sous couvert d'anonymat. Le corps diplomatique avait d'ailleurs suspendu à diverses reprises son travail quelques mois avant les élections législatives du 15 mai pour réclamer une amélioration de ses conditions financières, ce qui avait menacé l'organisation du scrutin à l'étranger dans les délais constitutionnels. Les ambassadeurs avaient cependant fini par lever leur grève avant cette échéance, après avoir reçu plusieurs promesses de la part des autorités.

Lundi, le ministère des Finances a annoncé que "la BDL a commencé à transférer les salaires du corps diplomatique à l'étranger". Ce développement intervient "à la suite de contacts effectués au cours des derniers jours entre le ministre sortant des Finances Youssef Khalil et le gouverneur de la BDL Riad Salamé, afin de transférer ces montants en dollars".

Manque de devises
Avant cette décision, les salaires étaient calculés sur la base de plusieurs monnaies internationales (dont le dollar, le yen, l'euro et le franc suisse), puis versés en dollars aux diplomates. Il n'est toujours pas clair si le calcul des montants uniquement en dollars engendrera désormais une majoration ou une diminution des salaires, nous explique le diplomate.

"Les salaires de mai ont été payés en juillet, avant les vacances d'été, et depuis, nous n'avons plus rien perçus", précise-t-il. "A la suite de la décision du ministère des Finances, ce sont les salaires de juin qui nous seront versés, mais nous ne savons pas ce qu'il en sera de ceux des mois de juillet et d'août", ajoute-t-il, soulignant n'avoir encaissé jusque-là aucun montant. Contactée par L'Orient-Le Jour, une source au sein du ministère des Affaires étrangères a confirmé que "les versements nécessaires ont été effectués". Elle a indiqué que les retards au niveau paiements sont dus "au manque de devises dont dispose le Trésor public".

"Manque d'empathie"
Face à cette situation tendue, le diplomate a déplore "l'absence de soutien officiel" et le "manque d'empathie" des responsables, dont il pointe du doigt "le manque d'organisation". Il a également regretté le fait que les diplomates "ne bénéficient pas d'assurance, ni de facilités concernant notamment les frais médicaux et de scolarité". 

Les embûches ne s'arrêtent pas là : depuis janvier, les représentants du Liban à l'étranger n'ont pas reçu les montants consacrés à l'entretien et au bon fonctionnement des missions diplomatiques. "Nous avons été contraints de nous autofinancer, en augmentant par exemple les coûts de certaines formalités", explique-t-il. "Depuis mai, nous n'avons pas arrêté de travailler et avons aidé les Libanais de l'étranger à terminer leurs papiers afin qu'ils puissent passer leurs vacances au Liban", a-t-il noté. "Nous ne voulons pas que la crise au pays se reflète là où nous sommes accrédités", prévient-il. Plusieurs ambassadeurs ont donc tenté d'effectuer une "réorganisation interne et logistique au sein de leurs missions diplomatiques en vue de s'accommoder de la situation et de réduire les dépenses", explique enfin le diplomate.