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Nos Lecteurs ont la Parole

Donnez-nous notre temps de lecture quotidienne

Donnez-nous notre temps de lecture quotidienne

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Récemment, à la question combien de livres as-tu lus cette année, une fille en brevet dans une école privée libanaise m’a répondu : Aucun. Un sentiment de désolation mélangé à une haine profonde à l’égard des responsables de l’éducation nationale, de l’école et des profs s’est accaparé de moi. Non, la lecture n’empiète pas sur les autres matières. Oui, elle les complète délicieusement. Elle doit revenir obligatoirement au goût du jour.

Si j’ai à regretter une seule chose dans ma vie, c’est de ne pas avoir lu beaucoup plus de livres durant mes années scolaires.

Puisque si je l’avais fait, j’aurais pu être inspirée depuis mon plus jeune âge par beaucoup plus d’idées et d’histoires qui auraient pu forger mon jeune cerveau. Qui auraient pu éveiller prématurément mon esprit sur la vie des gens, leurs histoires, leurs caractères, leurs qualités et surtout leurs défauts. Qui auraient pu contribuer à me dévoiler précocement les secrets de la vie intérieure de mes semblables, la complexité de leurs pensées, leurs passions, leurs motivations, leurs prétentions, leurs mesquineries, leurs jalousies... Qui auraient pu me faciliter noir sur blanc l’accès aux ressorts les plus subtils et les plus intimes de leur côté obscur ainsi que leur côté éclairé.

Rassurez-vous, je me suis rattrapée et toute seule après. Et depuis que j’ai découvert le plaisir de lire, la félicité a frayé son chemin dans ma vie.

En un mot comme en cent, la lecture offre un résumé de la nature humaine sur un plat dont les pages se tournent sur des histoires appétissantes qui rassasient les esprits affamés et assouvissent leur soif du savoir. C’est un apprentissage sur nos frères dans l’humanité d’autant plus performant que l’expérience sur le terrain. Des leçons de vie, ô combien inspirantes.

Puisqu’un roman, un traité, un conte, une fable, un récit, une chronique ne laissent pas indifférents. Ça laisse une trace, une empreinte qui creuse exquisément sa place dans les esprits pour les aider à dominer leurs passions tristes qui dégradent les pensées et la vie des humains en général ; une cicatrice délicieuse qui se régénère grâce à des phrases qui fleurissent sur des lèvres avides de belles citations et à des mots érudits qui bourgeonnent dans le cœur des printaniers de la vie pour déclamer leur amour et leurs émotions.

« La sottise rend méchant ; et les brutes, écrivait Voltaire à Rousseau, sont souvent de célèbres ignorants. » Et je dirai très humblement à notre éminent philosophe que le remède à l’ignorance et à la sottise se trouve dans la lecture. Lire, s’instruire, interpréter et réfléchir pour après se faire sa propre opinion, et l’ignorance et la sottise disparaissent et par déduction les méchants et les brutes.

Les pays dont les enfants et les élèves ne lisent plus ressemblent à des cimetières à ciel ouvert. Leurs cerveaux sont morts prématurément. Les ténèbres envahissent leurs pensées et dans leur mentalité il ne faut faire que suivre sans aucune remise en question. Et plus les suiveurs sont nombreux, plus les décideurs se délectent.

Ainsi, il est des gouvernements qui entretiennent expressément la pauvreté chez leur population. Ainsi, le peuple reste assujetti à sa pauvreté et à ses problèmes pécuniaires, et ne s’intéresse plus qu’à trouver les moyens licites ou illicites pour se nourrir sans se soucier aucunement de l’autre nourriture qui est celle de leur esprit.

Comment construire un pays si on n’expose pas nos enfants à la lecture ? Si on ne les rapproche pas des livres? Si on n’entretient pas une relation d’émerveillement sur chaque page qui se tourne ?

Sans culture point de liberté d’expression. Sans livres, ces vecteurs de liberté, point de liberté. Plus un peuple est cultivé, plus le livre résiste et vice versa. Et plus un peuple est cultivé, moins il se laisse faire. C’est-à-dire, moins il suivra bêtement tel ou tel zaïm.

Après tout, qu’est-ce qui fait qu’une nation a beaucoup plus d’écrivains et de penseurs qu’une autre ? C’est la lecture. Même les hommes et les femmes les plus célèbres et les plus occupés par leur travail et leur vie professionnelle lisent et donnent une priorité absolue à la lecture. Qui a sauvé la très célèbre Oprah Winfrey du destin funeste qui l’attendait ? Les livres. Nicolas Sarkozy consacre un temps quotidien à la lecture d’une cinquantaine de pages au moins. Obama nous dit qu’il connaît mieux ce qui se passe dans la vie des gens grâce à la littérature.

Plus que les maths et les sciences, la littérature et la philosophie sont les plus nobles des outils d’amélioration et d’émancipation du pouvoir du cerveau. Elles sont les vibrants plaidoyers de notre humanité : « Les écrivains rendent les plus grands services à l’humanité », grâce à leurs œuvres. Le livre donne des ailes aux étudiants. Il les fait voyager. Il illumine leur cerveau. Il rend justice à la vie. Il prend sa revanche sur la complexité et les défis qui attendent les générations à venir.

Depuis la guerre en Ukraine, les pires scénarios sont à prévoir dans ce monde si fragile et si sujet à la banalisation de la violence. Une panne d’électricité mondiale pourrait survenir et l’accès à l’information, les jeux et les divertissements en ligne pourraient être interrompus, notre plus beau refuge serait éventuellement la lecture d’un traité sur la tolérance, par exemple, à la lumière d’une bougie. Rien de plus merveilleux !

« Sans musique la vie serait une erreur », disait Nietzsche. Encore faut-il ajouter que sans lecture la vie serait une aberration. La lecture permet à l’homme de devenir un meilleur homme. Elle permet à l’homme de devenir un homme libre.

Les textes publiés dans le cadre de la rubrique Courrier n’engagent que leurs auteurs. Dans cet espace, L’Orient-Le Jour offre à ses lecteurs l’opportunité d’exprimer leurs idées, leurs commentaires et leurs réflexions sur divers sujets, à condition que les propos ne soient ni diffamatoires ni injurieux ni racistes.

Récemment, à la question combien de livres as-tu lus cette année, une fille en brevet dans une école privée libanaise m’a répondu : Aucun. Un sentiment de désolation mélangé à une haine profonde à l’égard des responsables de l’éducation nationale, de l’école et des profs s’est accaparé de moi. Non, la lecture n’empiète pas sur les autres matières. Oui,...

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Et moi je vous dis l’Europe sans la Grèce c’est une bibliothèque sans livres

Eleni Caridopoulou

20 h 20, le 23 août 2022

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Commentaires (1)

  • Et moi je vous dis l’Europe sans la Grèce c’est une bibliothèque sans livres

    Eleni Caridopoulou

    20 h 20, le 23 août 2022

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