Le président libanais, Michel Aoun, a mis à profit lundi matin les célébrations du 77e anniversaire de l'armée pour régler ses comptes avec le Premier ministre désigné Nagib Mikati concernant la formation du gouvernement, lui reprochant, sans le nommer, de ne pas faire avancer ce processus. Dans un discours prononcé à la caserne de Fayadiyé, au nord-est de Beyrouth, M. Aoun a espéré que "la présidentielle ne connaîtra pas le même sort que la formation du cabinet", dénonçant le fait que l'absence d'une équipe ministérielle, dans un Liban en crise, "aggrave les difficultés financières et économiques".
Le chef de l'État a prononcé son discours en présence du président du Parlement Nabih Berry et de M. Mikati, ainsi que de plusieurs ministres du cabinet sortant, alors que la fête de l'armée a lieu, depuis trois ans, dans un contexte d'effondrement généralisé qui a fortement impacté le travail des institutions et, entre autres, de la troupe.
"Malgré tous les défis, le Liban est toujours sans gouvernement, deux mois et demi après le début du mandat du nouveau Parlement", a déclaré le président, dénonçant ceux qui pariaient sur le fait qu'il n'y aurait pas de législatives et qui parient de nouveau sur l'organisation de la présidentielle. Le délai pour l'élection d'un nouveau chef de l'État commencera à la fin de ce mois d'août, et le mandat du président Aoun arrive à terme le 31 octobre. Il a toutefois affirmé qu'il ferait tout son possible pour assurer des circonstances favorables à l'élection d'un nouveau président, "qui poursuivra sur la voie des réformes urgentes que nous avons lancée".
"J'espère que la présidentielle ne connaîtra pas le même sort que la formation du nouveau gouvernement qui, jusqu'à présent, ne bénéficie pas des composantes et des critères nécessaires", a-t-il lancé, dans une pique à M. Mikati, ajoutant que l'absence de cabinet "aggrave les difficultés économiques et financières" du Liban, alors que les responsables concernés sont normalement "responsables d'empêcher que le pays ne s'effondre encore plus".
Aplanir les difficultés
Au sujet du litige frontalier avec Israël, M. Aoun a déclaré que "les négociations indirectes en cours concernant le tracé de la frontière ont pour objectif de protéger les droits du Liban" concernant l'exploitation de ses ressources en hydrocarbures. La fin de ces pourparlers offriront au Liban "l'opportunité de raviver sa situation économique", a-t-il estimé. Le chef de l'État doit s'entretenir, après les célébrations, avec MM. Mikati et Berry sur une position commune relative au tracé de la frontière maritime libanaise, alors que le médiateur américain Amos Hochstein se trouve actuellement à Beyrouth.
"Je sais bien à quel point vous luttez et vous vous fatiguez pour continuer à accomplir vos devoirs", a déclaré M. Aoun en s'adressant aux soldats, promettant de "n'épargner aucun effort pour aplanir ces difficultés, dans la mesure de (ses) capacités". Les militaires sont touchés par la crise, leurs salaires en livres libanaises ayant perdu 90 % de sa valeur ces dernières années. Pour faire des économies dans le budget de l'institution, la viande n'est plus inscrite au menu de la troupe, qui compte sur des aides étrangères pour se nourrir, se soigner et s'équiper.
"Si Dieu le veut, ça ira"
Conformément aux usages, M. Aoun avait, à son arrivée à la caserne Choukri Ghanem, déposé une gerbe de fleurs sur le monument aux martyrs de l'armée, puis il avait passé en revue les troupes, avant de rejoindre MM. Berry et Mikati pour assister à une parade militaire et remettre leurs épées aux élèves-officiers.
À l'occasion de cet événement, le ministre sortant de la Défense, Maurice Slim, a salué "les sacrifices et l'héroïsme" des militaires qui sont, a-t-il dit, "la colonne vertébrale de la nation et la garantie de sa stabilité". Il leur a souhaité "de jours meilleurs, pour eux, leurs familles et le pays".
Dans l'après-midi, le chef de l'État a par ailleurs reçu le commandant en chef de l'armée, Joseph Aoun, dont le nom circule pour lui succéder à la présidence de la République. "L'armée reste la seule et dernière institution cohérente, la base du Liban et la garantie de sa sécurité, n'en déplaise à tous les sceptiques et à ceux qui parient sur sa désintégration ou son effondrement", a déclaré le commandant de la troupe. À cette occasion, Michel Aoun a affirmé que "le désespoir n'a pas de place dans les conditions difficiles que nous vivons", et a évoqué de nouveau le sujet de la frontière maritime avec Israël: "Si Dieu le veut, ça ira", a-t-il lancé.
commentaires (11)
Je me souviens du fameux "Gebran Bécile wazir, aw ma fi hkoumeh" …
Gros Gnon
23 h 21, le 01 août 2022