Le président libanais Michel Aoun a appelé samedi soir, à douze heures du début du scrutin législatif, les électeurs à voter en nombre, profiter de cette "opportunité" de demander des comptes à la "classe politique au pouvoir" et d'atteindre le changement, affirmant que "la révolution dans les urnes est la plus propre et la plus crédible des révolutions". Dans son discours, le chef de l’État a lancé de nouvelles accusations envers ses opposants politiques, sans toutefois les nommer, critiquant notamment le fait qu'ils ont "menti" pendant des années sur la situation financière du pays.
Les élections de dimanche sont la première consultation populaire depuis le soulèvement du 17 octobre 2019, au cours duquel les Libanais sont descendus par milliers dans les rues de tout le pays pour réclamer le départ de la classe politique, accusée de corruption et d'incompétence. Le vote est organisé alors que le pays s'enfonce toujours plus dans une crise économique et financière dévastatrice.
"Je m'adresse à vous à la veille des élections afin de vous appeler à participer en nombre, d'exprimer votre avis et de défendre vos droits", a déclaré M. Aoun dans un discours télévisé, indiquant que le futur Parlement "devra faire face à de grandes responsabilités législatives et échéances constitutionnelles", comme la présidentielle d'octobre. "Pendant trente ans, ils nous ont fait vivre un grand mensonge et prétendu que la livre libanaise se portait bien, que notre argent était en sécurité et qu'il ne fallait s'inquiéter de rien, a accusé le chef de l’État, en allusion notamment au gouverneur de la Banque du Liban Riad Salamé. Ce mensonge était confortable, mais le temps devait venir où nous allions en payer le prix. Et plus le temps passe, plus ce prix sera élevé".
Une opportunité à ne pas rater
Face à cette situation, les élections représentent une "opportunité à ne pas rater, surtout après ces deux dernières années au cours desquelles des noms et des visages ont été mis sur la corruption et le vol", a-t-il ajouté. "Votre responsabilité est grande aujourd'hui afin que le démantèlement de la classe politique corrompue ne s'arrête pas", a lancé le président de la République, qui a ajouté que le scrutin n'est pas "juste un droit mais aussi une obligation pour tous les citoyens, et représente le droit chemin vers le changement". "Le moment est venu de demander des comptes et de faire des choix", a-t-il déclaré, avant de faire valoir que "ce n'est pas au président de la République de poursuivre les corrompus et les voleurs et de les jeter en prison". Il a toutefois souligné pouvoir montrer la voie qui permettrait de savoir qui a volé, ce qu'il a fait en insistant sur le fait que cela peut être accompli via l'audit juricomptable. "Aujourd'hui, pour que le Liban se redresse et qu'il n'y ait plus d'échanges d'accusations concernant les responsabilités de la crise, c'est à la justice de faire son travail, de nommer les corrompus et de les poursuivre", a-t-il poursuivi.
Le chef de l’État a ensuite dénoncé une "campagne visant à désespérer" les gens, dont le titre est "le Liban est brisé et en faillite : quittez-le, fuyez". "Mais je le dis depuis des années, le Liban est pillé et non en faillite". Et de critiquer le fait que les personnes ayant menti au sujet de la situation financière du pays veulent maintenant faire croire "aux Libanais et surtout aux jeunes qu'il est possible de supprimer une composante de notre société sans que cela n'affecte la stabilité de la nation". "Cette mentalité est extrêmement dangereuse et son coût est élevé : elle risque de nous coûter la sédition et la guerre civile", a-t-il poursuivi.
La révolution dans les urnes
Michel Aoun a dès lors appelé une nouvelle fois à voter : "La révolution dans les urnes est la plus propre et la plus crédible des révolutions. Ne la vendez pas ce dimanche".
Plus tôt dans la journée, la présidence avait partagé sur son compte Twitter des extraits d'un entretien à l'agence de presse officielle du Qatar (QNA), dans lequel il affirmait entre autres que la stratégie de défense nationale, et donc le désarmement du Hezbollah "nécessite un accord total de toutes les parties". Il a rappelé avoir précédemment appelé à une "rencontre nationale" sur ce dossier.
Il a enfin estimé que le redressement économique du pays nécessite "un programme de réformes exhaustif, la stabilité économique et financière à atteindre au moyen de politiques efficaces, le rétablissement de la confiance, le soutien de toutes les parties et la reconnaissance de l'étendue des pertes du secteur financier". Il a dans ce cadre affirmé qu'il utiliserait les derniers mois de son mandat pour réaliser ce qu'il avait prévu. "Et si le temps ne suffit pas, je laisserai un plan de route à mon successeur", a-t-il conclu.
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Rita Selouan
22 h 45, le 16 mai 2022