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Lifestyle - Hot(on)line

La « LebaneseLira », une vedette sur Twitter

Loin du contexte grave et désolant dans lequel elle fait pleurer plus d’un depuis 2019, la Lira réussit à faire rire dans un compte satirique dont elle est le personnage principal.

La « LebaneseLira », une vedette sur Twitter

La livre libanaise des années 80 utilisée en image de profil du compte de la Lira.

Depuis le mois de novembre 2019, la livre libanaise a son propre compte satirique sur Twitter. @LebaneseLira donne la parole à la livre libanaise, qui s’exprime à la première personne, commente avec humour l’actualité et partage ses états d’âme et ses (res)sentiments, surtout quand sa valeur fluctue. Également présent sur Instagram et Facebook, le compte qui s’exprime en français, en anglais, mais surtout en arabe est principalement actif sur Twitter. Sur les trois plateformes, la photo de profil est la même, celle d’un billet qui n’existe plus sur le marché depuis bien longtemps, un billet qui a perdu de sa valeur avec la première dévaluation des années quatre-vingt, le billet d’une livre libanaise, marron et beige, frappé des colonnes du temple de Jupiter à Baalbeck, édité en 1980.

« Quand j’ai créé le compte, j’étais hors du Liban. Je pensais à notre situation, à celle de ma famille, de mes amis. À toutes les personnes qui étaient déprimées, désemparées et qui ne savaient plus quoi faire quand la chute de la livre a commencé et quand nos comptes bancaires ont été bloqués », explique le personnage derrière Lira qui tient à rester anonyme. En effet, le mystérieux auteur ne veut pas dévoiler son identité, son sexe, son âge ou son métier en dehors de cette activité sur les réseaux sociaux. « Je ne veux pas que les gens m’enferment dans une case, ou un background donné. Je suis la livre libanaise tout simplement », explique-t-il. « En créant le compte, j’ai surtout pensé à notre monnaie nationale dans notre inconscient collectif ; même si elle a perdu à plusieurs reprises de sa valeur, et ne cesse de le faire, elle garde dans notre mémoire et notre langage l’image d’une monnaie forte, reliée à un Liban au passé glorieux et prospère. On répond en arabe quand notre santé va bien ou que quelque chose est parfait en disant : “Metel el-lira” (comme une livre). Et à une époque belle, mais bien révolue, on utilisait une expression restée toujours dans le langage “el-lira btehké” (la livre parle, a son mot à dire) qui évoquait le pouvoir d’achat d’antan des Libanais avant sa première dévaluation des années 80 », note celui qui préfère être appelé Lira, ajoutant que « le soir où j’ai créé le compte Twitter, quand mes compatriotes n’avaient plus le moral, j’ai pensé : et bien la livre a son mot à dire ? Je vais donc lui donner la parole ».

Réactions, humour et indignation de la Lira sur les réseaux sociaux. Photo tirée du compte Instagram @lebanese.lira

Drôle, légère et vaniteuse

Dès novembre 2019, la Lira s’est créé un personnage, celui d’une femme fière d’elle-même, à l’ego surdimensionné et qui profite de sa nouvelle liberté. « Dans sa tête elle est la reine, la meilleure de toutes les monnaies. Elle ne fait pas les choses à moitié et veut exceller dans tout ce qu’elle entreprend, même l’effondrement. Et elle réussit. Personne ne fait mieux qu’elle. Elle veut même dépasser le bolivar vénézuélien et elle sait qu’elle en est capable », note la personne qui a créé le compte et possède actuellement 20 900 followers sur Twitter. « D’ailleurs, la Lira affiche sa légèreté et sa vanité dans ses tweets. C’est aussi quelqu’un de drôle et de sympathique. Elle sait que ses followers l’aiment. Les insultes, elle les prend pour des compliments. Quand quelqu’un lui dit qu’elle est vile, loin de se démonter, elle rigole en confirmant : “Oui, je suis la plus basse ! Faites-moi encore des compliments”. Elle veut tout simplement être la première dans tout ce qu’elle fait. » La Lira tweete et rien ne peut l’arrêter : « Quoique vous fassiez, je vais m’effondrer », « Ma limite c’est le ciel », « Je ne suis pas la seule dans l’effondrement, mais je suis la meilleure, les Russes peuvent toujours essayer », « J’ai des courbatures, tellement la montée a été rapide », ou encore, en guise de poisson d’avril, « Je reviens au taux de 1 500 ! ». Elle voit d’un mauvais œil l’augmentation du prix du baril de brut. « Pour qui se prend-il ? » demande-t-elle exaspérée sur Twitter.

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Quand en janvier dernier, elle chute de 33 000 à 27 000 livres en une seule journée, elle s’exprime avec beaucoup d’humour : « C’était tellement rapide, que j’ai une chute de tension. » Elle interpelle ses followers, leur demande si elle doit tomber encore plus bas, si elle doit retourner à ses années d’adolescence, si elle doit mûrir et dépasser les trente (années/livres face au dollar). La Lira peut aussi être bienveillante : elle souhaite à ses followers un Joyeux Noël et une Bonne Année, et s’indigne quand le prix des produits achetés au supermarché ne suit pas sa courbe à la baisse. « La livre est surtout quelqu’un de spontané. Je ne prépare pas mes tweets et je réagis à l’actualité. Elle savoure aussi sa liberté. Elle avait ras le bol d’être prisonnière de la valeur de 1 512 livres face au dollar. On a l’impression qu’elle s’éclate après avoir été trop longtemps enfermée. Désormais, elle est seule maître de ses décisions et rien ne peut l’arrêter. Elle aspire aussi à rester libre. Elle sait que c’est la seule façon de préserver l’économie du pays », souligne l’auteur du compte. « J’aime la livre comme j’aime le Liban. C’est notre monnaie nationale et la monnaie, comme un drapeau ou d’autres symboles, représente un pays, c’est notre Lira. Le Liban et les Libanais ne peuvent pas se rétablir sans le rétablissement de la livre libanaise. Leur sort est intrinsèquement lié. » Mieux vaut en rire.

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Une petite coquine, dame Lira

Chorzow Factory

14 h 08, le 26 avril 2022

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  • Une petite coquine, dame Lira

    Chorzow Factory

    14 h 08, le 26 avril 2022

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