Le patriarche maronite Béchara Raï à Bkerké. Photo ANI
Le patriarche maronite Béchara Raï a critiqué à mi-mot dimanche la réponse faite par les autorités libanaises aux propositions du Koweït pour aider le Liban à rétablir ses liens tendus avec les monarchies du Golfe, estimant que l’État devait prendre des "décisions courageuses" et ne pas "occulter la vérité afin de protéger la prolifération des armes".
Les relations entre le Liban et les monarchies du Golfe se sont détériorées fin octobre suite à des propos hostiles de l'ancien ministre de l'Information Georges Cordahi au rôle de la coalition saoudienne dans la guerre du Yémen. Dans une tentative de médiation entre les parties, le chef de la diplomatie koweïtienne avait proposé samedi dernier, lors d'une visite à Beyrouth, une série de propositions, parmi lesquelles que le monopole des armes soit détenu par l’État et l'application des résolutions onusiennes, notamment la 1559 prévoyant le désarmement des milices, et donc du Hezbollah. La réponse préparée par Beyrouth, selon des informations rapportées par notre correspondante Hoda Chedid, souligne de son côté qu'il faut privilégier la "paix civile" au Liban, que l'application de la 1559 nécessite du temps, et que les conditions soient réunies dans un contexte régional plus large. Le chef de la diplomatie libanaise Abdallah Bou Habib doit répondre officiellement cette après-midi aux propositions des pays du Golfe dans le cadre d'une réunion des ministres arabes des Affaires étrangères prévue au Koweït.
Décisions courageuses
Dans son homélie dominicale, le patriarche a exhorté les dirigeants à accepter toute "main tendue" permettant de sortir le pays de la crise. "L’État doit prendre des décisions courageuses et ne peut pas occulter certaines vérités pour protéger la prolifération des armes et justifier les violations" de certains, a-t-il déclaré, en allusion probable à la réponse préparée par les autorités aux propositions faites par le Koweït.
Le patriarche a en outre souhaité que les responsables politiques libanais "aient davantage recours au dialogue afin de sauver le pays de ses crises économique, financière, sociale et sécuritaire". Il a exprimé l'espoir que les élections de mai permettront l'accès au Parlement de "députés libres, qui croient au dialogue", appelant dès lors tous les Libanais à participer au scrutin. "Il s'agit d'une échéance démocratique qui permettra au peuple d'exercer son droit à s'exprimer, poser des questions et demander des comptes, et d'une opportunité pour choisir la direction que va prendre le Liban", a-t-il ajouté. Il a exhorté les Libanais "et surtout les forces militantes qui refusent le fait accompli, les atteintes aux pays-amis et réclament l'application des résolutions internationales" à "faire face à toute tentative de contourner" le scrutin.
Report des élections
Le prélat est par ailleurs revenu sur la décision, annoncée lundi dernier, de l'ancien Premier ministre Saad Hariri de ne pas se présenter aux élections et de se retirer de la vie politique, soulignant que cette annonce l'avait "surpris" et avait provoqué "de l'inquiétude et des protestations auprès d'une frange de la population". "Nous espérons que cette décision est liée aux circonstances actuelles", a ajouté Mgr Raï, qui a exhorté la communauté sunnite "et toutes ses forces, personnalités et élites" à ne pas boycotter les élections de mai, afin que celles-ci "expriment la position de tous les Libanais". "Il ne sera pas permis que certains invoquent la situation actuelle afin de réclamer un report du scrutin", a-t-il lancé.
La décision de M. Hariri a provoqué un séisme sur la scène politique, mettant dans l’embarras différents partis et alliés potentiels, comme le leader druze Walid Joumblatt, le président du Parlement Nabih Berry, mais aussi le Hezbollah qui entretenait ces dernières années un modus vivendi avec le chef du Courant du Futur. Le Premier ministre Nagib Mikati et l'ancien chef du gouvernement Fouad Siniora ont fait savoir vendredi qu'ils n'appelleront pas à un boycott sunnite des législatives, alors que l'ex-Premier ministre Tammam Salam s'était aligné sur la décision de M. Hariri. Le frère de Saad Hariri, Baha', a lui annoncé vendredi soir son intention de se lancer dans la bataille politique afin de "reprendre le Liban". Depuis Dar el-Fatwa, plus haute instance sunnite libanaise, le chef de l’État Michel Aoun avait insisté samedi sur l'importance de la participation politique de cette communauté.
commentaires (3)
Monseigneur, vous êtes le véritable vicaire du vrai Dieu au Liban. Nous savons que vous aimez tous les Libanais, que vous espérez voir vivre en Paix avec de l'amour du Christ, car sans Lui rien n'est possible et durable. Contrairement à ceux de ses partis terroristes et mafieux, osant se prétendre "Parti de Dieu" qui servent en réalité les ténèbres et plongent le pays dans les ténèbres. Sur un autre sujet, je m'étonne toujours de voir les puissances arabes sunnites à l'origine des organisations islamistes, et très souvent terroristes, gémir sujet des puissances arabo-perses chiites, elles mêmes à l'origine du même type d'organisation, malgré tout moins totalitaires.
Nicolas ZAHAR
19 h 54, le 31 janvier 2022