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Société - Intempéries

La tempête Hiba exacerbe les difficultés dans les foyers les plus défavorisés

Pour une habitante de Tripoli, se chauffer est devenu « un rêve inaccessible ». Nombreux sont ceux qui, notamment dans les quartiers pauvres du Nord, subissent le froid polaire sans moyens d’y faire face.

La tempête Hiba exacerbe les difficultés dans les foyers les plus défavorisés

Un vignoble couvert par la neige à Kefraya, dans la Békaa. Aziz Taher/Reuters

« Se chauffer est devenu un rêve inaccessible pour mes enfants depuis un mois. » Oum Ahmad, qui habite dans le quartier de Souweika, un des districts les plus défavorisés de Tripoli, fait partie de la majorité des Libanais qui ne peuvent plus se chauffer correctement et qui ont été frappés de plein fouet par la tempête qui souffle sur le pays depuis deux jours. « Nous ne pouvons pas utiliser de chaufferettes électriques, car nous n’avons pas pu renouveler notre abonnement au générateur. On nous demande désormais 75 dollars pour 5 ampères », confie la mère de famille à notre correspondant à Tripoli, Souhayb Jawhar. À Tripoli, la grande ville du Liban-Nord, les quartiers les plus pauvres subissent le froid, surtout que la plupart des habitants ont résilié leurs abonnements aux groupes électrogènes privés depuis que les tarifs ont flambé. « Se chauffer au gaz est également difficile car une bonbonne de gaz coûte 400 000 livres libanaises, ce qui équivaut au salaire mensuel de mon fils aîné qui travaille dans une boulangerie », ajoute Oum Ahmad.

Dans le quartier populaire de Bab el-Tebbané, la famille Zakhoury vit les mêmes souffrances avec l’arrivée du froid. « L’eau s’infiltre à l’intérieur car les murs sont fissurés et les réparations coûtent très cher. Nous sommes tout le temps emmitouflés dans des couvertures », raconte Naji, l’aîné de la famille qui brûle désormais du papier et quelques branches pour se réchauffer.

Un sentier boueux dans un camp de réfugiés syriens dans le Akkar. Photo Michel Hallak

« Nos tentes ne résistent pas »

Baptisée Hiba, la tempête qui frappe le Liban depuis mardi soir, continue de sévir sur l’ensemble du territoire. Dès hier matin, de fortes chutes de neige ont enveloppé certains villages à partir de 700 mètres d’altitude, rendant plusieurs routes inaccessibles. Les intempéries ont par ailleurs fait de nombreux dégâts au niveau de certains champs agricoles. Dans le Akkar, région particulièrement pauvre et rurale, de violentes rafales de vent avaient fait tomber des arbres et des panneaux publicitaires, et l’épaisseur de la neige était considérable en hauteur. Avec des températures proches de zéro, les familles pauvres de la région, incapables d’acheter du diesel ou du bois pour se réchauffer, ont passé une nuit extrêmement difficile. C’était surtout le cas pour les nombreux réfugiés syriens dans la région, installés dans des tentes littéralement noyées dans la boue et exposées au vent, à la pluie et à la neige. Hussein Abdallah, réfugié syrien habitant un camp informel à Sammouniyé dans le Akkar, redoute les inondations qui rendent le sol du camp boueux et noient les tentes. « La situation est extrêmement difficile. Nos tentes ne résistent pas aux pluies diluviennes », confie-t-il à notre correspondant au Akkar Michel Hallak. Alia Fayçal, réfugiée et mère célibataire de 6 enfants, a elle aussi du mal à se réchauffer. « Les conditions météo sont désastreuses et les prix du mazout et du bois sont élevés, alors que nous avons des moyens limités », raconte-t-elle. Avec la crise, les Libanais du Akkar partagent la même misère que les réfugiés. « La pauvreté est pratiquement généralisée aujourd’hui. La plupart des habitants ont désormais besoin d’être assistés », lance Ghassan Hosni, épicier à Bebnine. Même calvaire pour les petits producteurs : dans le Akkar, plusieurs éleveurs de poules ont retrouvé de nombreuses volailles mortes hier matin à cause du froid, étant dans l’incapacité de chauffer les fermes. Et dans les régions côtières du Akkar, la hausse rapide du niveau du fleuve Nahr al-Kabir a fait craindre des crues qui risquent d’inonder les champs agricoles et les villages alentour. D’ailleurs, de nombreuses cultures ont été endommagées hier dans la plaine du Akkar à cause du verglas. L’effondrement se ressent également du côté des institutions publiques : dans le village de Kobeyate au Akkar, les autorités locales ont demandé aux habitants dans un communiqué publié hier d’éviter de se rendre dans le jurd ou les montagnes avoisinantes en raison de l’incapacité de les secourir s’ils sont bloqués par la neige. « Les véhicules de la Défense civile et du ministère des Travaux publics sont en panne », ont-ils admis.

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Le réseau électrique n’y a pas échappé non plus. À Zahlé, toujours dans la Békaa, le groupe privé Électricité de Zahlé (EDZ) a révélé que le réseau électrique de la ville s’est « effondré » dans la nuit de mardi à mercredi, en raison de la forte consommation de courant. EDZ a appelé les habitants à éviter « de trop utiliser le chauffage électrique » afin de ne pas surcharger le réseau.

Une promeneuse éclaboussée par les vagues sur la corniche à Beyrouth. Photo Mohammad Yassine

Routes bloquées

La neige avait par ailleurs gelé la circulation hier en montagne, et de nombreuses écoles, comme à Baalbeck ou à Denniyé, avaient fermé leurs portes. Le ministère des Travaux publics a annoncé par ailleurs que ses équipes avaient commencé à déblayer les routes montagneuses dès 4h à l’aube. Il a appelé les citoyens à éviter de se rendre en montagne. Le Centre de gestion du trafic routier (TMC) a aussi demandé aux automobilistes de ne pas garer leurs véhicules à proximité d’arbres, de panneaux publicitaires ou en bord de mer, compte tenu des fortes rafales de vent. Dans le seul caza de Bécharré, la neige a recouvert la majorité des villages à partir de 700 mètres d’altitude, rapporte l’Agence nationale d’information. Recouverte d’un mètre de neige, la route de Bécharré jusqu’aux Cèdres était complètement bloquée hier matin, tout comme les axes de Hadath el-Jebbé, Tannourine et Aïnata-Les Cèdres. L’Agence nationale d’information rapporte également que d’autres routes à travers le territoire sont devenues impraticables à cause des chutes de neige : Ouyoun el-Simane-Hadath Baalbeck, el-Mnaytra-Hadath Baalbeck, Akoura-Hadath Baalbeck, Jurd Marbine-Hermel, Hermel-Sir el-Denniyé, Maasser el-Chouf-Kefraya, Tannourine-Laklouk et Tannourine-Hadath el-Jebbé. Dans la Békaa, des chutes de neige ont été observées à partir de 900 mètres d’altitude, selon notre correspondante Sarah Abdallah. Les routes de la région étaient complètement bloquées à partir de 1 500 mètres. Les équipes du ministère des Travaux publics se sont chargées de déblayer les routes principales dans les villages de Aïnata, Deir el-Ahmar et Yammouné. Dans le Hermel, la plupart des routes étaient bloquées par les neiges, notamment celles reliant la région à Kobeyate, Mechmech et Denniyé.

Dans le Sud, notre correspondant Mountasser Abdallah rapporte l’inquiétude des habitants de la région mardi soir, notamment à cause des vents violents. Les ports de pêche et de commerce de Tyr étaient fermés hier. Dans cette ville côtière, de nombreux terrains agricoles et des serres ont également été endommagés.

« Se chauffer est devenu un rêve inaccessible pour mes enfants depuis un mois. » Oum Ahmad, qui habite dans le quartier de Souweika, un des districts les plus défavorisés de Tripoli, fait partie de la majorité des Libanais qui ne peuvent plus se chauffer correctement et qui ont été frappés de plein fouet par la tempête qui souffle sur le pays depuis deux jours. « Nous ne...

commentaires (5)

Il est temps que les Syriens et les Palestiniens et tous les autres partent de ce petit Liban. Il est temps aussi de construire une belle prison à 1000 m d'altitude pour y mettre notre crasse politique et affairiste. Il est temps de dire aux Américains, Arabes, Perses, Turques...Qu'ils dégagent aussi. Il est temps aussi que les bourgeois libanais cessent d'importer des esclaves au pays des cèdres

Nicolas ZAHAR

21 h 43, le 20 janvier 2022

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Commentaires (5)

  • Il est temps que les Syriens et les Palestiniens et tous les autres partent de ce petit Liban. Il est temps aussi de construire une belle prison à 1000 m d'altitude pour y mettre notre crasse politique et affairiste. Il est temps de dire aux Américains, Arabes, Perses, Turques...Qu'ils dégagent aussi. Il est temps aussi que les bourgeois libanais cessent d'importer des esclaves au pays des cèdres

    Nicolas ZAHAR

    21 h 43, le 20 janvier 2022

  • Je me demande si C... qui prêche de récolter les informations directement du terrain plutôt que de derrière un ordinateur a lui-même/elle-même récolté son information directement du terrain avant de se forger son opinion tant éclairée...

    Haroun Al Rashid

    12 h 15, le 20 janvier 2022

  • Ces "techniciens" qui attribuent des aides, probablement devraient ils Se rendre compte d’un phénomène ou d’un sujet pour mieux le comprendre, Récolter des informations d’une enquête derrière son ordinateur ou au téléphone ne permet pas d’obtenir les faits réels du terrain, de quel droit un Libanais peut il être moins bien traité, d'autant qu'au même titre que les autres il est réfugié dans son propre pays, n'a t il donc pas droit à des aides, autres que la "fameuse" carte de rationnement prévue depuis des lustres.......

    C…

    08 h 27, le 20 janvier 2022

  • L'agence de l'ONU pour l'aide aux réfugiés Palestiniens (Unrwa) a lancé mercredi un appel spécial pour aider les réfugiés palestiniens au Liban qui sont confrontés à des difficultés et à une vulnérabilité accrues ... On voit là une réel incohérence doublée d'une grande injustice à l'égard de (maintenant) des millions de Libanais qui souffrent, avec dignité de la situation actuelle. Comment les autorités peuvent elles accepter cet état de fait..?

    C…

    08 h 07, le 20 janvier 2022

  • Quand on est réfugiée et dans la précarité, on ne fait pas six enfants! Notre chère Mme Faycal roucoule et chante a l’évidence moins maintenant que la bise est venue... Le temps des amours est bien fini, il faut assumer le célibat et peut-être est-il temps de rentrer au pays et de laisser des emplois aux non moins nombreux habitants de Tripoli?

    Mago1

    02 h 59, le 20 janvier 2022

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