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Société - Réveillon de la Saint-Sylvestre

Comment les Libanais s’apprêtent à accueillir le Nouvel An malgré la crise

Beaucoup privilégieront les soirées à la maison cette année avec un budget serré pour l’alcool et la nourriture. Dans le même temps, et parce que la société libanaise n’en est pas à un paradoxe près, les soirées dansantes hors de prix affichent complet...

Comment les Libanais s’apprêtent à accueillir le Nouvel An malgré la crise

Le centre-ville de Beyrouth, illuminé pour accueillir les fêtes de fin d’année. Photo Houssam Chbarro

Après avoir passé la majeure partie de 2021 à se serrer la ceinture, Carine et son mari sont prêts à se laisser aller à quelques dépenses, le temps d’accueillir la nouvelle année. Parent de deux enfants âgés de 11 et 14 ans, ce couple de la classe moyenne essaie toutefois de contrôler ses dépenses au maximum dans ce contexte de crise sans précédent qui écrase le Liban. « D’habitude, nous louons un chalet à la montagne avec plusieurs autres familles pour le réveillon de la Saint-Sylvestre. Nous nous partageons le coût des boissons et de la nourriture, et nos enfants s’amusent ensemble. Sauf que cette année, tous les hôtels et maisons d’hôte affichent des prix en dollars et les tarifs ne sont pas vraiment abordables », raconte Carine à L’Orient-Le Jour. Une tentative de louer un chalet au Chouf, histoire de ne pas changer les habitudes et de retrouver, un moment du moins, le goût de la vie « d’avant », est tombée à l’eau. « La plupart de nos amis ont trouvé que c’était très cher et que la dépense n’en valait pas la peine. Nous avons alors décidé, mon mari et moi, que nous allions quand même essayer de sortir pour la Saint-Sylvestre, mais les restaurants facturent également en dollars. Des sommes assez folles pour une proposition plutôt modeste. Comme si la crise ne leur avait rien appris », déplore Carine. Pour cette jeune femme, l’option la plus abordable reste, pour le moment, de « fêter le réveillon à la maison, avec les enfants ». « C’est mieux en période de crise sanitaire et ça coûte moins cher », juge-t-elle finalement.

Nombreux sont ceux qui achèteront moins d’alcool pour le réveillon de la Saint-Sylvestre, après la flambée des prix de ce genre de produits. Photo Hassan Assal

Budget limité

Comme Carine et sa famille, nombreux sont ceux qui privilégieront cette année les soirées à domicile ou chez des amis, afin de limiter les dépenses notamment. Philippe, 39 ans et employé dans la communication, s’apprête à se rendre chez l’un de ses amis qui possède un chalet sur la côte. « Nous avons l’habitude de nous retrouver là-bas chaque année avec un grand groupe d’amis. De ce point de vue, rien n’a vraiment changé. Mais je pense que cette année, on va s’adapter à la crise en termes de boissons et de nourriture », confie Philippe. « D’habitude, nous aimons nous faire plaisir en achetant les meilleures bouteilles. Cette fois-ci, nous achèterons certainement moins d’alcool et moins de nourriture qu’avant », poursuit-il. Selon lui, avant la crise, chacun des convives dépensait aisément en moyenne 100 dollars pour célébrer le passage à la nouvelle année, ce qui équivalait à environ 150 000 livres libanaises au taux officiel de 1 507 livres pour un dollar. « Crise oblige, on va essayer de dépenser un maximum de 50 dollars par personne cette année (soit environ... 1 370 000 livres au taux actuel sur le marché parallèle) », dit-il.

L'éditorial de Issa Goraïeb

L’enfer du double jeu

Quant aux plus jeunes, ils se creusent encore plus la tête pour pouvoir réveillonner à petit prix. Yara, une étudiante de 21 ans qui occupe depuis peu un premier emploi, planifie une soirée entre amis, dans une maison héritée de ses grands-parents à Jbeil. « J’ai la chance de disposer d’une maison vide, ce qui me permettra ainsi qu’à mes amis d’économiser les frais de location d’un appartement pour la soirée », souligne Yara, qui avait l’habitude de passer la Saint-Sylvestre à la montagne. « C’est cher cette année et le Covid-19 nous fait peur. On nous a proposé de louer des chalets à 400 dollars la nuit. Mais ils étaient étroits et lugubres, et avec la dévaluation ce sont des sommes énormes pour des étudiants comme nous. Nous avons donc choisi l’option la plus raisonnable », raconte-t-elle.

Photo Mohammad Yassine.

« Personnellement, je ne paierais pas autant »

Comme le Liban n’en est pas à un paradoxe près, du côté des traditionnelles soirées dansantes et des boîtes de nuit, certains endroits affichent déjà complet pour la soirée du 31 décembre, malgré les prix élevés et l’absence des stars de la chanson qui ont déserté le pays cette année pour se tourner vers les pays du Golfe.Contacté par L’OLJ, un responsable de l’événementiel dans une boîte de nuit de Jbeil indique que l’endroit, qui propose une soirée animée par un chanteur, affiche complet depuis une semaine. « Les prix varient entre 300 000 et 700 000 livres libanaises, selon l’emplacement des tables par rapport à la scène. Il y a même des zones VIP payées entre 6 et 8 millions de livres et qui peuvent accueillir des groupes de personnes. Toutes ces places ont été réservées », indique le jeune homme, sous couvert d’anonymat. Il précise que les boîtes de nuit de Jbeil et Batroun, deux villes du littoral très cotées au nord de Beyrouth, proposent des programmes animés par des chanteurs, avec des tarifs allant de 300 000 à 800 000 livres libanaises par personne. Malgré cela, elles seront probablement bondées le 31 décembre...

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« Je ne pense pas que les prix soient raisonnables dans un contexte de crise. Personnellement, je ne paierais pas autant pour une soirée de la Saint-Sylvestre. La qualité de l’alcool servi lors de ces soirées laisse à désirer et les gens seront serrés comme des sardines, sans aucun respect des mesures de distanciation relatives à la pandémie de Covid-19 », reconnaît cet employé. Il révèle par ailleurs que « la plupart des clients de la boîte perçoivent des salaires en dollars et règlent leurs factures en dollars et en espèces », une aubaine pour les restaurateurs.

Un groupe de personnes faisant la fête dans une boîte de nuit de la capitale. Photo Elie Saba

Une soirée comme les autres

Du côté des bars beyrouthins de Hamra ou de Mar Mikhaël, la célébration de la Saint-Sylvestre devrait ressembler à n’importe quelle autre soirée de l’année, du moins en termes de tarifs. « Nous n’avons pas de formules spéciales pour le Nouvel An et nous ne demanderons pas de contributions minimales à nos clients, explique André Malak, dont la compagnie gère plusieurs bars et restaurants à Beyrouth. Pour nous, le 31 décembre sera similaire aux autres soirs. Les clients paieront ce qu’ils auront consommé. Les prix resteront les mêmes tant que le taux du dollar (sur le marché parallèle) continuera d’être stable », explique-t-il à L’OLJ. Léa, une enseignante universitaire de 32 ans, a fêté le Nouvel An dans un bar de Hamra l’année dernière et se dit prête à renouveler l’expérience. « Ce qui me plaît, c’est que l’on paie ce que l’on consomme et c’est beaucoup mieux que de devoir s’acquitter de formules toutes prêtes, en dollars de surcroît. Je retrouverai certainement mes amis dans un bar pour un verre, histoire de marquer le coup », souligne-t-elle.

Après avoir passé la majeure partie de 2021 à se serrer la ceinture, Carine et son mari sont prêts à se laisser aller à quelques dépenses, le temps d’accueillir la nouvelle année. Parent de deux enfants âgés de 11 et 14 ans, ce couple de la classe moyenne essaie toutefois de contrôler ses dépenses au maximum dans ce contexte de crise sans précédent qui écrase le Liban....

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