La crise diplomatique avec les pays du Golfe, née des propos du ministre libanais de l’Information sur la guerre du Yémen, s’est aggravée dimanche, Georges Cordahi, soutenu par le Hezbollah, affirmant que sa démission était "hors de question". Alors que l'affaire prend l'allure d'un bras de fer avec l'Arabie saoudite qui a dénoncé la mainmise du Hezbollah sur le pays, le secrétaire d’État américain Anthony Blinken a évoqué le Liban avec son homologue saoudien, Fayçal ben Farhan, en marge du sommet du G 20 à Rome.
Samedi, le ministre libanais des Affaires étrangères, Abdallah Bou Habib, qui préside une cellule ministérielle chargée de résoudre la crise diplomatique, avait précisé être "en contact avec les Américains, car ils sont capables de résoudre cette crise". Il avait également indiqué que le chargé d'affaires de l'ambassade des États-Unis au Liban, Richard Michaels, avait brièvement participé à la première réunion de la cellule.
Cette crise diplomatique va au-delà des propos du ministre Cordahi et reflète une lutte d'influence entre l'Iran et l'Arabie saoudite, dont le Liban paie le lourd tribut. Le ministre saoudien des Affaires étrangères a affirmé que son pays avait pris la décision de se désengager du Liban car le Hezbollah "domine la scène politique". "La domination du Hezbollah dans le système politique au Liban nous inquiète et rend inutile pour l'Arabie saoudite et les autres pays du Golfe de traiter avec ce pays", a-t-il déclaré à la chaîne de télévision Al-Arabiya. Des responsables du parti chiite ont aussitôt pris fermement la défense de M. Cordahi. "Ma démission du gouvernement est hors de question", a assuré dans une déclaration à la chaîne locale al-Jadeed le ministre Cordahi, qui avait été choisi par les Marada, le parti chrétien du Liban-Nord.
Dans une émission télévisée datant du 5 août et diffusée lundi, Georges Cordahi, qui n'était pas à l'époque membre du gouvernement, avait qualifié d'''absurde" la guerre menée depuis 2015 au Yémen par une coalition militaire en appui au gouvernement, et estimé qu'il "était temps qu'elle s'arrête". Il avait ajouté que les rebelles houthis, soutenus par l'Iran, se défendaient "face à une agression extérieure" et que "leurs maisons, leurs villages, leurs mariages et leurs enterrements étaient régulièrement bombardés" par la coalition.
L’Arabie saoudite avait rappelé vendredi son ambassadeur au Liban et décidé l'expulsion de l'ambassadeur libanais, ainsi que l’arrêt de toutes les importations libanaises, en réaction aux propos du ministre. Trois autres pays du Golfe ont adopté des mesures de rétorsion similaires, en signe de solidarité avec le royaume wahhabite : les Émirats arabes unis, le Koweït et Bahreïn. Les Émirats arabes unis ont appelé dimanche leurs ressortissants encore au Liban à quitter le pays au plus vite. Seuls deux pays du Conseil de coopération du Golfe, le Qatar et Oman, n’ont pas pris de mesures de rétorsion à l’égard du Liban et le ministre des Affaires étrangères, Abdallah Bou Habib, a appelé ses homologues de ces deux pays pour les remercier.
La "domination" du Hezbollah
Interrogé au sujet des déclarations de M. Cordahi, le ministre saoudien ben Farhan a estimé que "les commentaires du ministre sont le symptôme d’une réalité, qui est que la scène politique libanaise continue d’être dominée par le Hezbollah, un groupe terroriste qui arme, équipe et entraîne la milice des houthis". "Pour nous, l’affaire est plus large que les commentaires d’un seul ministre, et constitue une indication de l’état dans lequel se trouve le Liban. C’est pourquoi ne ne voyons pas la nécessité d’y maintenir un ambassadeur", a-t-il encore dit. A la chaîne al-Arabiya, il avait aussi déclaré : "Il n'y a pas de crise avec le Liban mais une crise au Liban en raison de l'hégémonie iranienne. La domination du Hezbollah sur le système politique au Liban nous inquiète".
Le Premier ministre libanais Nagib Mikati avait implicitement appelé M. Cordahi à démissionner, lui demandant de "prendre en compte l’intérêt national". Trois anciens Premiers ministres ont aussi réclamé sa démission. Mais le Hezbollah, allié des Marada, s’est mobilisé pour soutenir le ministre et s’est opposé à son départ, aggravant la polarisation politique au Liban.
Le député Hassan Ezzeddine a ainsi estimé que "l’Arabie saoudite a pris les propos du ministre comme prétexte pour menacer les Libanais, s’ingérer dans leurs affaires intérieures (…) et créer une crise diplomatique et politique pour encercler le Liban". De son côté, le député Hassan Fadlallah a condamné "les pressions exercées sur le ministre de l’Information, qu’elles viennent de parties au sein du gouvernement ou de parties extérieures". Déjà samedi, le chef du groupe parlementaire du Hezbollah Mohammad Raad s’était déchaîné contre l’Arabie et avait accusé "ceux qui veulent provoquer la crise actuelle au Liban" de tenter de torpiller les prochaines élections prévues fin mars.
L'appel de Raï
Pour sa part, le chef de l’Église maronite Béchara Raï, qui avait reçu samedi en fin de journée M. Cordahi, a appelé le chef de l’État Michel Aoun, ainsi que le Premier ministre Nagib Mikati, à prendre "une mesure décisive" pour désamorcer la crise entre le Liban et les pays du Golfe, sans demander explicitement la démission du ministre. Le prélat a également exprimé l'espoir que les dirigeants ne se "laisseront pas entraîner dans un jeu entre les nations, notamment au cours de cette période régionale délicate".
Un vrai patron dirige son entreprise pour qu’elle réussisse. Au Liban on a un président qui se dit être le plus fort mais qui est incapable de démettre un tartenpion nommé ministre parce qu’il est une marionette de l’agent syrien du Nord.
21 h 02, le 02 novembre 2021