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Politique - Gouvernement

Les nombreux enjeux et défis qui attendent le cabinet de Mikati

Réformes, négociations avec le FMI, politique étrangère... Le chemin du cabinet bigarré du Premier ministre est semé d’embûches.

Les nombreux enjeux et défis qui attendent le cabinet de Mikati

Les négociations avec le FMI pourraient devenir matière à conflit au sein de la nouvelle équipe. Ici, le siège de l’institution à Washington. Photo Bigstock

Sur la photo-souvenir traditionnelle du nouveau gouvernement présidé par Nagib Mikati, formé le 10 septembre dernier après treize mois de vacance, les ministres sont souriants. Rien, toutefois, ne prête à penser que l’équipe gouvernementale, qui devra assurer sa mission dans les circonstances très difficiles de l’effondrement économique du Liban, forme une équipe soudée. L’anatomie du gouvernement, tributaire des forces politiques qui s’en divisent les parts, suggère que cette équipe est très similaire aux précédentes dans sa composition. Et les choix difficiles qui l’attendent devraient, selon plusieurs analystes interrogés, faire resurgir les antagonismes qui la caractérisent. Parmi les dossiers potentiellement explosifs, les négociations avec le Fonds monétaire international (FMI), les choix économiques à prendre en vue des réformes attendues, la politique étrangère…

L'éditorial de Issa Goraïeb

Les bouffons de la crise

« Les factions politiques qui forment ce gouvernement sont les mêmes que dans celui de Hassane Diab, il n’y a pas eu de grand changement, constate d’emblée l’analyste politique et économique Sami Nader. À mon avis, l’heure de vérité sonnera bientôt. » Selon l’expert, le premier grand test de ce gouvernement sera l’élaboration de la politique économique qui devra servir de base aux négociations avec le FMI. « Pour rappel, les précédentes négociations se sont interrompues (en 2020) en raison du manque d’accord sur le plan, mais surtout sur les chiffres des pertes (dans les bilans des banques et de la Banque du Liban, NDLR), poursuit-il. Deux camps se sont opposés à ce propos, celui proche de la Banque du Liban qui a chiffré les pertes à 40 milliards de dollars, et ceux qui, se basant sur l’étude de Lazard (cabinet de conseil financier international mandaté par le cabinet Diab en 2020 pour l’épauler dans le processus de restructuration de sa dette, NDLR), les estiment à 86 milliards. Or ces divisions existent toujours, ce qui n’augure rien de bon sur la cohésion gouvernementale. » Sami Nader qualifie ce cabinet de « gouvernement du strict minimum », qui ne pourra probablement pas compter sur plus que les fonds tirés des droits de tirage spéciaux (DTS, Special Drawing Rights ou SDR en anglais) du FMI ou qui lui seront alloués par la Banque mondiale, c’est-à-dire en gros quelque 1,6 milliard de dollars.

« Si ce cabinet est issu d’un début d’entente entre les Français et les Iraniens et de quelques circonstances extérieures favorables, les divisions restent les mêmes et cette équipe ne peut être considérée comme capable de réformes profondes », estime-t-il.

Querelles sur les choix stratégiques ?

Ce nouveau gouvernement devra faire face à des défis qui lui sont propres, ainsi qu’à d’autres à caractère régional et international. Tel est l’avis de Fadi Ahmar, chercheur spécialiste en géopolitique du Moyen-Orient. « Le grand défi intrinsèque de ce gouvernement sera de travailler en équipe, alors que les conflits internes n’ont pas été résolus, estime-t-il. On en est aux mêmes antagonismes que par le passé. Si l’on prend seulement le dossier de l’électricité, qui sera l’une des principales réformes à entreprendre à la demande de la communauté internationale, on constate que le ministre de l’Énergie est toujours un proche du président du Courant patriotique libre (CPL, aouniste), Gebran Bassil, et que le ministre des Finances est une fois de plus nommé par le président du Parlement et du mouvement Amal, Nabih Berry. Assistera-t-on aux mêmes querelles entre ces deux formations politiques ? Rien ne permet de penser le contraire. »

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Le chercheur se pose plusieurs questions sur un autre dossier qui pourrait particulièrement diviser les composantes du gouvernement, à savoir celui des relations internationales, à un moment où le Liban en a plus que jamais besoin pour mener ses réformes en vue du redressement économique tant attendu. « J’ai été interpellé par les propos du nouveau ministre des Affaires étrangères Abdallah Bou Habib, qui a estimé que le Liban, qu’il se dirige vers l’Est ou vers l’Ouest en matière de politique étrangère, ne peut qu’entretenir les meilleures relations possibles avec les pays arabes. Ces propos sont fondamentaux parce que les réformes ne peuvent être menées qu’avec l’aide des pays arabes, les autres sources de financement étant largement insuffisantes pour cela. Et le Premier ministre a assuré qu’il allait frapper à toutes les portes. Or comment toutes ces intentions vont-elles se traduire ? » Ce qui inquiète Fadi Ahmar, c’est que non seulement les antagonismes au sein du gouvernement n’ont pas changé, mais l’attitude générale des pays arabes, et plus particulièrement de l’Arabie saoudite qui considère le Liban comme soumis au Hezbollah et à l’Iran, ne s’est pas modifiée non plus. « Ce gouvernement sera obligé, de surcroît, de poursuivre l’ouverture vers la Syrie qu’avait entamée son prédécesseur avec un feu vert américain (en vue de l’acheminement de gaz égyptien à travers ce territoire, NDLR), mais sans feu vert saoudien pour l’instant, ce qui complique les choses », ajoute-t-il. Plus encore, la formation du gouvernement est intervenue à un moment où le Hezbollah a pris un virage que le chercheur estime significatif avec l’importation de mazout directement d’Iran. « C’est la première fois que cette coopération du parti avec la République islamique prend un caractère économique et non plus simplement politique, qui de plus s’inscrit dans le cadre du marché signé entre les Iraniens et les Chinois en mars 2020, dit-il. À travers ses institutions et les discours de son secrétaire général Hassan Nasrallah, le parti chiite affiche une logique plus proche du socialisme. À l’opposé, il existe dans le pays une autre tendance nettement plus libérale, d’autant plus que les négociations avec le FMI prendront certainement le Liban dans une direction opposée à celle de ce parti. Comment celui-ci réagira-t-il et quelles querelles sur les choix stratégiques économiques en perspective ? »

Perdre le temps des Libanais

En résumé, ce sont les dossiers imminents qui pourraient créer des divisions au sein du gouvernement. Pour le chercheur en sciences politiques Jamil Mouawad, il s’agit principalement des négociations avec le FMI, d’éventuels amendements de la loi électorale (en prévision des législatives de mai 2022) ou encore de l’audit juricomptable de la Banque du Liban (une revendication portée par le président de la République notamment). Il pense que la question principale est de savoir s’il y aura un débat au sein du cabinet Mikati autour de ces grandes questions ou si les décisions vont être prises ailleurs et simplement exécutées par les ministres.

Pour mémoire

Pourquoi et comment le gouvernement Mikati est né

« En principe, le choix de la vision politique et économique est antérieur à la formation du gouvernement, qui vient la concrétiser par la suite, explique-t-il. Or dans le cas de ce gouvernement, et vu la manière avec laquelle il a été formé, l’équipe semble manquer de cohésion, les ministres n’ont visiblement pas discuté au préalable de leur vision des choses. Tout dossier peut ainsi devenir source de conflits. »

Selon le chercheur, dans ce cas de figure, il existe deux options possibles: soit les choix stratégiques vont diviser une équipe au sein de laquelle les mêmes antagonismes persistent, soit les ministres devront simplement exécuter des décisions prises par d’autres, agissant comme de simples marionnettes. « Dans les deux cas, ils seront en train de perdre le temps des Libanais et d’agir en complices de la classe politique responsable de l’effondrement économique du pays », affirme-t-il.

Sur de nombreux dossiers, ce gouvernement est attendu au tournant. Si l’on en croit les expériences passées, des fissures sont susceptibles d’apparaître tôt ou tard dans le fragile édifice composite. Avec la différence que l’urgence de l’effondrement économique et les affres des pénuries qui minent le quotidien des Libanais font désormais des querelles habituelles un luxe inabordable.


Sur la photo-souvenir traditionnelle du nouveau gouvernement présidé par Nagib Mikati, formé le 10 septembre dernier après treize mois de vacance, les ministres sont souriants. Rien, toutefois, ne prête à penser que l’équipe gouvernementale, qui devra assurer sa mission dans les circonstances très difficiles de l’effondrement économique du Liban, forme une équipe soudée....

commentaires (4)

Les defis sont vraiement important pour ce nouveau gouvernement. Auront-ils la force et surtout le pouvoir de se défaire du colonialiste Iranien. Chapeau s''ils y arrivent. Sinon tous les armements et les aides faites par l'armée Américaine auront le meme sort qu'en Afganistan..

DRAGHI Umberto

20 h 44, le 15 septembre 2021

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Commentaires (4)

  • Les defis sont vraiement important pour ce nouveau gouvernement. Auront-ils la force et surtout le pouvoir de se défaire du colonialiste Iranien. Chapeau s''ils y arrivent. Sinon tous les armements et les aides faites par l'armée Américaine auront le meme sort qu'en Afganistan..

    DRAGHI Umberto

    20 h 44, le 15 septembre 2021

  • - PREMIER A, DEFI : L,HONETTETE ! - PREMIER DEFI : L,ARMEE LIBANAISE SEULE FORCE A POSSEDER DES ARMES SUR LE SOL NATIONAL POUR DEFENJDRE LA PATRIE. - SECOND DEFI : RECUPERER L,ARGENT VOLE ET LE RETOURNER A QUI DE DROIT, ECONOMIES D,UNE VIE DES GENS. - TROISIEME DEFI : RECUPERER VOS PREROGATIVES DES CONCESSIONS FAITES ET ANNULER LES PREROGATIVES OBTENUES PAR CHANTAGE ET BLOCAGE PAR AOUN ET SON GENDRE. - EN RENDANT L,ARGENT VOLE AUX GENS ET REMET EN MARCHE LA CONSOMMATION DONC L,ECONOMIE. ET LES PLUS GRANDS DEFIS : ELECTRICITE, EAU, CARBURANTS, DENREES ALIMENTAIRES, PAIN, MEDICAMENTS, HOPITAUX, ET TOUTES LES AUTRES CHOSES CAR IL N,Y A RIEN QUI MARCHE DANS LE PAYS ET TOUT DEVIENT DEFI POUR VOTRE GOUVERNEMENT. HYPER DEFI, LES LEGISLATIVES QUI DEVRAIENT ETRE DEMOCRATIQUES ET LIBRES, CE QUI N,EST PAS LE CAS JUSQU,AUJOURD,HUI. PAS D,ELECTIONS LIBRES ET DEMOCRATIQUES AVEC L,UNE DES COMMUNAUTES ARMEE ET ETAT DANS L,ETAT. TOUT EST A REFAIRE DANS LE PAYS. GOUVERNER AVEC LA TRINITE DIABOLIQUE DU MAL EN PARTENARIAT EST L,IMPOSSIBILITE MEME.

    LA LIBRE EXPRESSION

    19 h 01, le 15 septembre 2021

  • Moi je voudrais juste comprendre quel sera le role du Vice Premier Ministre le Syrien Saade Chami. Que vient faire ce mec dans cette galere? Serait-ce l'oeil de Damas pou mieux controler ce gouvernement d'incapables. Rien qu'a entendre les commentaires de la bouche de ces messieurs, nous comprenons immediatement que ce gouvernement ene vaut pas un pet de lapin...

    IMB a SPO

    18 h 16, le 15 septembre 2021

  • aux ministres du gouv, il n'est demande qu'une seule et unique qualite : LEUR PATRIOTISME AU LIBAN ! avec cette arme entre les mains, personne ne peut freiner leur boulot.

    Gaby SIOUFI

    10 h 27, le 15 septembre 2021

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