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Politique - Maghdouché-Aanqoun

Une dispute sur l’essence manque de semer la discorde confessionnelle au Sud

Les tensions du week-end se sont calmées entre les deux localités, après la promesse de livrer le principal suspect des agressions au couteau.


Une dispute sur l’essence manque de semer la discorde confessionnelle au Sud

Les tensions ont entaché le weekend des deux villages du sud, avec disputes, agressions au couteau et fermeture de routes entre Aanqoun et Maghdouché. Photo envoyée par un témoin

Si les interminables files d’attente devant les stations d’essence éprouvent tous les jours les nerfs des Libanais, elles ont carrément failli tourner à la discorde socio-confessionnelle entre deux villages du Liban-Sud qui n’avaient auparavant jamais connu pareils problèmes : Maghdouché (localité à majorité chrétienne) et Aanqoun (à majorité chiite).

Les tensions ont commencé vendredi avec une bagarre dans une station-service à Maghdouché suivie d’une agression au couteau dont a été victime le Dr Hicham Hayek, un médecin qui tentait apparemment de s’interposer entre les adversaires. Depuis cet incident, la tension n’a fait que monter, atteignant son paroxysme dimanche, avec une nouvelle agression au couteau à Maghdouché sur Assaad el-Sariji (chauffeur du député Michel Moussa), poursuivi jusqu’à son domicile.

En soirée, lorsque l’armée a voulu arrêter à Aanqoun le principal suspect dans l’affaire de l’agression contre le Dr Hayek, Assaad Chehayteli, les proches de l’individu en question ont manifesté, bloquant la route qui mène au village voisin et s’adonnant à des actes de vandalisme. Les gestes d’apaisement suite à une intervention directe du président du Parlement et chef du mouvement Amal Nabih Berry auprès des notables des deux villages ont réussi à ramener provisoirement le calme. Mais, comme le dit le moukhtar de Maghdouché Émile Constantine à L’Orient-Le Jour, « le feu couve sous la cendre ».Fouad Hanna, membre du conseil municipal de Maghdouché, explique à notre journal les dessous de l’incident. « Notre village compte de grandes stations-service relevant de compagnies pétrolières, et qui reçoivent de l’essence régulièrement, alors que les stations de Aanqoun appartiennent à des individus qui s’approvisionnent sur le marché, dit-il. Pour cette raison, les stations de Maghdouché attirent une clientèle qui ne se limite pas au village. Or nous remarquons qu’à l’instar du reste du pays, certaines personnes remplissent leur réservoir quasi quotidiennement, ce qui fait porter sur eux de forts soupçons de revente de cette essence au marché noir. Voilà pourquoi le conseil municipal a décidé de privilégier les habitants du village, en les desservant trois fois plus que les étrangers de passage. Et c’est cela qui a déclenché les hostilités. »

L’incident, à la base individuel, a pris des proportions extrêmes et inattendues, mais les responsables locaux des deux villages se veulent rassurants. « Il n’y avait jamais eu de problème entre les deux villages, assure Émile Constantine. Au contraire, de nombreux habitants de Aanqoun ont reçu toute leur éducation chez nous, et les relations sont fraternelles. Mais cet incident a été provoqué par quelques voyous qui se rendaient un peu trop souvent aux stations-service, privant les automobilistes d’une essence précieuse. Quand ils n’ont plus obtenu ce qu’ils voulaient et qu’ils sont passés aux agressions au couteau, nous ne pouvions plus tolérer de tels actes. »

On retrouve la même attitude chez le moukhtar de Aanqoun, Mohammad Farhat. « Nous sommes tous attachés à la coexistence et dénonçons de tels actes, assure-t-il à L’OLJ. À la base, la tension est montée parce que les trois stations-service du village ne suffisent plus à desservir les 20 000 habitants de notre localité. Après l’incident et suite aux tensions et aux agressions, l’armée a voulu arrêter le principal suspect dans notre village, ce qui a provoqué la colère de sa famille et de ses proches qui ont bloqué la route. Il a donc fallu que les responsables politiques interviennent. Mais il est sûr que le coupable doit payer pour son acte et il sera livré ce lundi aux autorités. »

Quelle implication du mouvement Amal ?
Les incidents devant les stations d’essence ne se comptent plus dans toutes les régions libanaises. Alors, qu’est-ce qui a fait de cet incident-là une étincelle qui aurait pu déclencher un vrai conflit civil ? L’appartenance des deux localités à deux communautés religieuses différentes et les soupçons qui ont pesé sur le mouvement Amal de Nabih Berry, étant donné son influence sur le village de Aanqoun, ont entre autres enflammé les réseaux sociaux, sur lesquels les propos injurieux de tous bords se sont multipliés, jetant de l’huile sur le feu.

« Il est certain qu’avec les réseaux sociaux, l’affaire a pris une tournure confessionnelle assez étrangère aux gens de la région, habitués à cohabiter, affirme Jihad Tannous, un commerçant de Maghdouché. Et l’un des aspects qui ont contribué à envenimer le débat, c’est la présomption d’une implication d’Amal dans ces incidents (le mouvement chiite a très rapidement démenti tout lien avec les agresseurs de Aanqoun, NDLR). Or je peux vous dire que les agresseurs des deux habitants de Maghdouché sont des voyous que nous connaissons bien, et qui n’appartiennent à aucun parti politique. Ils ont d’ailleurs provoqué récemment des incidents dans les stations d’essence de leur propre village. » L’une des images qui ont fait le tour des réseaux sociaux, donnant l’impression que le conflit est de nature confessionnelle, montre une agression contre un petit autel religieux du village de Maghdouché. « Il s’agit d’un incident individuel au cours duquel des vitres ont été brisées, et qui ne s’est pas répété », assure Fouad Hanna. Il déplore cependant l’ampleur qu’a prise cet incident. « En tant que communauté chrétienne, nous sommes en minorité dans cette région, et nous tenons aux bonnes relations avec nos voisins, assure-t-il. Mais nous ne pouvons pas non plus renoncer à nos droits et à la dignité des habitants de ce village, et voilà pourquoi nous tenons à ce que les coupables soient poursuivis. » Le Dr Hayek lui-même confirme à notre journal avoir porté plainte contre son agresseur « parce qu’il faut qu’il paye pour son acte ».

Que l’incident dans une station-service à Maghdouché ait pu déclencher un conflit confessionnel ou pas, il constitue certainement un exemple des dérapages que la crise des carburants et la pression continue que subit la population peuvent provoquer. Combien d’autres signaux d’alarme faudra-t-il à la classe politique pour prendre conscience de la gravité de la situation ?

Si les interminables files d’attente devant les stations d’essence éprouvent tous les jours les nerfs des Libanais, elles ont carrément failli tourner à la discorde socio-confessionnelle entre deux villages du Liban-Sud qui n’avaient auparavant jamais connu pareils problèmes : Maghdouché (localité à majorité chrétienne) et Aanqoun (à majorité chiite). Les tensions ont...

commentaires (3)

Pendant ce temps Aoun refuse toujours de laisser se former un gouvernement. Il l’a dit et nous a prévenu, un chaos précédera une guerre qui est en train de se préparer et devinez qui paiera le prix fort. Les libanais acceptent jusque là l’inacceptable pour ne pas avoir à revivre une guerre meurtrière mais cela semble inévitable vu le projet de ces vendus pour dominer le pays. Tic tac. Chaque chose a une fin, pourvu que ça ne soit la fin de notre cher pays.

Sissi zayyat

12 h 49, le 31 août 2021

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Commentaires (3)

  • Pendant ce temps Aoun refuse toujours de laisser se former un gouvernement. Il l’a dit et nous a prévenu, un chaos précédera une guerre qui est en train de se préparer et devinez qui paiera le prix fort. Les libanais acceptent jusque là l’inacceptable pour ne pas avoir à revivre une guerre meurtrière mais cela semble inévitable vu le projet de ces vendus pour dominer le pays. Tic tac. Chaque chose a une fin, pourvu que ça ne soit la fin de notre cher pays.

    Sissi zayyat

    12 h 49, le 31 août 2021

  • Des jeunes chiites du village de Aanqounde ont fait amende honorable en repareant les autels chretiens endommagés à Magdouchieh . N'est ce pas la preuve finalement que nous sommes tous dans le meme bateau Liban et que le comportement de quelques individus mal élevés ne doit pas déteindre sur l'ensemble d'une communauté ! Cependant il est important que les auteurs de ces actes de vandalismes soient arretés par les autorités et que les responsables religieux chiites condamnent de tels actes afin qu'ils ne se reproduisent plus jamais surtout que les vandales l'ont fait au nom de leur foi ce qui est encore plus aggravant !

    nabil zorkot

    19 h 37, le 30 août 2021

  • Il était évident que tôt ou tard les échauffourées dans les stations prendraient une connotation confessionnelle, il serait judicieux de la part des propriétaires de stations, mais surtout des autorités, d'interdire la vente de carburant dans des gallons et autres réservoirs, ce qui contribue largement à cette pénurie de carburant. Nous avons suffisamment, au Liban, du matériel humain entre les militaires et les policiers qui permettraient de juguler ce problème.

    C…

    19 h 27, le 30 août 2021

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