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Politique - Éclairage

Pourquoi le Hezbollah s’est offert une escalade avec Israël

Ce regain de tension intervient alors que la formation chiite est de plus en plus prise à partie en interne, dans un contexte régional où l’Iran veut montrer ses muscles sur tous les fronts.

Pourquoi le Hezbollah s’est offert une escalade avec Israël

Bombardement israélien près du village de Kfarchouba, dans le sud du Liban, à la suite d’un échange de roquettes du côté libanais, le 6 août 2021. Mahmoud Zayyat/AFP

C’est la première fois depuis la guerre de juillet 2006 que le Hezbollah tire des roquettes contre Israël. Le parti chiite a revendiqué vendredi en avoir lancé des dizaines vers le plateau du Golan occupé depuis 1967 par l’État hébreu. Une action qui fait suite aux premiers raids aériens israéliens la veille contre le Liban depuis 2014. Mais ces raids menés sur la frontière libano-syrienne n’avaient pas ciblé des bastions du Hezbollah dans le sud du Liban.

Un regain de tension que n’a pas manqué de souligner la Force intérimaire des Nations unies au Liban (Finul), estimant qu’il s’agissait d’une escalade « très dangereuse » et appelant à un cessez-le-feu « immédiat ». Si les incidents opposant le Hezbollah à l’armée israélienne sont réguliers dans ce secteur, ils témoignent cette fois-ci d’une aggravation de la situation sans pour autant changer la donne : aucun des deux protagonistes n’est a priori disposé à une confrontation militaire. D’un côté comme de l’autre, l’heure est à la retenue. « Nous ne voulons pas d’une escalade en vue d’une véritable guerre, mais bien sûr nous sommes prêts à cela », a déclaré à des journalistes Amnon Shefler, un porte-parole de l’armée israélienne. Il a ajouté que le Hezbollah semblait être sur la même longueur d’onde : il souhaite « montrer qu’il contrôle le sud du Liban » mais est peu enclin à « une guerre totale ». Le choix de cibler des zones non habitées était un « signal » allant dans ce sens, selon lui.

Téhéran sur tous les fronts
La dernière séquence opposant le Hezbollah à Israël peut appeler différentes lectures. Son timing interroge, puisqu’elle s’est ouverte alors que le Liban commémore dans la douleur et la rage le premier anniversaire de la double explosion du port de Beyrouth, qui a ravagé des quartiers entiers de Beyrouth, faisant 218 morts et plus de 6 000 blessés le 4 août 2020.

L'édito de Issa GORAIEB

Feux de rampes

D’un point de vue régional, l’escalade s’insère dans un contexte plus large où l’Iran multiplie les démonstrations de force sur plusieurs fronts. En témoigne l’attaque au drone le 29 juillet contre le pétrolier Mercer Street – qui appartient à un Israélien – en mer d’Oman. L’attaque a été imputée à la République islamique qui a toutefois rejeté les accusations. Plus tôt cette semaine, les médias occidentaux ont cité des sources anonymes attribuant également à Téhéran le détournement d’un navire au large des Émirats arabes unis, tandis que plusieurs autres ont rencontré des problèmes techniques. En Syrie, Israël a considérablement étendu ces derniers mois – après une période d’accalmie – ses frappes aériennes contre des centres iraniens qui, selon lui, produisent des missiles et des armes. Pour Kassem Kassir, analyste politique proche du Hezbollah, les tirs de roquettes de vendredi constituent « une réponse aux récentes attaques israéliennes contre le Liban et contre certains des centres de résistance en Syrie ».

En Irak, au début du mois de juillet, les milices affiliées à Téhéran ont lancé cinq attaques de drones et de roquettes sur des bases américaines. Tandis que pour certains commentateurs, cet incident opposant la République islamique aux États-Unis sur le territoire irakien mettait en danger les négociations en cours à l’époque sur la réactivation du deal sur le nucléaire, d’autres ont ajouté que la manœuvre visait justement à faire pression sur Washington afin d’aboutir au plus vite à une réintégration américaine dans l’accord de Vienne et obtenir ainsi un allégement vital des sanctions à l’encontre de l’Iran.

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Les dernières actions du Hezbollah se déroulent également alors que l’investiture du nouveau président iranien, Ebrahim Raïssi, a eu lieu cette semaine. L’homme est un ultraconservateur aligné sur les positions du guide suprême de la révolution iranienne et pressenti pour lui succéder. Si son prédécesseur, Hassan Rohani, avait nourri l’espoir d’un apaisement des tensions avec Washington, M. Raïssi, lui, privilégie la défiance... dans la mesure de ses moyens. C’est le sens des différents discours qu’il a tenus à l’occasion de son intronisation, en insistant d’un côté sur la nécessité d’obtenir la levée des sanctions tout en assurant ne pas les conditionner « à la volonté des étrangers » et en exposant une vision de sa politique étrangère largement tournée vers l’approfondissement des relations avec Moscou et Pékin. Si Téhéran n’est certainement pas prêt à lâcher du lest concernant missiles et milices, il reste cependant déterminé à faire revivre une économie en lambeaux. Dans ces circonstances, la multiplication des fronts, y compris au Liban, pourrait s’expliquer par la détermination à accomplir cet objectif en faisant monter les enchères. Mais ces démarches semblent à ce stade plus donner du grain à moudre aux faucons américains et plus généralement à ceux qui émettaient des réserves quant à la reprise des pourparlers en avril, aujourd’hui au point mort. « L’une des hypothèses concernant ces évènements considère que cela fait partie d’une escalade régionale, que l’Iran essaie d’envoyer un message à partir du Liban au côté israélien et de montrer ce dont il est capable », commente Mohanad Hage Ali, chercheur au Carnegie Middle East Center. « Mais ce n’est pas forcément logique, car l’Iran a d’autres scènes que le Liban pour cela, d’autant que cela s’apparente à un jeu à somme nulle pour lui que de déclencher un conflit ici. Le Hezbollah ne serait pas en mesure de reconstruire les zones chiites détruites si cela devait se produire et il devrait faire face à un contrecoup en cas de conflit massif, puisque le discours passerait du “Kellon yaane kellon” à “Le Hezbollah est la principale source des maux du pays”. »

Piste syrienne
Car en interne, les récents événements opposant le Hezbollah à Israël s’inscrivent dans un contexte tendu pour le parti de Dieu. Directement pointé du doigt – comme l’ensemble de la classe politique – pour la catastrophe du 4 août 2020 et le piétinement de l’enquête qui doit faire la lumière sur les responsabilités ayant conduit à la tragédie, il doit aussi compter avec les soupçons autour d’une éventuelle piste syrienne et l’implication présumée d’hommes d’affaires syro-russes proches du régime dans l’acheminement vers le port de Beyrouth de la cargaison de nitrate d’ammonium responsable de la double explosion.

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Or le jour de la commémoration, deux roquettes lancées depuis le sud du Liban ont frappé Israël mais n’ont pas été revendiquées. « Selon une hypothèse, étant donné la connexion présumée de sociétés syriennes liées au régime à la double explosion du port, les roquettes auraient été lancées par des factions palestiniennes proches de Damas et couvertes par lui, et le Hezbollah aurait laissé faire. Dans un climat marqué par les appels à rendre des comptes, c’est une tentative de détourner l’attention et de déplacer la conversation ailleurs », avance M. Hage Ali.Accusé de couvrir la classe politique traditionnelle et de bloquer les institutions, le parti de Dieu doit aussi jongler avec les critiques de plus en plus nombreuses issues de sa propre base sociale, durement touchée par l’effondrement économique du pays. Alors qu’une partie de ses partisans – au-delà de la communauté chiite – lui reprochait politiquement son alliance avec le Courant patriotique libre et le mouvement Amal tout en louant sa place de leader de la résistance à Israël, la dernière séquence pourrait être pour le Hezbollah l’opportunité de mettre en veilleuse son caractère politique pour mieux exploiter le militaire. Mais même là, le vent commence à tourner lentement. En témoigne l’interception vendredi par les habitants du village à majorité druze de Chouaya, dans le caza de Hasbaya, d’un camion transportant un lance-roquettes à plusieurs canons utilisé par le Hezbollah. Dans une vidéo largement diffusée sur les réseaux sociaux, on y voit des villageois en colère reprochant au parti de mettre en danger les civils.

C’est la première fois depuis la guerre de juillet 2006 que le Hezbollah tire des roquettes contre Israël. Le parti chiite a revendiqué vendredi en avoir lancé des dizaines vers le plateau du Golan occupé depuis 1967 par l’État hébreu. Une action qui fait suite aux premiers raids aériens israéliens la veille contre le Liban depuis 2014. Mais ces raids menés sur la frontière...

commentaires (11)

Le Hezbollah a un projet et un seul: Transformer le Liban en une République Islamique comme en Iran et le mettre sous le Wali el Fakih. Toutes ses actions qu'elles soient politiques, sociales ou militaires ont pour but de mener vers ce but ultime. Ses actions tendent a provoquer des vagues d’émigration pour accélérer le processus qui lui donnera une supériorité démographique lui permettant avec le temps de s'imposer de facto. Les plus dangereux pour lui sont les partis Chrétiens et en particulier les FL car ils sont les seuls qui représentent le grain de sable qui enrayent leur machine et qui peuvent facilement mobiliser en face si nécessaire. Les événements de Ain el Remmaneh et récemment Gémmayzé le prouvent. De plus, eux comme leurs alliés, ils perdent sur le terrain tout azimut et a tous les niveaux. Ils useront de tous les moyens pour retarder le compte a rebours qui a en fait débuté en 2005. Je n'envie pas la position de Joumblatt et de Hariri qui ont essayé de jongler entre les deux courant. A présent ils leurs faudra trancher et s'il prennent les mauvaises décisions rien ne les sauvera plus cette fois. le peuple demandera des comptes et le communautarisme ne les protégera pas ou plus. Faites vos jeux messieurs rien ne va plus !

Pierre Hadjigeorgiou

09 h 40, le 09 août 2021

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Commentaires (11)

  • Le Hezbollah a un projet et un seul: Transformer le Liban en une République Islamique comme en Iran et le mettre sous le Wali el Fakih. Toutes ses actions qu'elles soient politiques, sociales ou militaires ont pour but de mener vers ce but ultime. Ses actions tendent a provoquer des vagues d’émigration pour accélérer le processus qui lui donnera une supériorité démographique lui permettant avec le temps de s'imposer de facto. Les plus dangereux pour lui sont les partis Chrétiens et en particulier les FL car ils sont les seuls qui représentent le grain de sable qui enrayent leur machine et qui peuvent facilement mobiliser en face si nécessaire. Les événements de Ain el Remmaneh et récemment Gémmayzé le prouvent. De plus, eux comme leurs alliés, ils perdent sur le terrain tout azimut et a tous les niveaux. Ils useront de tous les moyens pour retarder le compte a rebours qui a en fait débuté en 2005. Je n'envie pas la position de Joumblatt et de Hariri qui ont essayé de jongler entre les deux courant. A présent ils leurs faudra trancher et s'il prennent les mauvaises décisions rien ne les sauvera plus cette fois. le peuple demandera des comptes et le communautarisme ne les protégera pas ou plus. Faites vos jeux messieurs rien ne va plus !

    Pierre Hadjigeorgiou

    09 h 40, le 09 août 2021

  • POUR DONNER UNE CARTE A L,IRAN DANS SES NEGOCIATIONS.

    LA LIBRE EXPRESSION

    15 h 21, le 08 août 2021

  • Pourquoi ??? Tout simplement parce qu’il n’a rien à foutre de la population et des répercussions de ses actes sur cette même population. On doit prendre pour exemple ceux qui, avec courage, ont intercepté le camion avec ses lance-roquettes. Avez-vous remarqué le visage défait de l’homme qui a été pris à partie dans ce camion. Eh ben, eux aussi connaissent la peur. Dommage d’en arriver là

    mokpo

    21 h 48, le 07 août 2021

  • Pourquoi le Hezbollah s’est payé une escalade avec Israël ?? Parce qu’il est dégénéré et complexé . Il ferait mieux de repartir en Iran,,,

    Wow

    19 h 46, le 07 août 2021

  • Israëlhezeb : se lancent des roquettes et des pétards: la comédie infernale qu'ils nous font subir où ils se sont donné des rôles bien précis pour déchiqueter le Liban pour leur profit mutuel, style Film ameriki tawiiiiiiiiil....

    Wlek Sanferlou

    18 h 22, le 07 août 2021

  • HB peut tout s’offrir et se permettre dans ce pays qui est devenu un moulin à vent depuis que Aoun est devenu président et qu’il leur a juré fidélité sans faille. Il préfère la ramener une fois que le pays a été anéanti plutôt que de prendre une quelconque décision de président pour empêcher que cela n’arrive. QUEL PRÉSIDENT à la noix.

    Sissi zayyat

    15 h 44, le 07 août 2021

  • LES VENDUS HEBERGES OU LOCAUX PROVOQUENT. LES LIBANAIS PAIENT. ET LE... NE CONDAMNE PAS LES PROVOCATIONS. IL CONDAMNE LES RIPOSTES ALLANT JUSQU,A VOULOIR S,ADRESSER A L,ONU. TOUS SAVENT LES REPONSES. SANS PROVOCATIONS PAS DE RIPOSTES. SI SIMPLE QUE CA.

    LA LIBRE EXPRESSION

    12 h 16, le 07 août 2021

  • A l'origine de tous nos maux, il ne gouverne que lui-même, n'a de libanais que son village de naissance, promu au pouvoir par la Syrie et est à la solde de l'Iran, qui est-ce ? Le locataire du palais de Baabda,.

    Carlos El KHOURY

    07 h 40, le 07 août 2021

  • 2/2 J,AI OMIS DE NOTER : LA NOUVEAUTE DE LA RIPOSTE DES ISRAELIENS AUX TIRS "ISOLES" D'INCONNUS SUR LEUR TERRITOIRE- RIPOSTE TRES VIOLENTE SANS ETRE MEURTRIERE POUR AUTANT .

    Gaby SIOUFI

    07 h 34, le 07 août 2021

  • LOIN DE MOI- TRES TRES LOIN- DE DONNER LEGITIMITE AUX ARMES DU KHAMENAI LIBANAIS & DE SA MILICE, ENCORE MOINS ACCEPTER SES PRETEXTES , MAIS COMMENT EXPLIQUER LES ATTAQUES ISRAELIENNES QUI AVAIENT PRECEDE CELLES DES MILICES DU HEZB IRANIEN ?

    Gaby SIOUFI

    07 h 30, le 07 août 2021

  • Ah si seulement Israel pouvait nous débarrasser du Hezbollah une fois pour toute.

    Achkar Carlos

    00 h 11, le 07 août 2021

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