Le Qatar annonce une aide alimentaire mensuelle de 70 tonnes à l'armée libanaise

Le Qatar a annoncé mardi soir une aide alimentaire mensuelle de 70 tonnes à l'armée libanaise, frappée de plein fouet par la crise socio-économique qui secoue le Liban depuis deux ans et alors que le pays reste sans nouveau gouvernement depuis bientôt onze mois.

Selon l'agence de presse qatarie officielle QNA, l'aide a été annoncée lors de la visite express que le ministre des Affaires étrangères qatari, le cheikh Mohammad ben Abderrahmane al-Thani, a effectuée à Beyrouth mardi. Il avait été reçu par les principaux responsables politiques du pays, notamment le président de la République, Michel Aoun, le chef du législatif, Nabih Berry, le Premier ministre désigné, Saad Hariri, et le commandant en chef de l'armée, Joseph Aoun.

Toujours selon l'agence qatarie, l'aide à la troupe "s'inscrit dans le cadre des efforts constants du Qatar pour résoudre la crise politique au Liban, et traduit son engagement à aider la République libanaise et à se tenir aux côtés du peuple libanais, en partant de sa conviction portant sur l'importance des efforts conjoints arabes". Le ministre qatari a dans ce contexte salué le rôle de l'armée suite à l'explosion meurtrière du 4 août 2020 au port de Beyrouth.

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A la mi-juin, la France avait présidé une conférence d'aide réunissant une vingtaine de pays mobilisés pour l'armée libanaise, mais aucune annonce concrète n'avait été communiquée à l'issue de la réunion. L'armée avait formulé des besoins très précis d'aide immédiate (nourriture, médicaments, carburant, pièces détachées), s'élevant à plusieurs dizaines de millions d'euros. A l'été 2020, elle avait aussi annoncé qu'elle ne servirait plus de viande dans les repas proposés aux soldats, en raison de la flambée des prix des denrées alimentaires. La dépréciation a aussi fait fondre les salaires. Un simple soldat gagne environ 1,2 million de livres libanaises par mois, soit aux alentours de 800 dollars au taux de change officiel, mais de fait près de 80 dollars seulement au taux du marché noir.

Sur le plan politique, le chef de la diplomatie de l'émirat a réitéré l'appel du Qatar à "tous les protagonistes libanais afin qu'ils fassent prévaloir l'intérêt général de manière à former un gouvernement rapidement, en vue d'assurer la stabilité dans le pays", ajoute l'agence.

Pas d'initiative politique
Le Liban est sans gouvernement effectif depuis la démission de l'équipe de Hassane Diab dans la foulée de l'explosion meurtrière du 4 août 2020 au port de Beyrouth. Nommé en octobre de la même année pour former le nouveau cabinet, le leader du courant du Futur, Saad Hariri, n'arrive toujours pas à accomplir sa mission, en raison notamment d'un duel politico-personnel l'opposant au camp du chef de l’État, notamment le gendre de ce dernier, le leader du Courant patriotique libre, Gebran Bassil. Pendant ce temps-là, le Liban poursuit sa descente aux enfers, marquée par une paupérisation de la population et des pénuries de biens essentiels - essence, électricité, médicaments -. Une chute que rien ne semble pouvoir arrêter, en l'absence d'un cabinet réformateur.

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Tous à l’épreuve

Face à cette impasse, la communauté internationale fait pression pour que le pays du Cèdre se dote d'un cabinet qui mettrait sur les rails les réformes exigées pour redresser l'économie libanaise. Alors que les Européens examineraient un mécanisme pour sanctionner les politiques jugés responsables de l'impasse gouvernementale, certains médias libanais évoquaient récemment une "initiative" que porterait le ministre qatari afin de débloquer la crise, sans donner de détails sur le projet en question. Mais notre correspondante à Baabda Hoda Chédid indiquait mardi en soirée qu'il n'y avait pas "d'initiative' politique" de la part de Doha pour sortir le Liban de l'impasse politique actuelle. Le chef de la diplomatie qatarie s'est contenté d'exprimer devant ses hôtes la volonté de son pays d'aider le Liban à surmonter ses profondes crises socio-économique et politique.

Faute de feu vert saoudien pour former son équipe, Saad Hariri avait effectué plusieurs tournées dans des pays arabes, notamment au Qatar où il avait rencontré l'émir Tamim ben Hamad en février dernier, avec qui il avait évoqué la question de la formation du gouvernement. Le Qatar avait alors indiqué qu'il était prêt à aider à relancer l'économie libanaise, mais seulement si la classe politique s'entendait sur un nouveau gouvernement. Et en avril dernier, l'émir du Qatar recevait le Premier ministre sortant, Hassane Diab, appelant à la formation rapide d'une équipe ministérielle et exhortant les protagonistes concernés à accorder la priorité à l'intérêt du Liban.

En mai 2008, à l'issue des combats qui avaient éclaté lors de la prise de contrôle par le Hezbollah d'une partie de Beyrouth sur fond de crise politique, le Qatar avait réuni les protagonistes libanais et négocié un accord qui avait permis l'élection d'un candidat de compromis, le général Michel Sleiman, à la présidence de la République, et la formation d'un gouvernement d'unité nationale.