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Lifestyle - Coolitude

Le « Museum of Failure », ou l’éloge des échecs et des flops

La perfection n’étant pas de ce monde, c’est sans doute pour cette raison que les « échecs » de certains projets sont relativisés, acceptés et même, pour certaines réalisations, valorisés dans un musée.

Le « Museum of Failure », ou l’éloge des échecs et des flops

L’affiche de l’exposition sur laquelle on peut voir la Twin Champagne Glass de Katarina Kamprani. Photo tirée du site de la Cité du design

« Les erreurs ont presque toujours un caractère sacré. N’essayez jamais de les corriger », disait Salvador Dali. Et, avait renchéri le psychologue américain Samuel West, « ne les mettez pas sous le tapis pour que personne n’en parle ». Ce dernier a même fait mieux. En 2017, il a fondé en Suède, où il s’est installé, le Museum of Failure. Un lieu réunissant des objets conçus au départ comme des innovations, mais qui, une fois achevés, n’ont jamais pu être utilisés pour leur usage prévu, devenant des échecs commerciaux ou financiers.

Dans ce lieu, Samuel West a accordé toute son attention à ces fiascos en tentant de montrer aux visiteurs les tournures parfois imprévues d’un processus de création, avec l’humour et l’humilité nécessaires pour accepter ce qui s’apparente à un échec. Le psychologue a ainsi réuni une importante et spectaculaire collection d’art imparfait et non fonctionnel. En plus d’exposer ces objets, il lance un débat sain sur la notion d’échec en cherchant à encourager les prises de risques et les tentatives ambitieuses, et, bien sûr, à retirer de ces expériences les meilleurs enseignements. Son concept convainc. Après la Suède, Los Angeles et Hollywood ont accueilli en 2018 une sélection de spécimens du Failure Museum et, l’année suivante, Shanghai en a fait de même. Et jusqu’au 29 août prochain, la Cité du design à Saint-Étienne, en France, présente une exposition du même cru intitulée « Flops ! Quand le design s’emmêle » .

Humour et dédramatisation

« Échouer, faire un flop, personne n’aime ça, et en général, tout le monde évite d’en parler… Nous avons donc décidé d’aborder ce sujet avec beaucoup d’humour et de dédramatiser l’échec », commente Sylvie Sauvignet, la curatrice de cette exposition. Une quarantaine de productions et autres prototypes qui se voulaient des nouveautés ou même des inventions non abouties sont exposés. La voiture DeLorean conçue dans les années 1980 est l’une des plus spectaculaires. Sylvie Sauvignet précise qu’elle avait été conçue comme une voiture de sport extrêmement rapide mais qui s’est avérée être beaucoup plus lente que d’autres modèles de ce calibre. Si la DeLorean a échoué dans le domaine de ses performances, elle a tout de même réussi à devenir une icône culturelle, et même la star de la série de Back to the Future (Retour vers le futur). Une belle illustration du thème-clé de l’exposition : celui des parcours inattendus de certains flops.

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Parmi les autres ratages exposés, les Google Glass (totalement inconfortables), une bicyclette Volvo en plastique à monter soi-même (trop instable), le jeu de société Trump the Game rapidement battu au niveau des ventes par Monopoly. Également exposée, la Little Miss No-Name, une poupée aux yeux tristes énormes et à la larme coulante datant de 1965 et que la firme de jouets Hasbro avait créée en réaction à la célèbre et glamour Barbie en la dotant d’un look misérable, une toile de jute attachée dans le dos par une épingle à nourrice. Une nouveauté qui n’avait pas séduit les enfants malgré une campagne de marketing et un slogan qui se voulait accrocheur : « Elle n’a pas une jolie robe. Elle est pieds nus. Elle n’a même pas de maison. Tout ce qu’elle possède, c’est l’amour. » De l’amour, certes, mais apparemment pas de quoi faire rêver les petites filles.

Photo tirée du site de la Cité du design

Des inventions inutiles

« C’est en faisant des erreurs que l’on grandit. Il faut accepter d’être médiocre pour devenir bon », affirme de son côté la designer graphique Paula Scher. Dans cette sélection de ratés à découvrir absolument, le visiteur peut également trouver des créations d’artistes insolites, inattendues, qui n’ont jamais cherché à être fonctionnelles. Figurent dans cette catégorie des œuvres de l’architecte grecque Katerina Kamprani qui conçoit, volontairement et pour le plaisir de laisser aller son imagination, des objets peu ou pas utiles, comme cette paire de bottes de pluie au bout ouvert, ce verre à champagne double pour deux personnes, mais inutilisable, et un arrosoir avec le bec tordu vers l’arrière.

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Dans la présentation de l’exposition de la Cité du design, il est également précisé : « Issus ou inspirés du Catalogue d’objets introuvables de l’illustrateur Jacques Carelman (1929-2012), tous ces engins, outils, ustensiles ou dispositifs sont dénués de toute ambition utilitaire. S’ils servent, c’est à rire ou à pleurer, à s’interroger sur l’origine des machines ou peut-être découvrir le pourquoi du comment. » Une seule certitude, « ils sont parfaitement inutilisables », soulignait l’illustrateur et pataphysicien (un terme désignant une « science du particulier » qui apporte des solutions imaginaires aux problèmes généraux, NDLR) en quatrième de couverture de son ouvrage. À vous de tester ces objets par le geste ou l’imagination. De déceler leurs plus grandes failles ou leurs meilleures intentions. Ils sont « le contraire de ces gadgets dont notre société de consommation est si friande, écrivait encore Jacques Carelman. Cet artiste avait notamment conçu une table de ping-pong ondulée, un rouleau compresseur à bicyclette et autres bizarreries pour qu’ « parfaitement inutilisables, c’est-à-dire tout à fait le contraire de ces gadgets dont notre société de consommation est si friande ». Le Failure Museum, un éloge des ratés et un espace où les dadaïstes, amateurs de détournement des objets, auraient certainement aimé se perdre.

« Les erreurs ont presque toujours un caractère sacré. N’essayez jamais de les corriger », disait Salvador Dali. Et, avait renchéri le psychologue américain Samuel West, « ne les mettez pas sous le tapis pour que personne n’en parle ». Ce dernier a même fait mieux. En 2017, il a fondé en Suède, où il s’est installé, le Museum of Failure. Un lieu réunissant...

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