
L'archevêque maronite de Beyrouth, Boulos Abdel Sater. Photo ANI
L'archevêque maronite de Beyrouth, Boulos Abdel Sater, s'en est pris mardi aux responsables politiques libanais, dont il a dénoncé "les mensonges et l'irresponsabilité", déclarant que l'histoire se souviendra d'eux comme des "tyrans, corrompus et assassins".
Ce prêche du dignitaire maronite a été lancé alors que le Liban fait face, depuis plus d'un an, à plusieurs crises d'une grave ampleur, aussi bien socioéconomique, financière, politique que sanitaire, tandis que les autorités libanaises, largement contestées par la rue, ne parviennent pas à lancer des réformes qui permettraient de mobiliser l'aide de la communauté internationale. En raison de ces crises, aggravées par la pandémie de coronavirus et la double explosion du port de Beyrouth, qui a tué plus de 200 personnes, plus de la moitié de la population libanaise vit désormais sous le seuil de pauvreté, dans un pays qui connaît une inflation rampante.
"Il y a un an j'ai lancé devant de nombreux responsables le cri du peuple libanais qui est opprimé et désespéré, à qui l'on a volé sa dignité, et son droit à manifester et réclamer des comptes. Depuis, rien n'a changé. Au contraire, les choses ont empiré, la corruption a proliféré, les mensonges et l'irresponsabilité se sont généralisés", a lancé l'archevêque, lors d'une messe en l'église Saint Maron. "Prenez garde, vous les dirigeants qui construisez votre gloire sur l'oppression et l'humiliation de ceux qui ont confiance en vous. L'histoire n'aura pas pitié de vous et retiendra vos noms parmi les tyrans, les corrompus et les assassins", a-t-il déclaré.
"Ils n'ont pas bougé le petit doigt"
"Pourquoi soutenons-nous des responsables qui n'ont pas versé une seule larme face aux maisons dévastées et aux corps démembrés, qui n'ont pas bougé un petit doigt pour que la vérité soit faite ? Pourquoi sommes-nous divisés à cause de politiciens qui exploitent nos peurs et nos souffrances pour rester au pouvoir ?", s'est encore interrogé Mgr Boulos Abel Sater. Et d'appeler à "cesser de faire passer le Liban après les intérêts confessionnels ou partisans et les allégeances internes ou externes". "Refusons de devenir les agents des projets des grandes puissances", a-t-il exhorté.
L'année dernière, à l'occasion également d'une messe donnée pour la Saint Maron, l'archevêque maronite de Beyrouth avait déjà marqué les esprits en appelant la classe politique, dont beaucoup de représentants étaient présents, à "assurer une vie digne aux Libanais ou à démissionner". Cet appel avait été lancé alors que le Liban connaissait, depuis plusieurs mois, un mouvement de contestation de grande ampleur contre l'ensemble de la classe politique.
"Eviter l'effondrement"
Pour sa part, le patriarche maronite, Mgr Béchara Raï, a réitéré lors d'une messe à Bkerké son appel à l'organisation d'une conférence nationale, sous l'égide de l'ONU, dédiée à "éviter l'effondrement du Liban". Les Nations unies ont "la responsabilité d'aider tous ses Etats membres qui font face à des crises existentielles", a-t-il affirmé, estimant que le Liban a besoin aujourd'hui d'un acteur international qui joue un rôle "décisif et strict". "Les Libanais doivent être sauvés", a-t-il déclaré. "Nous appelons donc toutes les forces qui croient en l'unité du Liban, sa souveraineté et ses particularités, à coopérer pour remettre le Liban sur le chemin de la renaissance", a encore appelé le dignitaire.
Et le patriarche de rappeler les mots qu'a eus lundi le pape François concernant le Liban. Lors d'une réunion avec des membres de diplomates accrédités au Vatican, le chef de l'Eglise catholique avait en effet averti du risque que "le Liban perde son identité et se trouve encore plus impliqué dans les tensions régionales" et plaidé pour un "engagement politique national et international renouvelé pour favoriser la stabilité" du pays.
Le patriarche a par ailleurs reçu le vice-président de la Chambre, Elie Ferzli, qui a estimé, à l'issue de leur entretien, que la crise que traverse actuellement le Liban est sur le point de devenir une crise "existentielle". M. Ferzli a souligné que, pour le dignitaire, il n'y a pas plus important que la formation d'un gouvernement qui permettrait de mettre le pays "sur la voie du salut" et de résoudre "les problèmes des citoyens et les crises économique, monétaire, politique et sociale". Mgr Raï a déclaré qu'"avec la formation du gouvernement, les droits de toutes les composantes de la société libanaise seront respectés". "La question des dommages subis par toutes ces composantes de la population est bien plus importante que les prétentions de certains à protéger leur communauté", a-t-il ajouté.
Nous sommes encore plus coupables qu’eux tous de les laisser se comporter comme s’ils étaient nos maîtres et qu’ils nous avaient achetés. L’église, le Vatican, les maronites libanais ainsi que tous les autres libanais de toutes confessions, vous qui continuez à croire que ces malfrats font partie de votre religion ou vénèrent le même dieu que vous, vous avez du sang sur les mains tout comme eux du fait de n’avoir pas agit jusqu’à maintenant pour les en empêcher. On ne peut pas sauver un pays du péril avec des bonnes paroles ou des remontrances, seuls des actes concrets et une union sacrée aboutiront à la gloire il faut enfin l’intégrer et agir en conscience.
13 h 50, le 10 février 2021