Il était grand temps : le mont Hermon, en arabe Jabal el-Cheikh (chaîne de montagnes de l’Anti-Liban), vient d’être classé réserve naturelle par une loi adoptée récemment par le Parlement. Cette réalisation est le fruit de deux ans de labeur acharné de la part de la municipalité, des responsables politiques de la région de Rachaya (Békaa-Ouest) et des ministres concernés.
Cet espace de 1 260 hectares, compris dans le terrain n° 5851 à Rachaya el-Wadi, est donc désormais protégé par la loi. Cette terre est non seulement un sanctuaire de biodiversité, mais elle a aussi une dimension historique et symbolique : selon la légende, c’est là qu’aurait eu lieu la transfiguration de Jésus-Christ. Cette région a souvent attiré les touristes, les écologistes et toute personne qui aime explorer la nature.
La création de cette nouvelle réserve, la 18e du pays, permettra de protéger de la pollution les ressources naturelles du mont Hermon, en particulier les eaux superficielles et souterraines, et préservera les équilibres environnementaux, les zones humides et tous les écosystèmes qui en dépendent. Le mont Hermon est connu pour sa grande variété d’espèces végétales, dont beaucoup possèdent des propriétés médicinales, pour ses arbres pérennes (qui conservent leurs feuilles toute l’année) et ses animaux rares. C’est aussi un lieu de passage privilégié pour les oiseaux migrateurs.
Le classement contribuera également à préserver le magnifique paysage du mont Hermon, ainsi que les espèces végétales et animales, particulièrement les espèces menacées, rares ou évoluant dans un milieu très étroit. Il préservera les habitats de ces espèces et leur équilibre biologique. Grâce à cette loi, la recherche scientifique se développera, ainsi que l’écotourisme et l’agriculture.
Satisfaction officielle
Pour sa part, l’ex-ministre de l’Environnement Fadi Jreissati a salué cette décision officielle, souhaitant que d’autres zones soient déclarées réserves naturelles. De son côté, le député de Rachaya Waël Bou Faour, qui a personnellement œuvré en faveur de ce projet environnemental, déclare à L’Orient-Le Jour que « l’adoption du projet de loi préservera la montagne dans toute sa diversité naturelle, et mettra en valeur sa richesse naturelle, écologique, religieuse et historique, tout en encourageant le tourisme ». « Depuis quelques années, nous nous sommes opposés avec succès à un projet d’asphaltage de la route menant à la montagne, poursuit-il. C’est ainsi que nous avons lancé la discussion autour de la création de la réserve. Le conseil municipal présidé par Bassam Dalal a présenté le projet qui a été approuvé par le gouvernement précédent, avant de faire son chemin jusqu’au Parlement. »
« Désormais, nous suivrons les procédures avec le ministère de l’Environnement afin de former un comité pour la direction de la réserve, qui mettra en œuvre des mesures pratiques de gestion et des mesures de protection, délimitera avec exactitude l’aire protégée, étudiera les moyens de protéger la vie naturelle qui s’y trouve et emploiera des gardiens », a également annoncé M. Bou Faour.
L’ex-président du conseil municipal de Rachaya, Bassam Dalal, a indiqué lors d’un entretien avec L›OLJ que « depuis juillet 2018, la municipalité avait formulé la demande de faire du mont Hermon une réserve, étant donné son symbolisme autant environnemental, culturel que religieux ».
« Les études d’impact environnemental des différentes activités dans la région ont mis en évidence la nécessité d’en faire une réserve en raison de sa diversité biologique, de la présence d’arbres et de plantes rares, et de certaines espèces animales en voie de disparition », ajoute-t-il. Bassam Dalal en profite pour demander aux municipalités de prendre soin des espaces verts et de préserver l’environnement, en assurant une gestion qui limiterait les ravages des incendies, plus dévastateurs d’année en année.
Nizar Hani, directeur d’une autre réserve, celle des cèdres du Chouf, en sait quelque chose. Il souligne l’impact du classement sur le développement de l’écotourisme ainsi que sur l’organisation de randonnées sur les sentiers aménagés à cet effet. Il affirme à L’OLJ qu’il faut « préserver l’écosystème du mont Hermon pour que les espèces végétales caractéristiques de la chaîne orientale soient préservées ». « Du fait que la réserve s’étend sur une dénivellation allant de 800 à 2 800 mètres d’altitude, elle sera précieuse pour étudier les effets des changements climatiques sur la nature libanaise », ajoute-t-il.
En bon expert du domaine, Nizar Hani précise que « la prochaine étape après le classement doit être celle de la formation d’un comité de gestion, par décision du ministre de l’Environnement, qui comprendra des représentants de la municipalité et des experts. Ce comité sera une équipe de travail spécialisée chargée de réaliser des études et des enquêtes sur le terrain concernant la diversité biologique et culturelle en vue de préparer un plan administratif pour les cinq prochaines années ».
Des plantes médicinales utilisées par la population
La nouvelle réserve du mont Hermon a une particularité : elle est recouverte de neige la plupart des mois de l’année, ce qui conduit à alimenter les nappes d’eau souterraine. Ce site constitue l’un des plus grands réservoirs souterrains d’eau de la région, un véritable château d’eau. Ses plantes médicinales sont nombreuses et bien connues de la population locale. Dans ce contexte, une étude a été publiée dans le Journal of Ethnopharmacology, qui a documenté pour la première fois les connaissances sur l’utilisation des plantes médicinales de la flore libanaise du mont Hermon dans la médecine traditionnelle. Les résultats obtenus indiquent qu’environ 124 espèces végétales sont encore utilisées par les communautés autour du mont Hermon pour le traitement de diverses maladies respiratoires, digestives, hépatiques, cutanées, rhumatismales, ainsi que pour le traitement du diabète et autres maladies chroniques.Les résultats ont mis en évidence l’existence de 33 plantes pour le traitement du système respiratoire : rhume, sinusite, mal de gorge, toux et asthme, et 63 plantes médicinales pour les affections du système gastro-intestinal et du foie, telles que la diarrhée, les vers intestinaux, les crampes abdominales, les ulcères gastriques, les hémorroïdes, etc. Quelque 27 plantes auraient des vertus pour le système rénal, 11 pour le traitement des maladies qui affectent le système reproducteur, les troubles menstruels et les maladies de la prostate, 15 pour combattre la fièvre, et plusieurs autres plantes pour les maladies du système sanguin, le diabète, les maladies de la peau, le système cardio-vasculaire, l’hypertension, les palpitations, l’allergie et la fatigue.
commentaires (6)
Enfin une bonne nouvelle!!
Jean-Paul Khayat
06 h 27, le 09 mars 2022