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Économie - Interview

Jihad Bitar : La France veut contribuer à freiner la fuite des cerveaux libanais

Très présente aux côtés du Liban sur le plan politique, la France soutient l’entrepreneuriat libanais depuis des années à travers un certain nombre de projets et d’initiatives. Une coopération sur laquelle revient pour « L’Orient-Le Jour » Jihad Bitar, directeur de Smart ESA de l’École supérieure des affaires, à l’occasion de cette nouvelle année.

Jihad Bitar : La France veut contribuer à freiner la fuite des cerveaux libanais

Jihad Bitar, directeur de l’incubateur de start-up Smart ESA de l’École supérieure des affaires. Photo DR

Les difficultés que traverse le Liban depuis un an et demi découragent les investisseurs, mais la France continue, elle, de croire au potentiel des entrepreneurs libanais en général et dans le domaine de la tech en particulier. En quoi ce soutien se distingue-t-il ?

La France est effectivement un partenaire très impliqué, même si elle communique relativement peu sur ses activités, comparée à d’autres agences gouvernementales ou organisations internationales présentes dans le pays et positionnées sur les mêmes créneaux.

Pour rester focalisé sur Smart ESA, programme d’incubation et d’accélération lancé en 2017 par l’École supérieure des affaires (ESA Business School) à Beyrouth, avec justement l’appui de l’ambassade de France aux côtés de la Banque du Liban, le soutien français a permis à plus de 80 start-up locales de bénéficier d’une expertise et/ou d’une aide financière pour se développer, avec quelques francs succès à la sortie et beaucoup d’expérience engrangée. La dernière fournée, en incubation depuis mai dernier, est arrivée à la fin de son parcours en décembre, dans le cadre du troisième « Demo-Day », en partenariat avec Air France et la plateforme MAGNiTT.

Enfin, la France et ses différents acteurs accordent leur soutien dans l’objectif de renforcer l’écosystème libanais en donnant les moyens à ses entrepreneurs de mettre leurs concepts à l’épreuve, de créer des emplois au Liban et de trouver des débouchés à l’étranger, offrant ainsi un levier pour freiner la fuite des cerveaux liée au départ de nombreux jeunes découragés par l’absence de perspectives dans la conjoncture actuelle. Elle leur ouvre également un accès au marché français, avec la possibilité d’atteindre à travers celui-ci les marchés européens et américain, et met à leur disposition une expertise à laquelle ils n’ont pas forcément accès.

Smart ESA est un programme d’incubation et d’accélération de start-up lancé en 2017 par l’École supérieure des affaires (ESA Business School) à Beyrouth, avec le soutien de l’ambassade de France et de la Banque du Liban. Photo DR

Comment s’est manifesté ce soutien depuis le début la crise ?

Il s’est poursuivi avec la même intensité malgré les événements qui ont secoué le pays depuis le début du mouvement de contestation populaire, le 17 octobre 2019. Pour l’anecdote, le premier Hackathon sur la mode du futur, sponsorisé par l’ambassade de France et l’Agence universitaire de la francophonie (AUF), a justement été lancé ce jour-là, et une partie des participants, qui ne pouvaient plus rentrer chez eux en raison des routes bloquées par les manifestants, ont dû passer la nuit dans les locaux de l’école.

Le Hackathon est un événement au cours duquel des équipes composées de profils variés doivent, dans un laps de temps assez court (2 à 4 jours généralement), s’atteler à trouver des solutions innovantes pour répondre à une problématique donnée. Celui sur la mode du futur avait rassemblé cinq équipes, et les vainqueurs ont tiré leur épingle du jeu en imaginant une solution innovante de tissu à destination des secouristes, une idée finalement très connectée à une actualité internationale dominée par les problématiques sanitaires depuis le début de la propagation du Covid-19. Les gagnants ont remporté un séjour d’une semaine dans un incubateur spécialisé à Station F, le plus grand campus de start-up du monde, à Paris. Par ailleurs, Smart ESA a contribué au lancement d’un autre Hackathon en octobre dernier, en partenariat cette fois avec l’Université Saint-Esprit de Kaslik, entre autres. Organisé en visioconférence, il était centré sur le thème de la solidarité libano-chypriote dans le sillage de la double explosion qui a ravagé Beyrouth le 4 août.

Pour mémoire

« EcoSwitch Coalition » : les entrepreneurs écolos ont désormais leur plate-forme

Je peux citer plusieurs autres exemples de l’appui français aux start-up libanaises en 2020 avec le projet d’école de codage, fruit d’un accord annoncé en juillet entre l’Agence française de développement (AFD) et l’ESA, ou encore le prix entrepreneur HEC organisée par L’Orient-Le Jour, la Chambre de commerce de Beyrouth et du Mont-Liban, l’ESA ainsi que les anciens de HEC Liban, et qui a permis en mai aux lauréats de remporter un séjour de trois mois à Station F. En décembre, l’ESA, l’AUF et l’Institut français se sont associés autour du projet Fab’Lib, qui doit servir de passerelle entre la France et le Liban afin d’explorer et de promouvoir de nouveaux outils dans le domaine de l’enseignement en ligne.

Au-delà de l’aide émanant directement des agences gouvernementales, les entrepreneurs libanais ont également pu compter sur le soutien des régions françaises, à l’image du sommet Sprint (start-up Paris Région International), un réseau d’incubateurs de start-up francophones, qui s’était réuni à l’ESA en 2019 et qui s’est concrétisé grâce à l’appui de la région Île-de-France. Une délégation libanaise devait également se rendre au Salon Vivatech à Paris, deuxième plus important rendez-vous mondial du secteur. Mais cette visite a finalement dû être annulée en raison de la pandémie.

Comment voyez-vous cet appui français s’orienter à court et moyen terme ?

Plusieurs projets sont en gestation. Mais comme cela a déjà pu transparaître lors de Fab’Lib, l’accent va désormais être mis sur les technologies de l’éducation (la EdTech). Un domaine où il y a un réel besoin qui s’est créé avec le développement de l’enseignement en ligne, en marge de la crise sanitaire et dans lequel les start-up libanaises ont une véritable carte à jouer.

L’école de codage que l’AFD et l’ESA veulent lancer, avec l’appui de la BDL, va également permettre de former des talents qui manquent au Liban et qui pourront, à terme, attirer des sociétés qui trouveront les ressources humaines nécessaires pour sous-traiter une partie de leurs activités au Liban qui est devenu bien meilleur marché pour les investisseurs étrangers en raison de la dépréciation de la livre.



Les difficultés que traverse le Liban depuis un an et demi découragent les investisseurs, mais la France continue, elle, de croire au potentiel des entrepreneurs libanais en général et dans le domaine de la tech en particulier. En quoi ce soutien se distingue-t-il ? La France est effectivement un partenaire très impliqué, même si elle communique relativement peu sur ses activités,...

commentaires (3)

Le gouvernement français pourrait aussi mettre une cellule de Tracfin afin de traquer tous les capitaux transférés dans les capitales européennes et provenant d’argent public libanais pillé et volé. Ils l’ont bien fait pour Rifaat El Assad alors pourquoi pas contre nos politiciens corrompus et véreux

Lecteur excédé par la censure

10 h 02, le 04 janvier 2021

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Commentaires (3)

  • Le gouvernement français pourrait aussi mettre une cellule de Tracfin afin de traquer tous les capitaux transférés dans les capitales européennes et provenant d’argent public libanais pillé et volé. Ils l’ont bien fait pour Rifaat El Assad alors pourquoi pas contre nos politiciens corrompus et véreux

    Lecteur excédé par la censure

    10 h 02, le 04 janvier 2021

  • Le seul moyen d,'éviter cela est de nous aider à nous débarrasser de la racaille au lieu de la caresser dans le sens su poil. Cela est il si dur à comprendre LA MÉTHODE DOUCE ne marchera pas .. amenez les guillotines

    Liban Libre

    08 h 15, le 04 janvier 2021

  • La france aiderait plus en parlant moins et en agissant tel que bloquer les comptes en banques des banquiers voleurs et des politiciens qui ont transféré leurs dollars dans les banques de l union Europeen. On en a assez des belles paroles et des caresses mal placées et stériles .l effet Macron qui n est pas plus q ‘une piqûre de morphine , ne fonctionne plus ....

    Robert Moumdjian

    01 h 11, le 04 janvier 2021

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